Une femme et son bébé décèdent lors de l'accouchement. Le mari parle d'erreur médicale et de négligence alors que la direction de l'hôpital se défend en expliquant que le décès de la femme a été provoqué par une hémorragie cérébrale. «Ma vie est brisée. J'ai perdu ma femme et mon bébé…ils étaient tous les deux en bonne santé. Ma femme était à son 9e mois de grossesse…nous étions heureux. Elle se portait bien et n'était pas malade… Mais, elle est décédée à cause de la négligence du personnel de l'hôpital. J'ai voulu fonder ma petite famille…et être heureux…mais…». Lehessen Ould Lehssen peine à trouver les mots pour décrire sa souffrance. Sa femme et son bébé ont perdu la vie la semaine dernière à l'Hôpital EL Hassani à Nador. Ce qui devrait être un événement heureux s'est transformé en drame. L'époux de la défunte engage la responsabilité de l'hôpital et l'accuse de négligence. « C'était le soir du jeudi 16 décembre. Ma femme m'a réveillé pour me dire qu'elle perdait du sang et qu'elle éprouvait de fortes douleurs. C'était les signes avant-coureurs de l'accouchement. Nous sommes alors partis à l'Hôpital El Hassani. Le gynécologue n'est pas en permanence. Deux infirmières l'ont examinée et m'ont dit que l'accouchement n'est pas imminent. Ils m'ont conseillé de la ramener à la maison et de revenir le lendemain matin. Or, ma femme souffrait. Elle criait de douleurs. Cela me déchirait le cœur mais je ne pouvais rien faire. Nous sommes repartis », raconte-t-il, la gorge serrée. Et de poursuivre : « L'état de santé de ma femme se détériore. Elle avait des convulsions. Nous sommes alors revenus à l'hôpital…Elle a été admise en réanimation. On attendait le médecin. Il n'est venu qu'à 7 heures du matin. C'était trop tard». La mauvaise nouvelle tombe. Ni le bébé ni la mère n'ont pu être sauvés. La douleur de Lehessen Ould Lehssen est grande et indicible. « C'est injuste ! L'hôpital est le responsable de la perte et de mon bébé et de ma femme », crie-t-il. Il décide alors de poursuivre l'hôpital en justice. Soutenu par l'Association Grand Rif des droits de l'Homme, il saisit le procureur général près le tribunal de première instance à Nador. Une plainte a été déposée le 20 décembre dernier pour demander l'ouverture d'une enquête sur les circonstances du décès de sa femme et de son bébé. « Les erreurs médicales sont légion dans l'Hôpital El Hassani. Nous recevons des plaintes de la population qui dit souffrir également de la négligence des responsables de cette structure sanitaire. Pour le cas de Lehessen Ould Lehessen, nous avons adressé une lettre au ministère de la Santé, au SGG et au gouverneur de Nador pour enquête. A noter qu'une autre femme est décédée, jeudi dernier, à ce même hôpital dans les mêmes conditions d'irresponsabilité, de négligence et de manque de professionnalisme», indique Saïd Chramti, le président de l'Association Grand Rif des droits de l'Homme. Cet acteur associatif dit déterminé à ne pas baisser les bras. «Nous allons également saisir l'Union européenne puisque l'hôpital a été bâti par le gouvernement marocain en partenariat avec l'UE. Le but était d'alléger la pression exercée sur l'hôpital de Mélilia. Toutefois, l'Hôpital EL Hassani ne remplit pas sa mission comme il se doit», menace-t-il. Que dit la direction de l'hôpital ? Contacté par Le Soir échos, le directeur de l'hôpital El Hassani de Nador, Noureddine Sebbar, rejette en bloc les accusations lancées contre son entité. « Il n'y a eu aucune négligence ni erreur médicale. Tout est enregistré. A 1 h 30 du matin du jeudi 16 décembre, le mari a amené sa femme à l'hôpital. Elle a été prise en charge par trois sages-femmes, qui lui ont conseillé de laisser sa femme passer la nuit à l'hôpital. Mais, le mari a préféré la ramener chez elle. Trois heures plus tard, il revient, sa femme était dans un état grave. Elle avait des convulsions et une hypertension artérielle », rétorque Dr Sebbar avant d'ajouter que « le gynécologue a été avisé rapidement. Une césarienne s'imposait. Toutefois, le bébé était mort. Une hémorragie interne a frappé tous les organes. La mère est décédée suite à une hémorragie cérébrale ». Selon l'Association Grand Rif pour les droits de l'Homme, le médecin de permanence et les sages-femmes devaient être entendus vendredi dernier par la Police judiciaire de Nador.