Entretien avec Miloudi Moukharik, Secrétaire général de l'UMT. Quelles sont vos principales revendications ? Nous avons demandé au chef de gouvernement l'extension de l'aide financière au profit des salariés pour les mois de juillet, août et septembre pour trois considérations. Il s'agit, en premier lieu, de permettre à ces salariés, frappés de plein fouet par la crise, de faire face aux besoins de la vie. Deuxièmement, la solidarité s'impose à quelques jours de l'Aid Al Adha qui est une grande fête pour les Marocains. Troisièmement, la rentrée scolaire approche à grands pas et il faut, ainsi, soutenir les salariés pour répondre aux frais y afférents. Notre revendication est légitime, car il y a encore des ressources financières dans le Fonds de lutte contre la Covid-19. A cet égard, il ne faut pas oublier que l'UMT a incité les salariés à participer massivement à cette caisse et a approuvé les prélèvements sur salaire pour les 550.000 fonctionnaires. C'est notre argent que nous voulons distribuer aux salariés lésés par la crise. Que préconisez-vous en ce qui concerne les salariés licenciés ? C'est une deuxième grande revendication de l'UMT. Nous plaidons pour le retour des salariés licenciés ainsi que pour la nécessité de faire respecter les lois par les patrons qui veulent les remplacer par des salariés avec des CDD ou des intérimaires. Certains patrons veulent s'enrichir pendant cette période. La troisième grande revendication de l'UMT est de suspendre l'application de quatre articles qui concernent les licenciements collectifs pour des raisons économiques ou structurels, car ce n'est pas le moment. Il faut les remplacer par des plans sociaux négociés entre les délégués syndicaux, les délégués du personnel et les employeurs. Quid de la demande de la CGEM de reporter la deuxième tranche de l'augmentation du SMIG ? Les patrons brandissent la carte de la difficulté de la conjoncture actuelle. Nous sommes on ne peut plus fermes sur cette question. Il s'agit d'un accord tripartite paraphé par le gouvernement, les centrales syndicales et le patronat. En plus, toutes les entreprises ne sont pas en difficulté. Et certaines se sont même enrichies pendant cette période pandémique, comme à titre d'exemple celles opérant dans le secteur de l'agroalimentaire. Nous avons démontré, lors de la dernière réunion, que c'est un faux débat. Il s'agit en réalité d'une augmentation modique de 0,67 DH/heure. Il faut travailler 191 heures par mois prévues par le Code du travail pour avoir 128,44 DH. Faut-il réformer le Code du travail pour instaurer la flexibilité ? C'est un autre faux débat. Il y a un principe constant : on ne légifère pas en période de crise, car ça ne peut être qu'au détriment du salarié. Actuellement, des millions de salariés sont déjà à l'arrêt. La CGEM demande la flexibilité qui va permettre aux patrons de licencier les salariés sans conditions, sans raison et sans indemnités. Nous rejetons catégoriquement cette demande. Que pensez-vous des dispositions du projet de loi de Finances rectificative en matière d'emploi ? On ne peut qu'être contre la réduction du nombre des postes budgétaires dans la fonction publique. L'Etat-employeur doit jouer son rôle dans cette période de crise. S'agissant du secteur privé, le gouvernement a commis une grande erreur. Nous avons protesté énergiquement contre la disposition de soutenir les entreprises qui gardent 80% des salariés. Quid des 20% restants des salariés ? Certains employeurs ont compris qu'ils ont l'autorisation de licencier 20% de leur personnel. C'est une aberration. On profite de la solidarité des Marocains par le biais du Fonds de lutte contre la pandémie pour licencier 20% des salariés. Le chef de gouvernement est appelé à clarifier la position du gouvernement en la matière. Jihane Gattioui