Le projet de loi 33.21 modifiant et complétant la loi 131.13 relative à l'exercice de la médecine vient d'être transféré à la Chambre des conseillers après avoir été adopté à l'unanimité, sans aucun amendement, par les députés. On s'attend au même scénario au sein de la Chambre haute. Contrairement aux attentes, le projet de loi 33.21 modifiant et complétant la loi 131.13 relative à l'exercice de la médecine qui facilite les conditions d'accès au Maroc aux médecins étrangers vient de franchir le cap de la Chambre des représentants, comme une lettre à la poste, sans aucun amendement. Pourtant, lors de l'examen du texte au sein de la commission des secteurs sociaux, les députés ont affiché leur détermination à l'amender. Ils ont même créée une sous-commission pour plancher sur les propositions d'amendement qui s'est réunie une seule fois. Ils ont finalement décidé de ne présenter aucun amendement au texte suite à l'engagement du gouvernement de prendre en compte leurs observations dans le cadre de d'autres projets de loi en cours de préparation. Il s'agit notamment de la loi-cadre 34-09 relative au système de santé et à l'offre de soins et du projet de loi portant sur la mise en place d'un statut spécial pour les fonctionnaires du secteur de la santé. Le ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb s'est engagé à soumettre ces textes bientôt à l'institution législative. Ces projets de loi s'inscrivent dans le cadre du grand chantier de la protection sociale et ont un caractère urgent. S'ils sont soumis au parlement avant la clôture de la session qui tire vers sa fin, les parlementaires, qui seront contraints de passer à la vitesse supérieure, n'auront pas assez de temps pour les examiner minutieusement et les marquer de leur empreinte. Tout comme le projet de loi relative à l'exercice de la médecine, on s'attend à ce qu'ils passent en une ou deux réunions de la commission des secteurs sociaux. Il faut dire que compte tenu de l'urgence de la réforme en vue, les parlementaires tant de la majorité que de l'opposition se montrent assez souples sur le volet des amendements. Plusieurs députés estiment nécessaire d'accélérer la cadence en matière de mise en œuvre de la réforme législative en vue d'atteindre les objectifs de la généralisation de la protection sociale. À commencer par les ressources humaines qui constituent le premier défi à relever en vue d'améliorer le système de santé. D'ailleurs, c'est dans ce cadre que s'inscrit le recours aux médecins étrangers qui a suscité tout un tollé auprès des professionnels. Dans l'immédiat, il n'existe pas en effet d'autre solution pour combler le déficit qui s'élève à plus de 97.000 professionnels de la santé. Rappelons que Maroc ne dispose que de 1,65 personnel médical pour 1.000 habitants alors que le taux minimal exigé par les standards internationaux est de 4,45. Le déficit en médecins dépasse 32.000 dont 12.000 dans le secteur public. Il faut des années avant de pouvoir combler le déficit par des professionnels marocains même si on élargit la formation en médecine dès la prochaine rentrée. À cela s'ajoute la question des incitations matérielles au profit des médecins dans le secteur public. Ce dossier sera résolu dans le cadre du projet de loi sur la fonction publique sanitaire qui fixera un salaire fixe plus une partie variable en fonction du rendement de chaque médecin. Seule cette nouvelle approche permettra d'attirer les ressources humaines escomptées dont les médecins marocains qui exercent sous d'autres cieux. La mise en place des incitations financières s'impose car le secteur public n'est pas prisé même par les médecins ayant été formés au Maroc et qui ont décidé de rester dans leur pays comme en témoigne la difficulté que rencontre le ministère de la Santé à recruter des médecins. Les postes budgétaires consacrés au secteur, qui sont jugés trop insuffisants pour répondre aux besoins notamment certaines régions reculées, restent vacants. Le taux d'utilisation des postes budgétaires pour le recrutement des cadres médicaux et infirmiers ne dépasse pas parfois 30 %, selon les chiffres du département de tutelle. La réforme en cours tend aussi à supprimer les barrières entre le secteur public et le secteur privé et à créer des passerelles entre les deux secteurs dans le cadre du renforcement du partenariat public-privé. Le Maroc franchira, ainsi, bientôt une nouvelle étape en matière de réforme du secteur de la santé qui érige le volet des ressources humaines en priorité. L'accès des médecins étrangers au Maroc n'est qu'un axe parmi d'autres qui nécessite d'être constamment évalué, selon certains députés qui auraient souhaité verrouiller le système en mettant en place des conditions et des critères clairs relatifs à la compétence et à l'expérience ainsi que la zone géographique de leur affectation. Ce que prévoit le projet de loi Le texte permet aux médecins étrangers d'exercer, à titre permanent, dans le secteur privé au Maroc. Il prévoit de nouvelles mesures incitatives, comme à titre d'exemple, le fait de se contenter de la condition d'inscription au tableau de l'Ordre national des médecins pour exercer la profession. Il s'agit aussi de l'augmentation de la durée de validité de la carte d'inscription ( quatre ans au moins) afin d'assurer la stabilité du médecin étranger et la réalisation de son projet professionnel au Maroc. Un comité sera mis en place auprès du ministre de la Santé pour faire le point sur le degré d'intégration des médecins étrangers dans le système de santé au Maroc et présenter un rapport annuel au chef de gouvernement. Les médecins étrangers seront soumis aux mêmes conditions que leurs homologues marocains, en ce qui concerne les diplômes et certificats autorisant l'exercice de la profession. La condition de l'équivalence du certificat ou du diplôme obtenu d'un établissement étranger est supprimée à la faveur de l'expérience acquise en vue d'attirer les médecins marocains exerçant à l'étranger. Le projet de loi suspend également la condition de ne pas être inscrit sur le tableau d'un Ordre étranger. Par ailleurs, le texte lève les restrictions à l'exercice temporaire de la profession par les médecins non résidants au Maroc. Il supprime en effet toute condition liée à l'importance de l'intervention médicale, à la spécialisation ou à la technique médicale et ouvre le champ de la pratique temporaire dans tous les établissements de santé affiliés au secteur public ou privé au lieu de se limiter à des établissements de santé spécifiques. Un texte réglementaire déterminera la durée de la pratique temporaire qui est actuellement limitée à 30 jours par an. Jihane Gattioui / Les Inspirations Eco