Les projets de tramway au Maroc semblent pour tous être de bon augure et l'illustration d'une avancée certaine vers la modernité. Cela dit, le résultat final dépend largement du comportement, espéré civique, des citoyens. Le 18 mai 2011, les deux lignes de tramway de Rabat-Salé ont été officiellement inaugurées, avec en promesse, un changement dans la vie des citoyens et une amélioration du service public des transports de la capitale. Mais malgré des témoignages favorables, les inquiétudes demeurent quant à la capacité d'entretenir les rames du tram et de faire observer la marche à suivre aux éventuels utilisateurs, la volonté de bien faire n'excluant pas les risques d'accidents – avant même le lancement du tram – comme le montrent les photos publiées sur le site Infomédiaire… Dans la société marocaine, on se plaît à parler en termes de modernité et d'avancement technologique et on se réjouit bien évidement à l'idée que le Maroc puisse compter parmi les pays dits développés. « Le Maroc a construit en dix ans ce qu'il n'a pas fait en cinquante ans », fait remarquer un internaute sur le forum de discussion du site Yabiladi. Cela dit, il est nécessaire de ne pas brûler les étapes, car au final, un pays développé est d'abord un pays dont la population est largement épanouie et pour laquelle tous les aménagements structurels représentent une amélioration de la qualité de vie. Les réponses aux questions que suscite le tram de Rabat sauront anticiper certaines conduites et peut-être favoriser une campagne de sensibilisation. L'ambition d'intégrer de nouveaux modes de transport n'est pas à blâmer, mais peut-être faut-il prendre le temps de résoudre certains problèmes de base et trouver des réponses sensibilisantes à la question globale du civisme au Maroc, si on en croit un autre internaute s'exprimant sur un forum algérien, qui « espère que les citoyens prendront soin de ce tram et se montreront plus civiques ». Doit-on avoir quelque inquiétude au sujet de l'insertion du tramway à Casablanca ou se fier à l'exemple que représente Rabat qui, soit dit en passant, n'en a pas toujours donné la meilleure image ? La comparaison paraît légitime mais peut être contradictoire dans la mesure où Rabat est beaucoup plus petite que Casablanca et que les populations respectives diffèrent. Aussi, il serait de mauvaise foi de contredire le manque de discipline de la population casablancaise, surtout en comparaison à celle de la capitale. « Pour Rabat, on dira que les gens qui y vivent sont un peu plus civilisés », avance un participant du forum Yabiladi. Sur la page Facebook des « fans du premier tramway au Maroc », on peut lire des message de félicitations, comme des messages d'inquiétudes, toujours concernant le civisme de ses utilisateurs. Ainsi, Salma Talha Faridi «espère que les gens respecteront les règles du tramway comme aux Etats-Unis, en Europe ou à Dubaï, qu'ils ne lui lancent pas de pierres et/ou le salissent, parce que c'est tout à fait possible…» Parce qu'en effet, sans l'intériorisation des normes élémentaires qui doivent être inculquées à chacun dès le jeune âge, la compréhension de la notion du respect peut demeurer inaccessible, ce qui, sur le long terme, peut porter préjudice à n'importe quel projet aspirant à la modernité. A Casablanca, à en croire le mauvais entretien des transports en commun déjà en place, on pourrait croire qu'un tramway apporterait un nouveau souffle dans la gestion des flux de transport de la capitale économique mais il est impossible de prédire que les problèmes rencontrés avec les autobus ne seront pas d'actualité avec le tram. «Je vois déjà des sièges troués et des vitres cassées», prédit un autre internaute sur Yabiladi. Les aménagements faits pour la population utilisatrice du tram seront-ils suffisants à empêcher la casse ? D'après un étudiant marocain installé à Paris, le projet final peut aboutir à condition que les forces de l'ordre soient constamment mobilisées pour évaluer le comportement des utilisateurs (payer le ticket, vandalisme, sentiment d'insécurité), comme celui des conducteurs de tram (leur formation, leurs réflexes pour éviter l'accident), tout autant que celui des non-utilisateurs du tramway (respect des nouvelles contraintes par les cyclistes et automobilistes). Ainsi, toutes les interrogations que suscite la mise en place du tram de Rabat-Salé ne seront sûrement pas identiques à celles qu'on sera amenés à se poser pour Casablanca, mais leurs réponses sauront anticiper certaines conduites et peut-être favoriser une campagne de sensibilisation pour préparer les Casablancais à appréhender positivement la modernité.