Le gouvernement attendait de voir la force de proposition du patronat dans la dynamique économique du pays, la CGEM a répondu à l'appel. En conviant mercredi dernier le chef de l'Exécutif, Abdelilah Benkirane, la patronne des patrons, Miriem Bensalah Chaqroun, marque le pas et crée l'évènement de la rentrée. De son côté, le chef de gouvernement semble conscient des enjeux de cette réunion placée sous le thème de «l'amélioration du climat des affaires» et se fait accompagner de plusieurs ministres et membres de son équipe gouvernementale, pour ne citer que le ministre d'Etat Abdellah Baha, le ministre de l'Economie et des finances Nizar Baraka, le ministre de l'Agriculture et de la pêche maritime Aziz Akhannouch, le ministre de l'Industrie, du commerce et des nouvelles technologies Abdelkader Aâmara, le ministre de l'Equipement et du transport Abdelaziz Rabbah, le ministre délégué auprès du chef de gouvernement, chargé des Affaires générales et de la gouvernance Mohamed Najib Boulif. Tous étaient venus prendre acte des propositions du patronat marocain, qui n'a pas fait dans la complaisance. D'ailleurs, la présidente de la CGEM a clairement exprimé «le manque de visibilité des entreprises marocaines dans un contexte de plus en plus difficile». Trois objectifs ont dans ce sens été déclinés ; «croissance, emploi et compétitivité» faisant directement appel à un engagement «clair et rapide» de la part du gouvernement. Dans le détail des propositions et présentations des dysfonctionnements, les membres du Conseil d'administration se sont inscrits dans la lancée de leur présidente, affichant de réelles inquiétudes quant à des dossiers chauds tels que les délais de paiement, tant par les administrations publiques qu'au sein du secteur privé et qui mettent en péril la trésorerie des entreprises et nécessitent l'arrêté du décret d'application de façon urgente. Sur cette question, le chef de l'Exécutif a fait preuve d'anticipation en s'assurant de la présence du ministre des Finances qui fait le point : «nous sommes en train de donner le coup d'envoi d'un Observatoire des délais de paiement, qui sera domicilié à la primature, afin de fluidifier le système et des circulaires seront prochainement diffusées auprès des administrations et des différents établissements publics, afin de veiller à la bonne application de cette loi au regard de son importance pour les entreprises». Egalement, le trésorier du royaume a également confirmé le taux dissuasif de 10% du prochain arrêté ministériel, à savoir le taux de Bank Al-Maghrib majoré de 7 points. «Promesses» Dans le déroulement de cette rencontre, le jeu ressemblait davantage à une séance de questions réponses et à chaque problématique soulevée par le patronat, le gouvernement avait réponse. Ceci était en effet le cas de la remise en question du système actuel de remboursement de la TVA, prônée par le patronat et qui selon les membres de la CGEM «pénalise les entreprises par des délais de remboursement rarement respectés», insistant de ce fait sur «la nécessité d'une réforme en profondeur des textes règlementant la Taxe sur la valeur ajoutée». La réponse de l'Exécutif était d'ores et déjà préparée puisque ce dernier s'est tout de suite engagé à «inscrire la question à l'ordre du jour des prochaines assises de la fiscalité, qui se tiendront en février 2013 et dont les réunions préparatoires se tiendront en concertation avec la CGEM à compter d'aujourd'hui». Approche sectorielle Dans la «rigueur» dont le gouvernement a tenu à faire preuve lors de cette rencontre, les revendications de chaque secteur ont été notées. C'est d'ailleurs ce qui justifie la présence de nombreux ministres, qui ont chacun exposé le plan d'action de leur département dans les questions clés sur lesquelles ils sont attendus. Plus concrètement, concernant la réforme de la loi sur l'urbanisme, qui vise à fluidifier les goulots d'étranglement que connaît le secteur, le ministre de l'Habitat, Nabil Benabdellah rassure sur l'état d'avancement du travail tout en confirmant son caractère urgent. Sur cette même question, face aux nombreuses interpellations du secteur immobilier et notamment sur la question du foncier, le ministre de l'Agriculture, Aziz Akhannouch a insisté sur la nécessité de protéger les terres agricoles irriguées, en précisant que «pour tout le reste, un accord doit être trouvé, pour d'une part protéger les terres agricoles et assurer la sécurité alimentaire du pays et de l'autre libérer du foncier pour les besoins de l'économie, le tout dans le cadre d'un accord sur un programme de 5 ans». Toutefois, si sur les points financiers et les questions d'ordre sectoriel, le gouvernement avait bien préparé sa copie, le spectre du dialogue social était quant à lui bien présent, remettant sur la table les dossiers chauds que le gouvernement ne parvient toujours pas à régler. Dialoguer «social» La question qui fâche ? En tout état de cause c'est le rouage qui grince. La CGEM a saisi cette occasion pour réitérer son souhait de voir la loi sur la réglementation du droit de grève promulguée dans les meilleurs délais, et n'a pas manqué d'insister pour être associée à son élaboration. Le gouvernement rassure le patronat sur cette question tout en affirmant la nécessité de mener un travail de concertation avec les différents acteurs sociaux. Concernant le Code du travail, certaines mesures favorisant la création d'emploi sont toujours en stand by, ce que le patronat déplore tout en déclinant la nécessité d'avoir une visibilité claire sur le financement de ces mêmes mesures. En gardant les sujets qui «irritent» pour la fin, l'équipe gouvernementale était là pour gagner la confiance des patrons marocains, moteur de croissance pour une économie nationale qui traverse une période de perturbations.