Le comité de coordination sur les prisons, qui regroupe neuf organisations des droits de l'homme, dont l'AMDH, le FMVJ et l'Observatoire marocain des prisons, a appelé, mardi, à revoir la relation de la Délégation générale des prisons avec le ministère de la Justice, instaurée par décret du 16 mai 2008. Selon un rapport de la coordination, rendu public mardi, la situation des prisons au Maroc est alarmante et nécessite une intervention urgente des pouvoirs publics. Le rapport dresse un tableau sombre de l'état des lieux des prisons, sur la surpopulation carcérale et sur toutes sortes de délinquances qui sévissent à l'intérieur des prisons. Aussi, les ONG ont-elles relevé dans leur rapport l'absence de règles de conduite de certains fonctionnaires de prison, l'absence de mécanismes indépendants de l'administration pour les décisions punitives et le gel de l'action des commissions régionales de contrôle des prisons, instaurée par l'article 620 et 621 du code pénal. Selon ce même rapport, les grèves de la faim dans les rangs des détenus sont devenues coutumières. Rééduquer ou exclure ? À la prison de Souk El Arbaâ du Gharb, plus de 1.400 détenus avaient entamé une grève de la faim pour protester contre les conditions de détention. Selon Abdelilah Benabdessalam, membre de la coordination des prisons, «ce rapport est une réponse au refus de la Délégation générale de l'administration pénitentiaire d'ouvrir un dialogue avec les ONG». La coordination avait envoyé, le 30 décembre dernier, une lettre au Premier ministre, dont la délégation générale de l'Administration pénitentiaire est sous la tutelle, pour attirer son attention sur «les conditions désastreuses dans les prisons et sur l'état critique des grévistes de la faim, parmi les salafistes de Oukacha». Selon Nadia Laghrissi, vice-présidente du Centre des droits des gens : «Le délégué général de l'Administration pénitentiaire, par son attitude, refuse de travailler avec les ONG. Il transforme ainsi les prisons en des dépendances des centres de sécurité». Les ONG ont appelé aussi à une conférence nationale sur les prisons au Maroc, pour qu'elles soient des lieux de rééducation et non de marginalisation et d'exclusion des détenus. L'initiative des ONG intervient après que les détenus salafistes dans les prisons marocaines aient entamé une grève de la faim depuis le 24 novembre dernier. Selon une source proche de ces détenus : «la grève a été suspendue lundi après que l'administration ait accepté les demandes des salafistes». Etat de lieux La situation dans les prisons au Maroc est caractérisée par un «surpeuplement et de difficiles conditions d'incarcération». Le constat émane de l'Observatoire marocain des prisons (OMP). Le Secrétaire général de cette ONG, Me Abderrahim Jamaï, avait déclaré, lors de la dernière conférence de l'Observatoire juin dernier, que «le surpeuplement des prisons où sont détenus quelque 90.000 personnes s'est aggravé à la suite les attentats du 16 mai 2003 à Casablanca». Selon Me Jamaï, Outre la surpopulation carcérale, le régime pénitentiaire est marqué par un «excès sécuritaire» et une négligence vis-à-vis des droits de l'Homme. Pour lui, la corruption dans les prisons ainsi que le manque de formation des surveillants en matière des droits de l'Homme, pénalisent le bon fonctionnement de ces structures censées être dédiées à la rééducation et à la réinsertion des détenus. Pour la simple comparaison, il existe en France 60 000 prisonniers pour quelque 60 millions d'habitants. Au Maroc, le chiffre de 90 000 révélé par l'Observatoire des prisons correspondant officiellement à 30 millions.