Présidente de l'Association des régions du Maroc À travers cette interview, Mbarka Bouaida, présidente de l'Association des régions du Maroc, revient sur la régionalisation avancée et le développement économique du Royaume qui passe inévitablement par la valorisation du monde rural et la libération de son potentiel agricole. La régionalisation avancée, avec le transfert de compétences et de moyens aux régions, a-t-elle favorisé un développement plus adapté et plus efficace des zones rurales ? La régionalisation avancée repose sur les principes énoncés dans la Constitution de 2011. Elle s'inscrit dans une démarche de gouvernance décentralisée visant à mettre en œuvre des politiques adaptées aux spécificités socio-économiques de chaque région. La loi organique 111-14 de 2016 a réaffirmé la prééminence des régions dans le développement local et leur confère une certaine autonomie dans la réalisation de leurs objectifs de développement, notamment par le biais des Plans de développement régionaux (PDR), pour répondre, entre autres, aux défis de durabilité et de résilience des zones rurales. Les régions sont ainsi appelées à exercer leurs compétences sur le plan économique, tout en veillant à réduire les disparités entre les zones urbaines et les zones rurales. Elles prévoient, dans leur planification stratégique, des dispositifs de soutien aux secteurs à fort potentiel comme l'agriculture, en promouvant l'investissement et la formation, et ce, pour garantir des opportunités d'emplois en faveur des populations locales, tant urbaines que rurales. Le développement économique du Maroc passe inévitablement par la valorisation du potentiel rural qui représente plus de 40% de la population et une part importante de l'activité économique nationale. Quels sont, selon vous, les principaux défis auxquels sont confrontées les régions rurales en termes de développement économique et social ? La promotion d'un développement inclusif et équilibré demeure un défi de taille pour notre pays. Afin d'atteindre cet objectif, l'implication des acteurs locaux ainsi que la mise en convergence des politiques publiques à l'échelle territoriale revêtent une importance capitale pour assurer une appropriation optimale des enjeux de développement dans les zones rurales. Cela permet de créer une synergie entre les divers secteurs, facilitant ainsi l'accès aux services essentiels tels que l'éducation, la santé et l'approvisionnement en eau potable ou encore le désenclavement, et ce, pour leur permettre de s'ouvrir à de nouvelles opportunités économiques. Il est également primordial de mettre en place des mesures d'adaptation, telles que l'optimisation des techniques agricoles, la diversification des cultures et la gestion durable des ressources en eau afin de renforcer la résilience des territoires ruraux face aux aléas climatiques. Quelles sont, selon vous, les principales filières économiques à développer en priorité dans les régions rurales ? L'agriculture et ses dérivés, comme l'agro-industrie, présentent un potentiel économique significatif pour ériger les régions en véritables pôles de compétitivité, pourvoyeurs d'emplois dans des filières agricoles offrant une meilleure insertion des acteurs ruraux dans des chaînes commerciales nationales et internationales. Le rôle des régions en matière de coordination des politiques à l'échelle locale offre les conditions propices pour promouvoir des initiatives visant une agriculture durable et moderne et permettant le développement d'activités génératrices de revenus pour les populations rurales, en particulier les femmes et les jeunes. Au-delà de l'agriculture, qui a perdu des emplois en raison de la succession des années de sécheresse, quels sont les secteurs ou les activités émergentes qui pourraient dynamiser l'économie rurale et créer des emplois ? L'économie rurale met en avant des valeurs essentielles telles que la solidarité, la durabilité et l'inclusion sociale. Nous retrouvons ces mêmes valeurs dans les principes de l'économie sociale et solidaire (ESS). Celle-ci se distingue par sa capacité à établir des modèles économiques alternatifs, plus justes et équitables, et valorisant des ressources locales, qu'elles soient agricoles, artisanales ou culturelles. En considérant les zones rurales comme des vecteurs de promotion de l'identité locale, l'ESS constitue donc une occasion de créer de nouvelles dynamiques économiques et de diversifier les sources de revenus dans des domaines comme l'agritourisme, l'artisanat local ou la valorisation de la transformation de produits. Yassine Saber / Les Inspirations ECO