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Le coup de gueule de la société civile
Publié dans Le Soir Echos le 02 - 11 - 2011

La société civile a bien peur d'être marginalisée. Elle aspire à jouer un rôle plus actif dans le Maroc de demain, mais s'estime déjà lésée dans le processus des préparatifs aux élections.
« Avant d'évaluer l'implication de la société civile dans les préparatifs aux élections, il faut, d'abord, en définir le rôle. A mon sens, il se décline en trois actions : interpeller, participer et observer, encore faut il préciser que cette dernière mission se confond souvent avec l'action de contrôler ». Said Tbel, militant associatif depuis près de quarante ans, sait de quoi il parle. Ayant apporté son eau au moulin de plusieurs associations, son expérience lui permet aujourd'hui de constater que la société civile, malgré tout le mal qu'elle se donne, n'a pas encore acquis le droit à une implication à part entière dans le processus électoral.
Absente des lois
« La société civile est absente de l'ensemble des éléments qui construisent ce processus à commencer par les lois électorales, le découpage, les programmes… », souligne-t-il, affirmant que la société civile, dans ce contexte particulier, n'est pas restée les bras croisés. « Les associations de jeunes ne ménagent aucun effort pour mobiliser la nouvelle génération, composante capitale dans la construction du Maroc de demain. La société civile participe activement à l'alimentation des débats et à la formation des jeunes, mais ce travail doit faire l'objet d'un travail à long terme ».
Les associations féminines ont, elles aussi, prouvé leur dynamisme en ce moment. « Après l'adoption de la nouvelle Constitution, une composante très importante s'est imposée par l'article 19 consacrant la parité. Les associations des femmes militent pour faire respecter cet acquis par les partis , mais les rouages politiques ne sont pas prêts pour l'accepter », déduit ce militant.
Des plaidoyers sans échos
En somme, les plaidoyers de la société civile ne suscitent pas encore l'intérêt souhaité de la part des partis, ou du moins de la majeure partie d'entre eux. Mais n'oublions pas que le tissu associatif participera à l'observation des élections. « Cette phase s'est déroulée dans la précipitation. La société civile sera amenée à observer, détecter les manigances politiques ayant pour but de contourner le système (…) Si les élections ne se passent pas dans la transparence, comme attendu, la société civile va réagir ! », prévient Said Tbel.
Message clair, la rue qui s'est révoltée, il y a quelques mois, n'hésitera pas à se faire entendre de nouveau si elle s'estime « trahie ». « L'acteur associatif est plus proche de la communauté. Son rôle après les élections sera encore plus décisif, puisqu'il devra évaluer et contrôler le nouveau Parlement et suivre la mise en application de la Constitution », estime ce militant.
En attendant, les associations accélèrent leur cadence afin de participer à l'éveil des jeunes. L'association « Eden » en donne un exemple éloquent par l'organisation, le week-end dernier, d'un séminaire baptisé « Pol'Ethiquement correct ». Il a été question d'initier les jeunes à la politique, en tant que processus où plusieurs éléments interagissent. « Nous avons voulu réagir au clivage entre politiciens et jeunes et expliquer à ces derniers le sens de plusieurs choses dont ils entendent parler mais qu'ils ne comprennent pas, comme pouvoir, Etat et contre-pouvoir », indique Nawfel Chana, membre fondateur de l'Association « Eden » et initiateur de ce séminaire. En majorité des étudiants, les bénéficiaires de ce séminaire ont en prouvé l'intérêt lorsqu'ils ont balancé des confusions d'ordre sémantique et manifesté une hésitation à prendre une décision quant à voter ou boycotter les élections. « Les partis politiques font tous les mêmes promesses, leurs programmes se ressemblent tellement que les jeunes ne savent plus pour qui voter », constate ce jeune militant en soulignant le lien entre cette situation à sa conviction qu'aucun parti n'a réussi, à l'heure actuelle, à élaborer un projet de société.
Consensus en retard
La Constitution, qui devait servir de terrain à un consensus politique généralisé, n'a pas encore été assimilée. Du coup, ces élections s'inscrivent, pour plusieurs, dans la précipitation. « La Constitution devait susciter des débats sur une durée d'au moins un an pour en sortir avec un consensus », souligne ce militant.
Pour d'autres militants associatifs, il est déjà trop tard d'espérer un changement. Ils estiment que l'implication de la société civile aux élections précédentes n'a pas eu d'impact concret. De l'avis du militant associatif, Azzedine Akesbi, « Cela ne sert à rien ! Personnellement, j'estime que tant qu'il n'y a pas de commission indépendante pour suivre les élections, on ne fait que perdre du temps ! ».


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