Lundi matin, le HCP a livré les résultats de l'Enquête nationale démographique 2009-2010. Cette étude entend apporter les réponses aux insuffisances du recensement national en matière d'évaluation du mouvement naturel de la population, car quoiqu'exhaustifs, les recensements n'ont pas vocation à recueillir des informations spécifiques, telles que la mortalité et sa structure par âge et par sexe. Réalisée en trois étapes, sur un échantillon global de 105.000 ménages représentatifs de l'ensemble de la population, ladite enquête a permis de dégager des données relatives à la nuptialité, la natalité, la mortalité, les grossesses et avortements, ainsi qu'aux mouvements migratoires à l'intérieur et hors du pays. «La disponibilité de ces indicateurs est fondamentale, pour asseoir sur des bases solides toute planificatin, qu'elle soit globale ou sectorielle, aussi bien au niveau national et local qu'au niveau des entreprises et ménages», explique Ahmed Lahlimi, Haut commissaire au Plan. Selon lui, «Ces données sont des révélateurs significatifs de l'évolution des mentalités et des comportements de la population et fournissent un éclairage sur les tendances lourdes qui comptent parmi les facteurs déterminants des mutations futures de l'économie et de la société avec leurs implications sociétales et politiques». La nouveauté de l'enquête est qu'elle fournit, pour la première fois depuis l'enquête initiale réalisée en 1986, des tables de mortalité par sexe et milieu de résidence, basées sur des données directement observées. Cela ne sera pas sans utilité pour les compagnies d'assurances, les caisses de retraite et tous les organismes de prévoyance sociale. Enseignements «À sa naissance, un Marocain espérait vivre en moyenne 47 ans en 1962. Aujourd'hui, un demi-siècle plus tard, son espérance de vie est portée à 74,8 ans», explique Lahlimi. Ce gain de 28 ans est le résultat de la baisse de la mortalité des différentes catégories d'âge. Lahlimi n'a pas oublié de rappeler que si la mortalité a relativement baissé, c'est grâce à l'amélioration des conditions sanitaires et du niveau de vie de la population. Cela dit, le taux de mortalité reste relativement élevé au Maroc, mais la mortalité infantile et maternelle sont sur une pente descendante. En 1962, ce taux était de 149 pour mille habitants, actuellement il est de 30 pour mille. L'autre résultat phare de l'enquête est l'étude des transformations de la conjugalité. «En 50 ans, l'âge au premier mariage a énormément reculé. En 2010, les femmes se sont mariées en moyenne à l'âge de 26,6 ans et les hommes à 31,4 ans. Par rapport à 1960, les femmes ont enregistré 9,3 ans de retard, et les hommes 7,5 ans», détaille l'enquête. Par conséquent, 9 sur 10 femmes âgées de 15 à 19 ans sont encore célibataires actuellement. L'étude souligne aussi la baisse du nombre de femmes s'étant mariées en deçà de l'âge légal. Elles se chiffreraient actuellement à quelque 30.000 femmes. Quant aux femmes âgées entre 20 et 24 ans, 61,4% d'entre elles sont encore célibataires. Ce taux baisse en allant vers le haut de la pyramide des âges, 28% des femmes âgées entre 30 et 34 ans sont célibataires. Selon le HCP, la prolongation du célibat concerne aussi bien les femmes que les hommes, et il en déduit que le mariage par choix individuel, pour des raisons économiques ou migratoires est de moins en moins universel, «le nombre de célibataires à 50 ans d'âge le prouve. Il a été multiplié par 2 pour les hommes et par 7 pour les femmes». L'endogamie ou le mariage au sein de la tribu ou dans le cadre des traditions patriarcales a enregistré une baisse de 33% en 1987 à 29,3% en 1995. En 2010, elle a atteint le taux de 21%. «Cette baisse s'explique principalement par celle des mariages avec des parents éloignés». Les conséquences de cette baisse sont positives, souligne le HCP, car la baisse de l'endogamie a permis un recul du taux de divorce. «Dans les années 1960, le tiers des ménages se terminaient par un divorce. Ce taux a été ramené à 15% en 1995, et a baissé pour s'établir à 10,5% actuellement», explique l'étude. O.R Méthodologie du HCP L'enquête a porté sur un échantillon de 105.000 ménages représentatifs de la population marocaine, et a été menée en trois phases espacées de 6 mois, entre 2009 et 2010. Les interviews du premier passage ont voulu dresser l'état de la population, ses caractéristiques démographiques et socio-économiques, ainsi que ses conditions d'habitat. Les deux autres ont permis d'enregistrer et de suivre les évènements démographiques de ces ménages au cours de l'année. Les tables récoltées seront par la suite utilisées dans un modèle calculable d'équilibre général à générations imbriquées, le but étant d'évaluer l'impact du vieillisement de la population sur la soutenabilité des systèmes de retraite à long terme. 12.500 ménages seront d'ailleurs l'objet d'une sous-enquête, dans le but de maîtriser, pour la première fois, les données nutritionnelles de la population, d'établir une cartographie de la malnutrition au Maroc, de l'état nutritionnel des enfants, des adolescents et des adultes.