Le ministre de l'Economie et des Finances, Salaheddine Mezouar, a annoncé vendredi les grandes lignes du projet de la loi de Finances 2012, adoptées par le Conseil des ministres. A la clé, un taux de croissance de 4,8%, une inflation de 2%, un baril de pétrole de 100 dollars et un déficit autour de 4%. Les dés sont jetés. Salaheddine Mezouar, ministre de l'Economie et des Finances vient d'annoncer la couleur à l'occasion de l'adoption, vendredi, des grandes lignes du projet de la loi de Finances 2012 en Conseil des ministres présidé par le souverain. L'argentier du Maroc table sur un taux de croissance de 4,8%, en dépit d'un contexte mondial tourmenté. « Le contexte mondial est perturbé par un risque de retour vers une récession économique, de hausse des cours des matières premières, de la pression inflationniste et de la faiblesse des flux des investissement directs aux niveaux régional et mondial, ainsi que le défi de l'emploi », a rapporté l'agence officielle MAP, citant les propos du ministre. Au regard du jeu d'hypothèses, déjà entamé pour l'année en cours, le ministre semble trop optimiste. L'année 2012 n'est en fait qu'un prolongement naturel de 2011, qui a enregistré près de 6% de déficit budgétaire, caractérisé essentiellement par la forte domination des dépenses de compensation (45 milliards de dirhams). Dans le même ordre d'idées, le ministre prévoit également pour l'année prochaine un déficit de 4%. Chose qui paraît, aux yeux des observateurs, un peu « curieuse », du fait que les scénarios de prévision établis pour le projet de loi de finances 2012 laissent dégager un baril de pétrole à 100 dollars. Avec ce cours, ces projections risqueraient fort d'être revues à la baisse. Car, comme on le sait, un dollar de plus sur le marché international coûte pour le budget plus de 300 millions de dirhams. Toutefois, Mezouar défend ce niveau de déficit (4%) par le fait que le gouvernement est résolu à s'attaquer sérieusement à la problématique épineuse de la compensation, source de ce casse-tête budgétaire. « Le gouvernement compte mettre en place un fonds de solidarité sociale qui sera destiné aux populations vulnérables et portera sur trois volets : le soutien à l'éducation à travers le programme Tayssir, la santé à travers le RAMED (Régime d'assistance médicale) et la question des populations dans les zones montagneuses », détaille-t-il. Il aurait fallu donc attendre la nouvelle réforme constitutionnelle pour rectifier le tir et briser ce processus cumulatif de problèmes. Contacté par Le Soir échos, Mohamed Najib Boulif, économiste, nous confie que le projet de loi de Finances 2012 « manque d'innovation ». « C'est toujours les mêmes chiffres. Mise à part la question de la compensation, la caisse de retraite est une autre bombe dont personne ne parle : l'année 2012 annonce le début effectif du déficit de cette caisse », se désole-t-il. En regardant de près les grandes orientations du projet de la loi de finances 2012, il en ressort que le social l'emporte considérablement sur les deux volets économique et politique. Mais le financement de cette paix sociale ne se fera pas fait sans douleur, au grand dam de l'investissement public. Car les ressources budgétaires de l'Etat sont limitées et seules deux issues restent à emprunter : soit retrancher une part des dépenses d'investissement et de fonctionnement -chose d'ailleurs faite, soit se retourner vers le marché international pour lever des fonds. Se voulant plus rassurant, l'argentier du pays a ,semble-t-il, d'autres cordes à son arc. Il s'appuie essentiellement sur l'aide des institutions internationales annoncée samedi à Marseille lors de la réunion des ministres des Finances du G8. Cette aide qui pourrait atteindre les 80 milliards de dollars est adressée principalement aux économies touchées de plein fouet par les vent forts du Printemps arabe (Egypte, Maroc, Jordanie, Tunisie). Mezouar a déclaré également que l'investissement public «augmentera de 8 milliards de dirhams de plus afin de maintenir et soutenir la croissance », tout en tenant compte des pressions inflationnistes qui, selon lui, ne pèseront que de 2 % en 2012. Sauf que les projections de Bank Al -Maghreb, elles, tablent sur un taux de 2,8 %. Aux yeux de Boulif, le dossier chaud de l'emploi pèse lourdement sur la table du prochain gouvernement. « Les manifestations et les protestations continuent sur leur lancée », commente-t-il. Ce qui ne manquerait pas de fausser tous les calculs préétablis. Des calculs, selon le PJDiste, qui étonnent au niveau de la méthodologie: « Je trouve inconcevable de fixer les priorités d'un gouvernement qui n'est pas encore en place !».