El Hossein El Ouardi réussira-t-il à établir une charte du médicament en décembre prochain ? Rien n'est moins sûr à l'heure où le gouvernement valide (hier jeudi) la structure et le fonctionnement de la commission nationale de la pharmacopée. Au sein de la commission consultative du médicament et des produits de santé, créée en juillet dernier, les conflits d'intérêt se poursuivent entre les différentes parties autour de la table des négociations. «Entre les multinationales, les industriels et les pharmaciens, les intérêts ne convergent pas», assure une source prenant part aux discussions. «Il faut que chaque partie fasse des concessions si nous voulons réaliser des avancées», ajoute-t-elle. Les discussions progressent à une allure d'escargot, surtout depuis le retrait en août, des pharmaciens. «Le retour des entités représentatives des pharmaciens est nécessaire pour parvenir à une solution, car il n'y aura pas d'avancées sans l'implication de tous les acteurs concernés». La Fédération nationale des syndicats des pharmaciens du Maroc (FNSPM) a encore du mal à digérer l'accord signé entre le ministère de tutelle et certaines associations sur la baisse des prix de certains médicaments. La FNSPM dénonce un accord négocié en «coulisses» et conclu avant même la première réunion de la commission consultative du médicament et des produits de santé. Pis encore, l'absence de mesures d'accompagnement suite à cette décision, constitue aux yeux des pharmaciens, un arrêt de mort des officines, d'autant plus que, ont-ils rappelé, la situation des pharmacies risque de s'aggraver vu les baisses importantes prévues, qui sont de l'ordre de 20 à 60%. Exporter le générique ? Bien qu'elle n'ait pas encore décidé de suivre le pas de la FNSPM, l'Association marocaine des médicaments génériques (AMMG) commence de son côté à hausser le ton. Son président, Mohamed Houbachi, «dénonce l'absence d'une réelle politique de promotion et d'encouragement pour la délivrance des médicaments génériques». Si les précédents gouvernements s'étaient contentés de «mesurettes», Houbachi constate que celui actuel «ne fait rien, alors que des mesures d'urgence s'imposent». Le taux de pénétration du générique se situe actuellement à 28%. À l'AMMG, on souhaite le porter à 68%. Selon les calculs de Mohamed Houbachi, cela permettrait au ministère de la Santé de faire des économies de l'ordre de 2 MMDH par an et de régler l'équation de la baisse des prix des médicaments. Pour les exploitants des médicaments génériques, c'est aussi le moment de faire profiter l'industrie marocaine de l'apport du générique. «Promouvoir les médicaments génériques permettra non seulement de baisser les prix, mais aussi de créer des emplois et favoriser l'export». Les professionnels souhaitent représenter une part importante dans les échanges commerciaux du Maroc avec ses partenaires, notamment avec les pays d'Afrique Subsaharienne. Ces propositions, sont loin de faire l'unanimité au sein de la commission consultative du médicament et des produits de santé. À commencer par les pharmaciens, qui préfèrent commercialiser le princeps, car plus rentable. C'est dire qu'El Ouardi a du pain sur la planche et qu'il devra faire preuve de beaucoup de diplomatie pour obtenir des concessions de la part des différentes parties. Sous la pression des députés La rentrée parlementaire d'octobre risque d'être très dure pour le ministre de la Santé qui est déjà sous la pression des députés. Non seulement l'opposition pose de sérieuses réserves sur les délais des baisses des prix des médicaments, mais la rupture des stocks des officines, attendue dans 3 mois, tout comme les pourparlers entre les professionnels qui n'avancent pas sont autant d'obstacles qui se dressent devant le département de tutelle. La fin des concertations régionales ouvertes sur la question a confirmé que les médecins et pharmaciens n'ont pas encore fini de se jeter la responsabilité sur les vices du circuit de commercialisation des médicaments, alors que des projets de circulaires sont déjà prêts. Les questions relatives aux marges dégagées par les officines et le droit de substitution qui leur sera accordé pour la vente des génériques nécessitent donc que l'Etat tranche avant la rupture des stocks actuels prévue en décembre 2012. Entre temps, la mise à jour des cahiers des charges des fournisseurs en médicaments est entamée dans l'objectif de compenser la faiblesse de l'offre par l'activation des solutions alternatives qui ont été décidées.