Les laboratoires de biologie médicale voient leur monopole sur le dépistage de la Covid-19 protégé. Selon la tutelle, le dépistage, qu'il soit de biologie moléculaire, antigénique ou sérologique doit être fait par les laboratoires de biologie médicale. Toutefois, le ministre de la Santé donne la latitude aux autorités sanitaires régionales d'autoriser les cliniques et les cabinets médicaux à effectuer les tests antigéniques ou sérologiques rapides, si la situation épidémiologique l'exige ou si l'offre de laboratoire publique et privée s'avère limitée. Les lignes bougent sur le dossier des tests de dépistage et de diagnostic de l'infection par la Covid-19. A travers la décision n°13201, le ministère de la Santé tranche sur le sujet relatif aux tests de dépistage et de diagnostic de l'infection par le SARS-CoV-2. En substance, la décision prise le 23 août exclut les pharmacies d'officine du lot de structures habilitées à réaliser des tests antigéniques rapides. Dans l'article premier de ladite décision, il est indiqué que « les laboratoires de biologie médicale, des secteurs public et privé, peuvent, à partir de la date de diffusion de cette décision, réaliser tout type d'examens biologiques de dépistage et de diagnostic de l'infection par le SARS-CoV-2, qu'ils soient de biologie moléculaire, antigéniques ou sérologiques, conformément au cahier des charges (version 3 du 19 août 2021) ». Si la situation épidémiologique l'exige ou si l'offre de laboratoire publique et privée est limitée, le ministre de la Santé donne par ailleurs la latitude aux autorités sanitaires régionales d'autoriser les cliniques et les cabinets médicaux à effectuer les tests antigéniques ou sérologiques rapides. Pour cela, toutefois, il va falloir se conformer au cahier des charges établi par la tutelle à cet effet. L'enjeu derrière les décisions du ministère de la Santé est de garantir la qualité et la fiabilité des analyses et tests de dépistage et de diagnostic de l'infection par le SARS-CoV-2. Pour garder la main, « seuls les tests de dépistage et de diagnostic enregistrés et autorisés par le ministère, conformément au circuit légal de fabrication, d'importation, de distribution et de vente, doivent être utilisés». Gigalab vs laboratoires biologiques : Où en est le bras de fer ? Selon une source proche du dossier, Karim Zaher, dirigeant de Gigalab, pris part, lundi 23 août, à une réunion tenue au ministère de la Santé. Pour l'heure, rien ne filtre sur le contenu de cette rencontre dont les échos nous font état d'échanges houleux. Toutefois, le laboratoire s'est vu retirer le certificat d'enregistrement de son test salivaire le même jour, soit environ trois mois après son obtention. Dans sa décision, le ministère de la Santé a appelé le laboratoire à « retirer sans délai le produit Gigalab Covid 19 Ag Gold Salive » du marché, et l'a appelle à « informer tous les professionnels de la santé de la suspension du certificat d'enregistrement dudit réactif ». De son côté, Gigalab qui dit avoir lancé un investissement à Agadir pour la construction d'une usine destinée à la fabrication des tests fondait beaucoup d'espoir en des lendemains meilleurs de cette rencontre avec la tutelle. La décision ministérielle met un terme à la polémique née après l'opposition des biologistes à la vente de ces tests en pharmacie. Cependant, plusieurs paramètres entourent cette décision de suspension du réactif. Lesquels ? Il nous revient que Gigalab s'était engagée à attendre l'autorisation de mise sur le marché du comité technique et scientifique avant la commercialisation de son test. Ce qui n'a eu lieu. Ces tests auraient été commercialisés, sur la base du certificat d'enregistrement qui accordé par la tutelle. Rappelons qu'il y a quelques semaines de cela, les tests salivaires antigéniques rapides du laboratoire marocain ont été mis en vente en pharmacie pendant quelques jours. Le 15 juillet, l'Association des biologistes marocains s'opposait à leur commercialisation, prétendant que le prélèvement de salive constitue un «acte médical». Cette mention change la donne. En effet, tant que les tests rapides ne sont pas considérés comme un acte médical, tout citoyen peut les effectuer lui-même sans avoir besoin de formation professionnelle, à l'instar de ce qui se fait dans des pays comme la France, la Corée, le Japon et l'Allemagne, qui ont rendu le test salivaire rapide disponible dans les pharmacies, aux fins de faciliter le dépistage massif. Toutefois, vu les prix auxquels ils allaient être écoulés (100 DH en pharmacie, ventilé entre 70 DH hors TVA à l'achat et 10 DH de marge du pharmacien + TVA 20%, soit 20 DH), ces tests allaient surtout leur opposer une concurrence agressive, par comparaison au prix des tests PCR. Suite à la montée au créneau des biologistes, le ministère de tutelle a fait retirer les tests de la vente en pharmacies, indiquant dans la note de retrait la nécessité de vérifications complémentaires. Peu de temps après, des tests Gigalab ont à nouveau été disponibles chez des médecins, mais cette fois-ci à 300 DH (hors honoraires). Depuis, ces tests salivaires antigéniques rapides, fruit d'un transfert de technologie entre une société coréenne de renommée mondiale et le laboratoire marocain, ont inondé les plateformes de vente en ligne ou en ventes directes via des réseaux sociaux. Face à ce qui précède, les autorités ont considéré que par cette pratique, Gigalab a outrepassé l'autorisation qui lui a été octroyée et a enfreint les dispositions de l'état d'urgence sanitaire. Modeste Kouamé / Les Inspirations ECO