En politique, trop de patience peut être considéré comme une faiblesse, alors que l'opportunisme s'avère souvent comme une qualité. Tout est question de bon dosage. Salaheddine Mezouar, président du RNI, présente toutes les caractéristiques d'un homme politique qui veut aller vite, voire trop vite. Profiter d'une conjoncture très favorable pour mener des ruptures profondes, voilà ce qu'il tente de réaliser au sein du Rassemblement des indépendants. Sa première grande bataille, qui l'a propulsé à la tête du parti lui a donné des ailes et lui a ouvert des horizons insoupçonnables. Et comme on dit, l'appétit vient en mangeant. Finie donc, l'ère de l'apprentissage. Mezouar veut marquer son territoire et surtout sortir le grand jeu. À la manière d'un Premier ministre, diront certains. Vive la communication ! D'autant que l'environnement s'y prête, pour ne citer que les marches pacifiques des jeunes appelant à des réformes politiques, socioéconomiques... et le dernier discours du Souverain, annonçant le projet de refonte de la Constitution. Comment donc marquer des ruptures au sein d'un parti où les résistances ont toujours la peau dure ? La communication, pour commencer. Ces dernières semaines, les équipes RP de Mezouar ont bien retroussé leurs manches. Elles ont concocté toute une campagne pour donner du crédit à ces grandes annonces vis-à-vis de l'opinion publique. La semaine écoulée, le président du RNI nous a gavé d'interviews pour expliquer et réexpliquer son projet de réforme. Le fait qu'il prenne l'initiative d'avancer la date du prochain congrès et de l'annoncer sur les colonnes de la presse sans consulter les organes du parti n'a pas fait que des heureux au sein de cette formation politique. Cela en dit long sur le malaise ambiant au sein de ce parti qui siège au gouvernement. Pour un électrochoc, on peut dire que Mezouar a bien réussi son coup. On doute bien qu'il s'est concerté, auparavant, avec ses amis au sein du groupe réformateur du RNI, avant de lancer sa campagne. Interrogés, des membres du parti ne semblent pas être convaincus par le bien-fondé de la démarche de Mezouar. «Ses sorties publiques ne donnent pas encore d'idée claire sur le fin fond de son projet de réforme. Bref, c'est de la littérature plus qu'autre chose», confient-ils. En tout cas, le patron du RNI cherche à créer une nouvelle dynamique en profitant au maximum des nouvelles donnes politiques. Pour l'heure, on ne palpe pas encore la nature de son projet. En fin homme politique, il ne dévoile pas toutes ses cartes. Dans son entourage proche, on avance qu'il a l'ambition de reconfigurer le parti, afin qu'il soit en phase avec l'évolution de la société marocaine. Un grand challenge qui ne fait pas peur à Mezouar. Pour des observateurs avisés du paysage politique, la carrière du président du RNI ne fait que commencer. Il a de nombreux atouts qui font de lui un candidat très sérieux à la Primature. Tout dépendra maintenant de l'issue du prochain congrès du parti. Quant aux alliances futures, Mezouar évoque surtout l'Union constitutionnelle. Il reste attaché à ses «amis» politiques, même si certains font aujourd'hui l'objet de critiques virulentes de la part de la rue marocaine. «C'est maintenant ou jamais !» : Mbarka Bouaïda, Membre du Conseil national du RNI. Les Echos quotidien : Salaheddine Mezouar a pris tout le monde de cours en avançant la date du prochain congrès du RNI. Est-ce une tentative de débloquer une situation de malaise au sein du parti? Mbarka Bouaïda : Oui... le RNI vit une situation de blocage. Dans la configuration actuelle, on ne peut plus avancer. Le bureau politique fait preuve de beaucoup de résistance et n'adhère pas aux différentes actions réformatrices. Le RNI a besoin de changement sinon il risque de s'isoler. Il faut donc aller vite. Quels sont les enjeux du prochain congrès? Le RNI est un parti dynamique, mais qui n'a pas encore trouvé son chemin. Pour moi, le prochain congrès constitue une chance historique pour franchir un cap décisif dans la vie du parti. Et c'est maintenant ou jamais ! Si le RNI rate ce rendez-vous, il le paiera très cher. Les marches du Mouvement du 20 février, le discours royal du 9 mars... aujourd'hui, les partis sont dos au mur. Sont-ils à la hauteur des nouvelles échéances? Le plus grave dysfonctionnement dont souffrent les partis, c'est la lenteur dans la réaction et l'action. Plus que jamais, la scène politique marocaine a besoin de cohérence. C'est là une grande équation qui ne peut être résolue que par les regroupements et dépasser les débats politico-politiciens. Il nous faut plus de transparence et des programmes politiques qui répondent aux besoins réels. Bien avant, un chantier primordial doit être mené à savoir la réforme de la loi sur les partis. Vous êtes considérée comme la coqueluche du RNI. Avez-vous déjà pensé à changer de couleur politique? Je crois au RNI et à son avenir. J'ai pris la décision de me consacrer entièrement à la politique et pour l'heure, je ne m'ennuie pas. J'essaie d'apporter ma contribution dans les réflexions sur des chantiers qui me tiennent à cœur, pour ne citer que la promotion de l'emploi et la création d'entreprises. Pour répondre à votre question, je ne vois pas d'autres partis qui pourraient m'intéresser. PAM, PJD, USFP, Istiqlal, USFP, PPS... qu'en pensez-vous? Le PAM, on pouvait l'éviter. Quant au PJD, il m'a déçu dans la mesure où son projet n'est pas clair. Pour ce qui est de l'Istiqlal, l'USFP et le PPS, je dirais qu'ils n'ont pas d'actualité. Vous dites qu'il faut exercer la politique comme un métier... C'est ma conception de la politique. Bien évidemment, il faut un sens de l'engagement et pour ma part je n'ai pas d'enjeux particuliers en exerçant la politique. Les partis marocains ont besoin de management et de profils spécialisés dans plusieurs domaines. Je crois que dans la politique, il faut aussi se spécialiser en s'attaquant à des domaines précis. L'objectif étant d'être plus efficace. Allez-vous vous représenter aux prochaines élections? A vrai dire, je ne me suis encore décidée.