Poursuite de la hausse des recettes fiscales, envolée des dépenses ordinaires et consommation de 82% du budget réservé à la Compensation, telles sont les principales conclusions que l'on pourrait tirer de la situation des finances publiques, à fin août dernier. En effet, la dernière hausse des prix à la pompe, intervenue en juin dernier, a semble-t-elle permis au gouvernement d'éviter l'épuisement global du budget de la Compensation durant l'été. Rappelons que l'impact de cette mesure devrait se chiffrer, selon les estimations du gouvernement, à près de 5 MMDH. Ainsi, l'Etat clôture les huit premiers mois de l'année sur des dépenses de Compensation de l'ordre de 37,1 MMDH, certes en hausse de 61,5% comparativement à la même période de 2011, mais qui laissent tout de même une marge de 8,4 MMDH, d'après le budget alloué pour les quatre mois restants de l'année, une situation inespérée il y a quelques mois. La question qui se pose désormais est de savoir si l'évolution des cours du pétrole à l'international sera favorable pour que le gouvernement évite le dépassement du budget réservé à la Compensation? La réponse à cette question est loin d'être rassurante, puisque depuis juin dernier, les cours du baril ont repris leur tendance haussière après un léger répit enregistré au deuxième trimestre. Du coup, bien que les statistiques des dépenses de Compensation à fin août laissent un peu de marge à l'Exécutif, rien n'assure que le Maroc n'aura pas à réinjecter davantage de fonds que prévu dans cette Caisse. En d'autres termes, difficile aujourd'hui d'avoir de la visibilité sur l'ampleur de l'impact de la Caisse de compensation sur le déficit budgétaire de cette année, une donnée qui ne manquera certainement pas d'impacter également l'élaboration en cours du projet de loi de finances 2013. En effet, ce dernier devrait inclure les charges qui découleront du financement du déficit de cette année et qui devrait se faire à la fois, via le recours aux marchés internes et externes. D'ailleurs, à ce titre, les dernières données disponibles auprès de la Trésorerie générale du royaume (TGR) font ressortir que le Trésor a emprunté, sur les huit premiers mois de l'année, 43,2 MMDH sur le marché interne, contre 12,6 MMDH seulement à la même période de l'année écoulée. Adjudications, recours au marché interbancaire... le Trésor a en effet usé de tous les moyens pour absorber ces besoins qui s'élévaient à plus de 39 MMDH, auxquels il faut ajouter un flux net négatif du financement extérieur de 3,7 MMDH, induit par les amortissements de prêts antérieurs. De plus, la sortie à l'international, prévue au plus tard en novembre prochain pour un montant avoisinant les 700 millions de dollars, devrait également induire des charges de remboursement importantes, qu'il faudra inclure dans l'élaboration du projet de loi de finances 2013. C'est dire que la situation des finances publiques de cette année risque de peser fortement sur les décisions à prendre dans le cadre de l'élaboration du budget 2013. Heureusement, le gouvernement Benkirane pourra compter, comme attendu par les économistes, sur le rythme de réalisation des investissements, lequel est moins important que celui déjà budgétisé. En effet, selon les statistiques de la TGR, les dépenses d'investissement du budget général se sont établies à 26 MMDH à fin août dernier, contre 25,4 MMDH un an auparavant, soit une augmentation de 2,5% et un taux de réalisation de 44% seulement. Plus, «ces dépenses tiennent compte du virement aux comptes spéciaux du Trésor d'un montant de 6 MMDH», ajoute la TGR. Ceci relance encore une fois le débat sur l'écart entre les prévisions et les réalisations des différentes entités publiques, déjà soulevé par Nourredine Bensouda, trésorier général du royaume, lors du dernier colloque sur les finances publiques. D'ailleurs, selon les données de la TGR toujours, le taux moyen d'exécution des dépenses d'investissement ne dépasse pas 68% sur les dernières années, avec un pic à 74,5% seulement enregistré en 2008. Par ailleurs, l'exécution des budgets d'investissement se traduit toujours par l'accumulation des crédits reportés, dont le montant a été multiplié par 2 en 10 ans. Quoiqu'il en soit, la situation est telle qu'à fin août dernier, les dépenses du budget général ont atteint 180,2 MMDH, signant un accroissement de 17,2% par rapport à leur niveau de fin août 2011, qui s'explique par une augmentation de 23,6% des dépenses de fonctionnement, de 6% des charges de la dette budgétisée et de 2,5% des dépenses d'investissement. C'est dire que le niveau actuel des dépenses peine à être couvert par des recettes publiques qui n'augmentent que de 1%. Néanmoins, notons que bien que les recettes fiscales continuent leur envolée, le solde global des recettes reste en quasi-stagnation, vu que les comptes de 2011 incluaient des recettes exceptionnelles, réalisées suite à la cession aux banques populaires régionales, des parts de l'Etat dans BCP. C'est ainsi que les données de la TGR font ressortir que «les recettes ordinaires se sont élevées à 129,3 MMDH, en augmentation de 1% par rapport à fin août 2011. Ceci est dû à la hausse des recettes fiscales de 6,2%, conjuguée à la baisse des recettes non fiscales de 27,8%». Ce sont principalement l'IS et l'IR qui tirent vers le haut les recettes, avec notamment des hausses respectives de 4,4 et 20,2%, au moment où les recettes douanières ne réalisent que 2,1% de hausse par rapport à leur niveau à fin août 2011. Dans ce contexte, le solde ordinaire s'établit à 10,5 MMDH contre un solde positif de 13,5 MMDH à fin août 2011, tandis que le déficit du Trésor atteint 33,5 MMDH, compte tenu d'un solde positif de 4,4 MMDH, dégagé par les comptes spéciaux du Trésor, contre un déficit de ce dernier de 7,4 MMDH à fin août 2011. Le Trésor à l'assaut du marché interne De l'ordre de 348,9 MMDH à fin août 2012, l'encours de la dette intérieure est en augmentation de 10,7% par rapport à son niveau à fin décembre 2011, selon les données du ministère des Finances. Ceci s'explique par le recours du Trésor au marché des adjudications pour un montant net de 29,4 MMDH, contre un recours net de 14,7 MMDH un an auparavant. La répartition de cet encours par maturité démontre un appétit particulier du Trésor pour les maturités de 2 ans, 5 ans, 10 ans et 15 ans. En tout, l'encours de ces quatre segments représente plus de 88% de l'ensemble de l'encours de l'endettement intérieur. Cette situation remet une nouvelle fois au goût du jour, l'effet d'éviction dont se plaignent les entreprises nationales, dans un contexte de sous-liquidité du marché local. Notons par ailleurs, qu'au niveau des souscriptions de l'exercice en cours, le Trésor a surtout privilégié le moyen terme. En effet, les adjudications de bons à 2 ans et 5 ans ont représenté 38 MMDH sur les 104 MMDH levés sur le marché interne.