Agadir a endossé, samedi soir, le costume de ville engagée lors du Concert de la Tolérance 2011. Offrant sa plage à quinze artistes enthousiastes, elle a chanté la diversité et l'amitié franco-marocaine. En grande pompe. Des bémols étaient à signaler aussi. La paix et l'humanité, le talent au service de l'autre, les ponts de tolérance, et l'abolition de la différence», tels étaient les slogans scandés par les artistes venus à Agadir, devant des spectateurs appartenant en majorité à la gent masculine. Coproduction franco-marocaine de grande envergure, cet événement prend, chaque année, l'allure d'un kaléidoscope musical d'artistes venus célébrer la pluralité et le respect de l'autre. « L'évènement, initialement, est né à l'initiative de TF1 il y a six ans, à la suite des attentats de Madrid et de la stigmatisation de la communauté musulmane en France après cette période. C'est un plateau multiethnique», rappelle Yanis Chebbi, directeur artistique de l'évènement. Patchwork Et Chebbi d'ajouter : « Il est l'agrégation de plusieurs partenaires médias et institutionnels, sans sponsors privés, dont M6, RTL, 2M et 2M Radio et le groupe mondial Lagardère qui inclut Le Journal du Dimanche, Paris Match et Elle.» À la question «Pourquoi Agadir ? », le responsable répond : « Parce que les bons partenariats se sont aussi développés au niveau de cette ville ouverte à la culture et à l'autre ». Le concert a réuni une quinzaine d'artistes de tous bords, un patchwork se faisant l'écho du thème prôné par ses organisateurs. Entre message d'engagement et divertissement, entre tolérance et starlettes en promotion, le concept s'est quelque peu perdu. Effectivement, la majorité des artistes affichaient des origines diverses, dont la française Chimène Badi, d'origine algérienne, le Français DJ Abdel d'origine marocaine, Elisa Ovati, Française de père marocain, Aggun la Franco-Indonésienne dont chaque chanson est enregistrée en trois langues – anglais, français, arabe. Magic System, groupe originaire de Côte-d'Ivoire qui a interprété sa sempiternelle « Zouglou Dance », les jeunes rockeurs de BB Brunes, venus défendre leurs couleurs et d'autres couleurs de la planète, et le groupe français Collectif métissé et ses membres aux influences variées, festif et pêchu comme à son accoutumée. En hommage à la fraternité entre les rives, certains chanteurs ont interprété des reprises classiques dont « Imagine » de John Lennon revisitée par BB Brunes, « Rock the Kasbah » du groupe anglais The Clash interprété par Rachid Taha et « Free » de Stevie Wonder réinterprétée par Patrick Fiori, Chimène Badi, Anggun et Inna Modja. Du côté du Maghreb, les planches de la tolérance ont accueilli le Franco-Algérien Rachid Taha, le chanteur algérien de raï Cheb Bilal, auteur de chansons probantes, pour lequel le public a réservé un accueil plus que chaleureux… à croire qu'ils n'attendaient que lui. Le chanteur marocain Ghani et la charismatique Oum, qui a chanté le premier single « Houwa » de son nouvel album prévu pour le printemps, ont également répondu présent. Dysfonctionnements phénoménaux L'évènement était manifestement plus un plateau télévisé qu'un concert et nous a réservé quelques failles dont des arrêts brusques pendant les chansons, et ce, pour les besoins de l'émission qui sera ultérieurement diffusée sur M6. Certaines aberrations ont également ponctué l'évènement, dont la présence d'Alexandra Stan déguisée en Barbie Girl à demi-dévêtue, venue plutôt pour faire la fête que pour véhiculer des messages humains. Heureusement que les organisateurs ont tenu à communiquer, pendant la soirée, sur les rencontres de certains artistes avec les associations de la région, dont la visite de Patrick Fiori à l'unité médicale ATM, association qui recueille des enfants de la rue, et celle d'Anggun aux coopératives féminines de la région. Des reportages préenregistrés qui seront diffusés lors de l'émission de M6, en novembre prochain. Au vu du nombre considérable d'artistes, venus tous pour soutenir une bonne cause, sans aucune rémunération en retour, l'enjeu est de taille. Dans ce contexte, Yanis Chebbi a précisé qu'il ne connaissait «pas un autre projet en Afrique qui ait un dispositif aussi lourd, qui rassemble autant de médias et qui soit coproduit par deux pays des deux rives de la Méditerranée ». Néanmoins, entre message d'engagement et divertissement, entre tolérance et starlettes en promotion, et devant un public malheureusement étranger aux chansons de la plupart des artistes, le concept s'est quelque peu perdu. Il n'en reste pas moins que cet évènement, ne manque pas de construire des ponts, ceux d'ouvrir nos concitoyens à la musique d'autrui, et vice-versa.