Les résultats des élections législatives du 25 novembre marquent un tournant dans l'histoire du Maroc. Une nouvelle ère se profile, qui n'est pas sans rappeler celle qui a suivi l'avènement du gouvernement de Abderrahmane El Youssoufi en 1998. Le verdict des urnes est tombé. Le PJD est premier avec plus de 80 sièges… et ce n'est pas fini. Reste aussi à voir ce que nous réserves les 17 listes locales, ainsi que la liste nationale dont les résultats n'étaient pas encore dévoilées à l'heure où nous mettions sous presse. L'Istiqlal est en deuxième position avec, pour l'heure, 45 députés. Les deux premières places sont, ainsi, occupées par deux formations conservatrices. L'ossature du futur gouvernement, sauf coup de théâtre, sera composée de la Lampe et de la Balance. Au P.I., la question était au menu de la réunion ouverte du comité exécutif. Samedi, les membres de cette instance ont, pendant une heure, fait une « évaluation » des résultats glanés par le parti. Même si le score est en deçà des attentes de la direction, les ténors du PI s'accordent à minimiser l'impact de ce mini revers électoral, sachant que lors des législatives de 2007, l'Istiqlal était arrivé premier avec 52 sièges. Istiqlal, PJD : un front commun « Ce n'est pas un mauvais score, sachant que nous avons présidé le gouvernement, dans un contexte marqué par les effets de la crise économique mondiale », explique Taoufiq Hjira, membre du comité exécutif du P.I. Et le ministre de l'Urbanisme d'ajouter : « Pendant quatre ans, le chef du gouvernement a été la cible de critiques virulentes ». Au cours de la même réunion, la direction de l'Istiqlal a abordé, comme il fallait s'y attendre, l'alliance avec le PJD. « Aucun membre du comité exécutif ne s'est prononcé contre une telle perspective, c'est la tendance générale qui s'est dégagée le samedi », nous confie Taoufiq Hjira. Des propos qui sont parfaitement en phase avec ceux de M'Hamed Khalifa et, avant lui, d'un certain Mohamed Ansari, deux des ténors du PI. Karim Ghellab a beau nuancer, laissant entendre que cette alliance est « conditionnée par un accord à trouver avec le PJD sur le modèle de société que nous voulons pour notre pays », mais c'est un premier pas des istiqlaliens en direction des PJDéistes, sachant que les relations entre les deux formations sont plutôt cordiales. L'UGTM et l'UNTM, les émanations syndicales de la Balance et de la Lampe ont, par exemple, déjà instauré, en 2010, les bases d'une coordination entre eux. « La réunion ouverte du comité exécutif de l'Istiqlal est appelée à se tenir aussitôt après la proclamation des résultats officiels », assure Hjira. « Quant à la participation d'un gouvernement mené par le PJD, ce sont les instances du parti qui sont habilitées à donner le feu vert », poursuit-il. Les urnes n'ont pas sanctionné le gouvernement L'équipe d'Abbas El Fassi a-t-elle réellement été sanctionné par les électeurs le 25 novembre ? Les résultats obtenus par l'Istiqlal – deuxième place avec 45 sièges, un score appelé à la hausse avec la proclamation des résultats de la liste nationale – laissent entendre le contraire. Un autre indicateur qui corrobore cette observation, la réussite de tous les ministres qui se sont présentés à ces élections anticipées. Yasmina Baddou et Karim Gellab, du P.I., à Casablanca, Mohamed Amer et Ahmed Réda Chami, de l'USFP, à Fès, Driss Lachgar, également USFP, à Rabat, Aziz Akhannouch et Salaheddine Mezaouar, RNI, respectivement à Tiznit et Meknès. Sommes-nous alors en face d'une autre facette de la spécificité marocaine ? Mohamed Labied, SG de l'UC, répond par l'affirmative.Des plaintes et une seule condamnation. Jamais sans la Koutla Le PI ne compte pas déroger à une règle vieille de plus de 13 ans. En 1997, c'est un congrès extraordinaire qui avait accordé sa bénédiction à la participation des istiqlaliens au gouvernement de Abderrahmane Youssoufi. En 2002, c'est le conseil national qui a balisé le terrain aux ministres pour intégrer l'équipe de Driss Jettou. Le facteur de la Koutla est également présent dans la décision finale du PI de rejoindre le PJD. Samedi soir, les composantes du bloc démocratique ont tenu une réunion d'évaluation des résultats des législatives anticipées. Durant les prochains jours, les réunions de ce genre devront s'enchaîner. La toute proche nomination par le roi Mohammed VI d'un chef de gouvernement issu du PJD sonnera le début des concertations approfondies entre les islamistes et la Koutla, chacune des deux parties étant appelée à faire des concessions afin de de se mettre d'accord sur la rédaction d'un programme commun.