«Vous décidez de ce que vous voulez voir!». Il ne s'agit pas là d'un concept de zapping télévisé, mais d'une idée de création qui germe en ce moment même dans les dédales de Casablanca. Un projet embryonnaire qui devrait être annoncé au public dans les prochains jours, à l'initiative de deux jeunes artistes chorégraphes Younès et Zouheir Atbane. Baptisé «Dièse» (#), le projet de création tangue entre la performance et l'art chorégraphique. «Pour le moment, il est difficile de définir à quoi aboutira ce projet. Mais s'il fallait le classer, il compterait dans la catégorie des nouvelles formes de présentation de spectacles vivants», explique Zouheir Atbane. Une définition pas encore précise, car le concept de «Dièse» est totalement novateur. Tout au moins au Maroc. D'après ses initiateurs le projet «sera construit à partir des idées de deux artistes, et du public aussi». Un public qui intervient donc dans une création avant même de la voir. Le pari semble risqué, mais les frères Atbane y tiennent pourtant. Du Kennedy Center, à Washington, au public du théâtre Hassan Skalli de Sidi Bernoussi à Casablanca, tantôt applaudis et tantôt hués, leur expérience de danseurs contemporains leur a fait rencontrer des publics totalement différents. Une différence qui les aura incités à se poser plus d'une question. Comment un public juge-t-il un spectacle qu'il n'a pas choisi de voir ? Quelle relation lie l'artiste contemporain à son public ? S'il avait le choix, que voudrait voir le public ? «Dièse» est donc né de cette volonté de Younès et Zouheir Atbane de créer un lien avec leurs premiers spectateurs. «D'habitude, les personnes qui assistent à l'un de nos spectacles nous jugent en tant qu'artistes à partir du travail qu'ils voient sur scène. Dans ce projet nous leur donnons l'occasion de décider de ce qu'ils veulent voir». Jeux de paroles et de pouvoirs Quatre mois durant, les futurs spectateurs pourront, ainsi, envoyer leurs idées et leurs propositions, sous forme de texto aux deux artistes qui construiront une première ébauche du spectacle. Le jour J, c'est devant leurs yeux que la proposition deviendra «création». Une interaction qui se poursuivra aussi pendant que les jeunes chorégraphes seront sur scène. «Un système de réception instantané sera mis en place pour que l'on puisse réagir en temps réel» explique Zouheir Atbane. Sujets d'un public anonyme qui leur transmettra ses idées, le duo se positionne aussi comme décideurs définitifs. «Un sorte de démocratie artistique» ironise Zouheir. Une création artistique qui reste à ce titre totalement engagée.