Le Maroc suit attentivement l'actualité de l'autre côté de la Méditerranée. Une récession ou dépression, sur le Vieux continent, aura des impacts dévastateurs sur notre économie. Alors que l'Europe essaye d'entrevoir le bout du tunnel après l'une de ses plus graves crises, le Maroc lui, est dans l'expectative. Car quand ça ne va pas chez le vieux continent, nous subissons de plein fouet les conséquences de leur mauvaise conjoncture. Pour Jawad Kerdoudi, président de l'IMRI (Institut marocain des relations internationales), le Maroc doit être vigilant vis-à-vis de la zone euro et suivre son évolution. « Tout d'abord, le dirham est lié à un panier de devises étrangères dont l'euro est l'élément principal. D'autre part, pour des raisons historiques et géographiques, les échanges commerciaux du Maroc se font aux deux-tiers avec l'Europe, aussi bien pour les importations que pour les exportations », explique Kerdoudi. De ce fait, si les exportations marocaines ont marqué un bond le premier semestre de cette année, un risque plane toutefois sur le moyen et le long terme. « Le problème principal se situe au niveau du risque structurel. L'Europe entamera une récession qui durera plusieurs années. La demande ainsi que les transferts des MRE (Marocains résidents à l'étranger, ndlr) risquent de baisser considérablement », nous confie pour sa part Ahmed Azirar, président de l'Association marocaine des économistes d'entreprise. Le risque de la récession n'est pas le seul, selon Azirar, à nous met en garde contre le risque financier. Et pour cause, quatre banques françaises qui ont des filiales au Maroc détiennent des avoirs totalisant 8,6 milliards d'euros sur la dette grecque. Certains observateurs noteront que, comparé à leurs 9,5 milliards d'euros de bénéfices cumulés, le risque ne sera pas très considérable pour les banques marocaines. Cependant, il ne faut pas oublier que le système bancaire marocain est en manque de liquidités. Donc, la moindre décision de la part des banques françaises de « fermer le robinet » des filiales marocaines aura des conséquences non négligeables. Il faut trouver d'autres moteurs de croissance ! Le troisième risque, qui dépend étroitement de l'asséchement des liquidités au niveau international, a trait aux IDE (Investissement directs à l'étranger). « La croissance des IDE au Maroc évolue en dents de scie. En benchmarquant la région, le Maroc est en bonne position. Cependant, les IDE en provenance d'Europe peuvent subir un sacré coup », prévient Azirar. Malgré l'inquiétude de l'économiste, il subsiste néanmoins un revers de médaille. Des investisseurs et fonds d'investissements présents en Europe peuvent se redéployer sous d'autres cieux. El le Maroc est le mieux positionné pour recevoir ces investisseurs, selon Azirar. Ceci dit, la leçon qu'on peut tirer de cette conjoncture est que la diversification de nos marchés est devenue une quasi-nécessité. « L'Europe est un partenaire économique primordial pour le Maroc. Mais, il faut redoubler d'efforts pour diversifier notre économie vers l'Afrique, l'Asie, et l'Amérique », note Kerdoudi. Pour Azirar, il faut se recentrer sur le marché intérieur en créant de nouveaux moteurs de croissance, comme la consommation interne ou le développement des chantiers publics. Mais, également, s'ouvrir vers les marchés arabes, l'Afrique subsaharienne, les pays du BRIC (le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine) et les pays émergents. Et pour le tourisme ? Hamid Bentahar, DG du Centre régional de tourisme (CRT) de Marrakech. «La crise en Europe peut avoir un impact sur l'état de santé du tourisme au Maroc. C'est pour cela qu'on observe attentivement ce marché. Mais, il est encore tôt pour se prononcer sur le degré de cet impact. Pour l'instant, je peux vous dire que le rythme des réservations dans les hôtels de Marrakech est correct et nous avons reçu, récemment, beaucoup de demandes dans l'incentive. D'ailleurs, notre stratégie de diversification a commencé à donner ses fruits. Nous avons enregistré des hausse remarquables au niveau des marchés britannique et allemand. Nous allons continuer dans ce sens avec un renforcement de la communication vers les pays scandinaves et les pays de l'Est. Je ne suis pas inquiet, il faut juste rester vigilant, serein et continuer nos efforts de promotion».