Le magnat de la presse Ruppert Murdoch est accablé par le gouvernement anglais. Un de ses journaux, Le News of the World, serait impliqué dans deux affaires d'écoutes téléphoniques et une autre de corruption de policier. Le feuilleton de l'été anglais a commencé. L'Angleterre vient d'ouvrir une nouvelle page de scandale lié à la presse. Cette fois, le Premier ministre britannique, David Cameron, a décidé de lancer plusieurs enquêtes parlementaires à l'encontre du magnat de la presse et multimilliardaire Rupper Murdoch, qui a pourtant grandement contribué à la victoire du Premier ministre en question, en finançant sa campagne. Le chef du gouvernement britannique a dû débattre, pendant trois heures, en urgence à la Chambre des communes, avant de décider d'ouvrir une enquête. «Il ne s'agit plus du piratage de téléphones d'hommes politiques et de célébrités, mais d'écoutes sur des victimes de meurtres et, potentiellement, des victimes de crimes terroristes », a condamné Cameron. «Ce qui s'est passé est absolument répugnant. Et je pense que tout le monde dans le pays est révolté par ce qu'on a appris». Mais ce n'est pas la première fois qu'un scandale d'écoutes téléphoniques implique le richissime magnat de la presse, qui risque aujourd'hui très gros, News of the World ayant déjà été condamné en 2007 pour avoir mis sur écoute des célébrités et proches de la famille royale. Mais ces deux scandales, accompagnés d'accusations de corruption, risquent de faire plonger le milliardaire australien dans une crise inédite. Certains de ses journalistes auraient en effet usé d'écoutes téléphoniques dans deux affaires criminelles, engendrant de fausses pistes pour les enquêteurs liés aux dossiers. Les journalistes du News of the World, édition dominicale du Sun tiré hebdomadairement à plus de 2,6 millions d'exemplaires, auraient piraté la messagerie téléphonique d'une jeune fille de 13 ans, peu après sa disparition en mars 2002. Ils avaient pu écouter et enregistrer les messages laissés par ses parents et ses amis. S'apercevant ensuite que la messagerie était saturée, les journalistes ont effacé et vidé la boîte vocale, afin de laisser la possibilité à d'autres proches d'en enregistrer de nouveaux. La police et la famille de Milly Dowler ont alors cru à une fugue, pensant qu'elle avait écouté puis effacé elle-même ses messages. Son corps fut retrouvé six mois plus tard. Son meurtrier a été condamné il y a deux semaines à la perpétuité. Dans la deuxième affaire impliquant le groupe Murdoch, des journalistes auraient aussi piraté les messageries téléphoniques des familles de victimes des attentats de Londres du 7 juillet 2005, qui ont fait 52 morts. Et pour couronner le tout, le plus haut responsable de la police nationale a annoncé hier avoir découvert que le quotidien achetait le silence ou les faveurs de certains policiers, pour pouvoir poursuivre ses opérations illégales. D'après l'un des enquêteurs vedettes de la BBC, des courriels envoyés par News of the World prouvent que plusieurs dizaines de milliers de livres sterling ont été versées pendant des années à des policiers en échange de scoops. Malgré les mots très durs utilisés par le Premier ministre britannique à l'encontre de News of the World, cette affaire plonge sa droite conservatrice dans une crise palpable, puisqu'elle est accusée par l'opposition d'avoir des relations trop étroites avec le groupe Murdoch, un des fleurons des médias anglais. De plus, le gouvernement est en train de donner son feu vert à la plus importante opération financière dans les médias de ces dernières années : le rachat de la totalité des actions du bouquet satellitaire Sky par News Corp, le groupe du magnat australien de la presse. «Dans un tel contexte, le Premier ministre doit réaliser que l'opinion publique ne comprendrait pas qu'un feu vert (à ce rachat) soit donné la semaine prochaine », a averti mercredi le chef du Labour, Ed Miliband. Pire encore pour David Cameron, l'un de ses anciens collaborateurs et très proches conseillers en communication, Andy Coulson, était directeur de la rédaction du News of the World à l'époque où les nouvelles écoutes auraient eu lieu. Ce dernier a été obligé de démissionner en janvier dernier, suite aux premiers rebondissements du scandale. Le feuilleton de l'été est définitivement lancé en Angleterre.