L'information est passée presqu'inapercue. Cheikh Hadjibou Soumare, Président de la Commission de l'Union économique et monétaire Ouest-africaine (UEMOA), et Abdelkader Aâmara ont récemment tenu une réunion de travail au cours de laquelle le Président de la Commission de l'UEMOA a assuré que toutes les dispositions nécessaires seront incessamment prises en vue d'activer la signature de cet accord, pour une dynamisation effective d'un partenariat économique gagnant-gagnant entre le Maroc et la sous région de l'Afrique de l'ouest. Enième promesse ou avancée palpable dans les négociations de cet accord? ce qui est certain, c'est que l'engagement en question donne toutes les raisons d'être pris au sérieux. Une niche de valeur «Il y a dix ans, The Economist titrait : l'Afrique, le continent sans espoir. Une décennie après, le même support titrait cette fois l'Afrique, le continent de tous les espoirs». Voilà une phrase que n'a eu de cesse de répéter Saad Benabdellah tout au long de la dernière Caravane de l'export, sauf au Burkina Faso, parce qu'il n'était pas là pour le faire. Peu importe, l'essentiel est que l'Afrique aujourd'hui attise la convoitise de toutes ces économies occidentales en mal de croissance, et les autres, émergentes, en mal de respectabilité. Le Maroc, lui, devrait passer à la vitesse supérieure, selon Abdelkader Aâmara, ministre de l'Industrie, du commerce et des nouvelles technologies, en rompant notamment avec «les relations empreintes d'accolades». Moins dans la diplomatie économique, et davantage dans l'action opérationnelle, Saad Benabdellah estime aujourd'hui le terrain assez mâture pour passer à l'offensive. C'est ainsi que le rapprochement en cours de finalisation avec l'UEMOA, pour lequel Aâmara a rouvert les négociations avec le président de la commission de l'organisation à Ouagadougou, et pour lequel Maroc Export entend concrétiser son action au travers d'une nouvelle stratégie promotionnelle ciblée, pour ne pas dire agressive (La France et l'UK ont aussi leur stratégie dédiée). Offre Maroc, une question de visibilité Au cœur de la stratégie, dépasser les freins qui bloquent le processus de rapprochement avec l'UEMOA depuis 2008, en instaurant une logique de «partenariat Sûr – Sûr», comme se plaît à le dire Saad Benabdellah. Une façon subtile de dire que si le partenariat Sud–Sud passe naturellement par le co – développement, il nécessite néanmoins un niveau minimal de confiance mutuelle. Ce déficit de «compréhension», pourtant primordiale, fait partie d'un ensemble d'obstacles différentiés de par leurs origines, complémentaires, en ce qu'il forme un tout homogène que le management de Maroc Export n'hésite pas à qualifier de «cercle vicieux». Premier segment de ce cercle, «la méconnaissance du Maroc et de son offre à l'exportation» fait que les pays de l'UEMOA assimilent les produits marocains à «l'offre produits des autres pays du Maghreb ou du Liban», un pays dont la présence en force au nord et au centre du continent n'est plus à présenter. De fait, la perception de l'offre Maroc se limite, constate à ses dépens Maroc Export, à «quelques marques comme la RAM», qui se retire peu à peu du marché, ou «Maroc Telecom», qui a par contre encore des marchés à grignoter sur le continent. Comme la dynamique des échanges se limite elle «à certaines initiatives innovantes», du type «approche intégrée et proactive de la Fenelec», déplore également Maroc Export. Si nous rajoutons à ces éléments «l'approvisionnement irrégulier des marchés de la région, l'insuffisance de la compétitivité des prix des produits marocains face à la concurrence régionale» et «l'inefficience relative des routes to market», autrement dit «les infrastructures logistiques», il paraît légitime que l'offre marocaine soit ou méconnue, ou jugée «opportuniste». Le cercle qui relie le Maroc à ses partenaires africains mérite «rupture» selon Maroc Export, d'autant que l'UEMOA est un marché «de 100 millions d'habitants, avec un PIB de 71 milliards de dollars et un taux de croissance annuel de 4,6%» (dernière décennie), et dont les besoins en infrastructures, logements et produits pharmaceutiques notamment (1 milliard de dollars d'importations en 2010) se font criants et urgents à la fois. Pour inverser cette tendance, Maroc Export entend œuvrer sérieusement à «changer le comportement» opportuniste des exportateurs pour les inscrire dans une «approche volontariste de long terme», et celui des importateurs de l'UEMOA pour leur imprégner «une vision positive et une démarche proactive». Une fois la confiance mutuelle établie avec la région, l'approche promotionnelle peut être mise en œuvre. En interne d'abord, «en communiquant sur le potentiel, les caractéristiques et l'accessibilité» aux marchés de la région. En externe, il s'agira de mettre en place «une stratégie de marketing promotionnelle adaptée». Néanmoins, pour ce faire, insiste Maroc Export, il est indispensable d'établir une «route to market», au niveau «logistique» (voies de communication et de transport), et «commercial» (centrales d'achats locales / régionales). Accompagnées par une promotion «d'une offre marocaine de produits Value for money» et «une valorisation de l'expertise marocaine dans les domaines à forte valeur rajoutée», ces efforts qui devront être consentis par la partie marocaine seront articulés autour de «16 couples secteurs / marchés prioritaires». Parmi les marchés porteurs, figure par exemple le Sénégal, mis en exergue d'ailleurs par le dernier rapport des services du ministère des Finances (avril dernier), comme étant «le second client du Maroc à l'échelle du continent en 2010» (660 MDH d'exportations en 2010 contre 181 MDH en 2000). Dernière mesure stratégique, et non des moindres, «l'appui financier» aux exportations, qui pourrait passer selon Maroc Export par deux mécanismes, «un fonds de soutien» aux entreprises intéressées par les marchés de l'UEMOA, et «un fonds d'investissement public/privé» pour le financement «des grands projets d'infrastructures en UEMOA». La stratégie est là, le cadre conventionnel l'est presque, il reste maintenant à finaliser l'accord, ce qu'Aâmara entend entreprendre rapidement. Point de vue Saad Benabdellah, Directeur Général de Maroc Export. Nous sommes un outil de réflexion. Notre démarche est fondée essentiellement sur la performance et l'exécution. En tablant large, et en capitalisant sur le travail entrepris auparavant, nous avons réussi à identifier des zones intéressantes pour la concrétisation de nos objectifs à l'export. Nous nous dotons pour cela d'un vecteur de développement en plusieurs inclinaisons : les clusters, l'audit à l'export, les contrats croissance, avec en amont tout un focus sur la formation, l'intelligence économique et le financement des projets, sans oublier l'accompagnement individuel. Cet ensemble nous permettra d'être le bras marketing de la CGEM à l'international. Concrètement, nous avons établi une nouvelle stratégie marketing promotionnel, envers notamment l'UEMOA (Union économique et monétaire ouest africaine), sur la base des remontées des acheteurs et de l'expertise des consultants. Des groupes comme l'OCP, Maroc Telecom, ou même l'ONE peuvent être des locomotives pour les entreprises marocaines qui désirent s'investir en Afrique Subsaharienne, notamment pour la sous-traitance dans les grands projets structurants. Les entreprises étrangères installées au Maroc sont également un vivier entrepreneurial et industriel sur lequel nous nous basons pour élargir notre offre à l'export. C'est ainsi que l'ambition de hub régional pour le Maroc pourra prendre de l'ampleur.