Tout le monde s'attendait à ce que les résultats du dialogue social satisfassent les principales revendications des syndicats, et c'est finalement ce qui s'est produit. Le gouvernement de Abbas El Fassi veut marquer encore des points dans son bilan social avec les syndicats et procède à la deuxième hausse du SMIG, après celle décidée en 2008, durant le même mois d'avril. Les nouvelles hausses sont plus conséquentes, cette fois-ci, et concernent une hausse de 15% des salaires les plus bas à partir du mois de juillet 2011 et se feront en deux tranches. La solution adoptée par les parties prenantes au dialogue social n'a pas été facile à prendre d'un point de vue strictement budgétaire, ce qui a fait dire au secrétaire général de la Fédération démocratique du travail (FDT), Abderrahmane Azzouzi, que «les résultats du dialogue social pourraient satisfaire les uns et décevoir les autres, car ils n'ont pas répondu à toutes les aspirations». L'allusion faite par ce responsable syndical tempère l'euphorie exprimée par le gouvernement au lendemain de l'annonce de ces hausses. Pour leur part, les autres responsables syndicaux semblent être convaincus des retombées de ces hausses sur le pouvoir d'achat des salariés. C'est le cas de l'UMT, Miloudi Moukharik préférant juger le côté «positif de l'accord trouvé dans le cadre de ce round difficile du dialogue social», au lendemain de la fin de la session du printemps du dialogue social. Concrètement, les fonctionnaires du secteur public ont été les mieux lotis durant ce round avec un cadeau du 1e mai composé d'une hausse immédiate de 600 DH nets des salaires des fonctionnaires des services administratifs, des communes et des entreprises publiques à caractère commercial. Les syndicats ont aussi obtenu gain de cause pour le dossier des retraités du secteur public qui toucheront une pension minimale de 1.000 DH, soit une augmentation de 400 DH nets. D'autres demandes à caractère qualitatif et relatives à l'évolution de la carrière des fonctionnaires ont également été satisfaites, essentiellement celle du quota de promotion interne qui est passé de 28% à 33%. Un effet rétroactif de cette augmentation a été accordé par le gouvernement et ajoutera deux points à l'échelle de la promotion à partir du mois de janvier 2011. Les trois points restants seront réglés à partir de janvier 2012. Pour le privé, quatre secteurs ont obtenu la revalorisation du SMIG, à côté de celui des services. Il s'agit notamment des secteurs industriel, commercial, agricole et forestier qui ont eu droit à 15% de hausse. La revalorisation du SMIG sera applicable à partir de juillet 2011 à hauteur de 10%, tandis que les 5% restants ne seront comptabilisés que durant le mois de juillet 2012. Un échelonnement qui donne satisfaction au patronat, qui était pour une revalorisation graduelle. Les syndicats ont également pu avoir des concessions à propos de l'accès au logement social pour les salariés du secteur privé à revenu limité. Une demande qui a été réconfortée par le nouveau souffle donné au programme de logement social pour les ménages à revenu limité qui a apporté une série de garanties étatiques pour l'accès au logement. Des revendications sectorielles ont également été satisfaites durant cette session du printemps du dialogue social, et concernent la couverture sociale des professionnels des secteurs du transport et de la pêche artisanale. Il s'agira d'une révision proposée par l'USFP dans le cadre d'un projet de loi qui est déjà dans le circuit parlementaire et qui tend à trouver une solution pour les assurés ne disposant pas de 3.240 jours déclarés. Pour leur part, les professionnels du transport titulaires de la carte professionnelle ainsi que les salariés de la pêche artisanale vont bénéficier de la couverture sociale en vertu de la nouvelle entente trouvée entre les partenaires sociaux. Les résultats du dialogue ont coûté jusqu'à présent au gouvernement plus de 30 MMDH, rien que pour l'augmentation des salaires pour le secteur public, alors que l'enveloppe réservée à la promotion exceptionnelle avoisine les 16 MMDH. Aucune estimation n'a été faite des montants qui vont être affectés pour que le gouvernement puisse honorer ses engagements. Le Conseil de la négociation collective exhumé La réactivation du Conseil national de la convention collective fait partie des mesures qui sont passées inaperçues durant cette session du dialogue social, face à la pression exercée par les demandes relatives aux salaires. Les parties ont décidé de tenir une réunion du Conseil de la négociation collective, mardi 3 mai prochain, pour la mise en place «d'une programmation temporaire de la conclusion des conventions du travail collectives au niveau des secteurs et entreprises qualifiés», comme le souligne le texte de l'accord. Durant l'année 2010, cinq conventions collectives ont été signées au niveau national, ce qui a alarmé les partenaires sociaux qui doivent absolument réagir pour mettre un terme à l'inertie de ce Conseil. Les négociations collectives, qui doivent d'abord servir à maintenir la paix sociale et réduire le taux des désœuvrements collectifs, vont éluder la question de la présence des comités d'hygiène et de sécurité au travail obligatoires au sein des entreprises. Le gouvernement a, par ailleurs, préparé un nouveau projet de loi sur la création du service social du travail au sein de l'entreprise. Un nouveau service qui coïncide avec les préparatifs de la CGEM de mettre en place un nouveau système de responsabilité sociale du tissu productif. Le volet législatif va accaparer l'attention durant la prochaine étape du dialogue social. Abbas El Fassi a promis dans ce cadre de poursuivre les chantiers déjà entamés et qui concernent d'abord le projet de lois relatif à l'allocation pour perte d'emploi, ainsi que des nouvelles lois organisant les syndicats et le droit de la grève dont le premier ministre va enfin signer le décret d'application une fois es concertations achevées avec les centrales syndicales.