Le maire de Casablanca, Mohamed Sajid, a organisé hier matin, un point presse restreint, pour dresser un premier bilan des dégâts causés par les intempéries meurtrières des ces trois derniers jours. Pour Sajid, la priorité a été de «privilégier la protection de la population» avant de se «préoccuper des infrastructures». Comment envisager l'avenir de Casablanca face à ces changements climatiques «évidents» ? Le maire nous répond. En commençant son bilan dans la salle de réunion de la Wilaya, Mohamed Sajid annonce la couleur : «Nous avons connu dans la nuit de lundi à mardi une situation tout à fait exceptionnelle. Maroc Météo annonçait 176 mm de précipitations dans la région de Casablanca. En fait, entre 22h00 et 05h00 du matin, nous avons largement dépassé les 200 mm de pluie. Casablanca n'avait jamais connu cela auparavant». Il y a encore le souvenir des inondations de 1996. 2010 entre à son tour dans les annales. «La veille, nous avions mis en place une cellule de crise. Toute la région était concernée, pas uniquement Casablanca. Mohammedia, Bouznika, Ben Slimane, Settat, Berrechid, Dar Bouazza, toutes ces villes étaient alertées». Et d'ajouter : «Nous sommes heureux qu'il n'y ait pas eu plus de dégâts. Aujourd'hui (jeudi), la situation est relativement maîtrisée. Les réseaux commencent de nouveau à capter et à prendre le surplus d'eau qui a été stocké un peu partout». Le maire de Casablanca a tenu à dresser la liste des priorités des forces de secours au lendemain de la catastrophe. «Nous avons privilégié la protection de la population avant de nous préoccuper des infrastructures. Nous sommes immédiatement intervenus dans la zone de Lahraouiyine et de Hay Moulay Rachid, où il y a une concentration d'habitats non réglementaires qui sont démunis de réseaux d'assainissement. La priorité a été donnée à la protection des zones les plus exposées. Par la suite, nous avons commencé à dégager les grands axes de circulation». Les routes ont été quasiment toutes rétablies jeudi matin, grâce à la participation de «toutes les administrations. Tous les moyens dont nous disposons, tous les moyens dont disposent la Lydec et la Protection civile ont été de mise pour traiter les zones de perturbation les unes après les autres». Jeudi matin, tous les axes routiers et autoroutiers reprenaient quasi-normalement. Tous les efforts ont été fournis, selon le maire, pour que l'électricité soit rétablie dans la ville. Une population mécontente Le Soir échos était sur le terrain mardi matin, au lendemain de la catastrophe climatique. La population n'a eu de cesse d'incriminer la Lydec d'une part, et la passivité des élus, de l'autre. Nous avons demandé son avis au maire de Casablanca : «Vous savez, les élus d'une façon générale, ont traîné depuis toujours une image négative et pas uniquement à Casablanca. On a toujours considéré que l'élu était là pour amasser des voix aux élections pour profiter d'une situation et glaner des privilèges. Aujourd'hui, les choses sont en train de changer à Casablanca notamment. Personne ne peut contester qu'au niveau de la ville de Casablanca, il y a une évolution nette de la prise de conscience des élus de la nécessité de s'impliquer dans le développement. On ne fait pas notre travail dans un but électoraliste. Jamais en ce qui me concerne je n'ai considéré avoir été élu pour être réélu. Non. On a été élu pour des missions qu'on essaie de remplir le plus honnêtement du monde». Quel avenir pour la métropole ? Depuis quelques années nous ne pouvons que dresser le constat suivant : le Maroc est au cœur des changements climatiques. Une ville comme Casablanca n'a-t-elle pas montré ces limites en tant que mégapole d'avenir ? Les tramways vont-ils suffire pour assurer une bonne circulation urbaine ? Les projets d'infrastructures sont-ils adaptés à cette nouvelle donne ? Pour Mohamed Sajid : «Non ! Aujourd'hui ces changements climatiques sont une évidence, tant au Maroc que dans les autres pays. On commence à le vivre concrètement. Vous avez vu à Taroudant le niveau de précipitations colossal qu'il y a eu ? C'est du jamais vu dans toute l'histoire du Maroc. Il est évident qu'il y a un changement climatique abrupt qu'il faut intégrer dans les plans de développement de la ville et dans ses différentes planifications stratégiques. Casablanca est une métropole de 4 millions d'habitants. Elle n'a pas suffisamment maîtrisé son développement et son expansion lors des dernières décennies. Les 30 kilomètres de tramway que nous sommes en train de construire ne sont pas suffisants, les études de circulation qui ont été faites préconisent un réseau beaucoup plus important, avec 3 ou 4 lignes de tramway, une ligne à forte capacité, genre métro ou autre. Nous avons préconisé une liaison entre le nord de Casablanca (Nouasser) et le sud (Mohammédia) avec un système de transport ferroviaire genre RER. Son étude est en phase de finalisation. Nous sommes en train de boucler les budgets et les financements. Mais ce sont des infrastructures lourdes en termes d'investissements qui auraient dû être faits il y a plusieurs décennies. Vous pouvez aujourd'hui construire une mégapole en maîtrisant son processus depuis le début. Ce qui est le plus difficile, c'est d'essayer de restructurer ce qui a été fait de façon anarchique, non étudiée et non maîtrisée depuis de nombreuses années».