Le nouveau président Alpha Condé semble décevoir les attentes placées en lui après son accès au pouvoir. Premier chef d'Etat démocratiquement élu de la Guinée, il est accusé par ses détracteurs de vouloir instaurer un régime arbitraire déguisé en démocratie. L'élection d'Alpha Condé à la tête de la Guinée en décembre 2010 était un signal fort pour la démocratie dans ce pays qui n'a connu que la dictature depuis son indépendance en 1958. Pendant un demi- siècle, la population guinéenne a vécu sous un régime militaire autoritaire qui a bafoué le respect des droits de l'Homme. Avec un sous-sol très riche en minerais, la Guinée reste à ce jour un pays pauvre. Le nouveau chef d'Etat, le premier démocratiquement élu de l'histoire de son pays, semble déjà s'écarter du droit chemin seulement après six mois de présidence. En dépit de ces promesses de changement et de démocratie, le nouvel homme fort de la Guinée est d'ores et déjà accusé par l'opinion publique de vouloir inscrire son mandat dans les sentiers battus. Autrement, Alpha Condé n'incarne plus l'esprit de rupture que tout le monde voyait en lui. Mais qu'est-ce qui a changé ? Force est de constater que depuis la tentative d'assassinat à laquelle le président guinéen avait échappée le 19 juillet, tout a changé dans le pays. Les arrestations se sont multipliées, l'opposition est désormais sur le qui-vive et la presse n'a plus le droit d'évoquer certains sujets de l'actualité nationale. Cellou Dalein Diallo, le leader de l'Union des Forces Démocratiques de Guinée UFDG et candidat malheureux à la dernière élection présidentielle, estime que le nouveau chef de l'Etat a troqué sa veste de démocrate contre celle de dictateur. «Il a dissous les conseils communaux dont les maires n'ont pas voulu lui apporter le soutien pendant la campagne du deuxième tour et il a installé en place des délégations spéciales composées de gens à sa dévotion», a-t-il dénoncé sur les ondes de RFI. «Nous avons aussi constaté la violation fréquente de la Constitution et des lois de la République», a ajouté le candidat malheureux. De même, la société civile et l'opposition dénoncent le fait que le nouveau chef de l'Etat se soit entouré de personnes majoritairement issues de son ethnie. Car cela n'a pas manqué d'exacerber les divisions sociales dans une société composée d'une multitude d'ethnies. Les détracteurs du président l'accusent également de vouloir museler la presse et l'opposition en vue d'instaurer la dictature qui n'a que duré dans ce pays d' Afrique occidentale. L'espoir placé en lui au début de son mandat semble s'estomper à petit feu. Nombre de Guinéens redoutent aujourd'hui que leur pays ne sombre de nouveau dans l'immobilisme. Toutefois, ils espèrent que la rencontre d' Alpha Condé à Washington avec le chef d'Etat américain Barack Obama le 29 juillet sur invitation spéciale de ce dernier donnera un coup d'accélérateur à ses «ambitions démocratiques» pour la Guinée dans la mesure où les élections législatives sont imminentes. Cette échéance électorale qui doit se tenir avant la fin de cette année va certainement changer la donne dans le pays mais à condition qu'elle se déroule dans les règles de l'art. Mais pour cela, il est primordial que le chef de l'Etat renoue vraiment le dialogue avec ses opposants en vue d'atténuer la tension sociale.