C'est inéluctable: à l'image de plusieurs compagnies aérienne mondiales, Royal Air Maroc enclenche son plan social. 850 emplois seront supprimés et une vingtaine d'avions seront immobilisés. La relance du bras aérien de l'Etat sera dure! Royal Air Maroc active l'option du plan social, avec des licenciements prévus. La crise qu'a subie le secteur de l'aérien au niveau mondial n'épargne pas le transporteur national. Contactés par nos soins, les responsables de la compagnie ne veulent pas s'exprimer sur le sujet, puisque «le processus est en cours de négociations avec les partenaires sociaux». Le sujet est certes délicat pour les deux parties, mais il est certainement inévitable pour la compagnie nationale, dont la flotte est clouée au sol depuis mi-mars dernier. RAM a subi des pertes colossales, et ses performances financières ont été fortement plombées. D'ailleurs, cette situation n'est pas propre à la compagnie aérienne nationale: de par le monde, les compagnies aériennes ont été frappées de plein fouet par la crise. Certaines ont été jusqu'à mettre la clé sous la porte, tandis que d'autres ont procédé à des plan sociaux massifs et très douloureux. Pour ce qui est du Maroc, la ministre du Tourisme et du transport aérien, Nadia Fettah, avait déjà planté le décor, lors de son passage au Parlement lundi 8 juin. Elle avait fait savoir que le rapport de l'International Air Transport Association (IATA) table sur une baisse du trafic aérien de l'ordre de 5 millions de voyageurs au Maroc, «ce qui devrait se traduire par des pertes financières et des suppressions d'emplois», avait-t-elle assuré. À noter dans ce sens que l'activité aérienne nationale est complètement chamboulée: elle ne dépassera pas le tiers de sa performance enregistrée en 2019. De plus, selon les pronostics internationaux, le trafic aérien mondial pourrait poursuivre sa baisse d'activité jusqu'en 2023. Dans l'industrie aérienne, l'IATA prévoit une contraction de la demande de 55% en 2020. Les pertes sont évaluées au niveau mondial à 314 milliards de dollars, dont 6 milliards de dollars en Afrique, et 25 millions d'emplois sont menacés à travers le monde. «Pour notre compagnie, la fermeture a très rapidement concerné l'ensemble du réseau, l'impact sur le trafic a été violent avec des baisses respectives de 60% en mars et 100% en avril, par rapport à l'année dernière, après une forte croissance à deux chiffres entre novembre et février», avait indiqué le président de Royal Air Maroc dans sa lettre adressée à l'ensemble du personnel en mai dernier, ajoutant que la compagnie perd chaque jour 50 MDH de chiffre d'affaires. Colossal! Pour assurer la reprise de l'activité de RAMl'Etat a posé des conditions afin de financer son bras aérien qui ne devrait réaliser que 30% maximum de son activité normale. Compte tenu de la fragilité de la situation financière de Royal Air Maroc, et pour la sauver du gouffre financier, «le gouvernement a donc exigé l'immobilisation de 30% de la flotte de RAM, en prévision de la baisse de l'activité du marché aérien mondial», nous explique une source informée auprès du ministère de tutelle. Pour ce qui est de la réduction de la flotte, sur un total de 59 appareils, RAM prévoit de procéder à l'immobilisation d'une vingtaine d'avions en attendant de décider de leur cession ou location. Les avions concernés sont quatre Embraer, quatre Dreamliners Boeing 787, une douzaine d'appareils Boeing 737. Par ailleurs, jeudi 2 juillet, la compagnie nationale a réuni son comité d'entreprise, organe au sein duquel siègent les délégués des salariés et les représentants syndicaux de l'entreprise. L'ordre du jour portait sur le lancement des discussions d'un plan de sortie de crise à la lumière de la situation économique et financière difficile que vit l'entreprise. Qui dit réduction de la flotte dit réduction de l'effectif. En effet, plus de 850 emplois seront supprimés dans le cadre du plan social de RAM, dont la majorité concerne des postes oeuvrant dans l'exploitation de la compagnie (pilotes, hôtesses, stewards…). D'autres postes sont également concernés, notamment au niveau des filiales de la compagnie (Atlas Multiservices (AMS), RAM Handling...). En tout cas, lors de la réunion du jeudi, plusieurs pistes de départ du personnel ont été débattues par le management de RAM et les représentants de son personnel. L'éventualité d'un plan de départ volontaire en faveur du personnel âgé de plus de 57 ans ayant au moins une quinzaine d'années d'expérience a donc été privilégiée lors des négociations. «Les conditions de cette proposition et ses modalités sont toujours en négociation», précise notre source. La seconde piste débattue concernait d'autres formes de départ pour le personnel de RAM, notamment le licenciement économique pour les salariés ayant moins de 3 ans d'ancienneté et les nouvelles recrues. «Rien est encore décidé: pour le moment, le plan social de RAM est en cours de négociation entre la compagnie et ses partenaires sociaux», nous confirme la même source. Justement, il est à préciser que les représentants du syndicat majoritaire du personnel du transporteur public -affilié à l'Union marocaine du travail (UMT)- ont confirmé leur présence à la réunion du jeudi 2 juillet. Par ailleurs, nos sources nous confirment que «les pilotes ont été bien représentés par leurs délégués du personnel lors de la réunion». À préciser que l'Association marocaine des pilotes de ligne (AMPL) a refusé de participer à la réunion du Comité d'entreprise de jeudi. L'association avait exigé que «cette réunion soit bilatérale», peut-on lire dans le courrier qu'elle avait adressée à la direction de RAM, qui l'avait invitée à prendre part à la réunion de jeudi denier. Ainsi, dans sa réponse à l'AMPL, la compagnie avait précisé que sa convocation «intervenue dans le cadre des dispositions de l'article 66 du Code du travail, met à la charge de l'employeur l'obligation de se concerter avec le comité d'entreprise et les délégués syndicaux exclusivement et ne lui impose nullement une quelconque concertation avec les associations du personnel créées au sein de la compagnie». Les prochains rounds risquent donc d'être corsés entre le management de la compagnie nationale et ses pilotes. Affaire à suivre. Des lignes seront supprimées Afin de rationaliser ses dépenses, et en plus de son plan social, RAM envisage également la suppression de plusieurs lignes et escales. Parmi les lignes qui seront supprimées figurent Athènes, Vienne, Boston, Miami, Sao Paolo, Rio de Janeiro, Stockholm, Copenhague, Beyrouth, ou encore Amman. Sanae Raqui