Elle a été reléguée au second plan par l'annonce de l'abaissement du taux directeur. Pourtant, c'est incontestablement l'une des mesures phare et osée, qu'aura pris la Banque centrale en marge de son dernier Conseil. Il s'agit de la mesure destinée au soutien du financement des PME marocaines. Le gouverneur de Bank Al-Maghrib ( BAM) avait en effet annoncé la mise en place d'une nouvelle technique de refinancement des banques, via le remboursement à hauteur de 25%, des crédits octroyés par les banques marocaines. «Nous avons convenu d'être plus volontaristes vis-à-vis de notre économie. Nous avons ainsi fixé au GPBM un objectif de financement des PME et TPE», avait annoncé Abdellatif Jouahri. C'est dire que la Banque centrale prend désormais à coeur le soutien au financement de cette catégorie d'entreprises qui représente, pour rappel, près de 94% du tissu économique national. Il faut dire qu'il était temps que l'institution de supervision bancaire planche sur cette question au vu de l'évolution récente de la situation de financement pour les PME. Outre l'influence de la crise économique internationale sur le Maroc et par là même sur l'activité des PME, plusieurs banquiers confirment que les conditions d'octroi des crédits sont devenues plus strictes. Soutien aux trésoreries également Une situation qui est devenue d'autant plus problématique, dans un contexte de rallongement des délais de paiement. Contexte, d'ailleurs, qui imposait aux entreprises marocaines de recourir de plus en plus à l'auto-financement de leurs trésoreries. À ce titre, il suffit de citer le taux de croissance de plus de 13% marqué par l'encours des crédits de trésoreries, dans le secteur bancaire à fin février dernier. Cela pourrait d'ailleurs être l'une des raisons qui a poussé le gouverneur de la Banque centrale à étendre la mesure annoncée à la fois pour les crédits d'investissement que pour ceux de trésorerie. Concrètement, le souhait de la Banque centrale est que les établissements bancaires ciblent des entreprises dont l'encours de crédit ne dépasse pas 15 MDH pour les PME et 2 MDH pour les TPE. Cela devrait permettre, selon les experts du secteur bancaire, «de réduire les risques que pourraient encourir les banques dans un contexte économique difficile». Dans la pratique, la Banque centrale devrait incessamment diffuser une circulaire régissant cette nouvelle mesure. Celle-ci devrait se concrétiser via un système de reporting trimestriel, permettant à Bank Al-Maghrib de faire le suivi des montants de crédits accordés aux PME, afin qu'en contre-partie elle injecte 25% du montant via des facilités à 3 mois accordées à 3%. C'est donc là un outil qui permet de soulager les trésoreries bancaires en vue de financer la petite entreprise. Ceci est d'autant plus opportun dans le contexte de sous-liquidité qui s'accroît actuellement dans le marché bancaire et qui pousse souvent les établissements à opérer des arbitrages dans leurs emplois, pas forcément en faveur de la PME. Mieux encore, la Banque centrale laisse la porte ouverte à un relèvement du seuil de 25% «en attendant d'évaluer le retour d'expérience», insiste le gouverneur de BAM. Le rating suivi de près Parallèlement, la Banque centrale devrait également s'atteler au système de rating des PME dans les banques. Rappelons à ce titre, que plusieurs banques de la place évaluent désormais les risques que présentent les entreprises clientes, via un système de rating qui n'est pas toujours clair. Désormais, il s'agirait vraisemblablement pour BAM de mettre en place une procédure uniformisée à l'ensemble du secteur. Ceci devrait permettre également aux PME de mieux connaître les procédures mises en place par les banques, afin d'améliorer leur rating et de surcroît, améliorer leur accès au financement. Cette mesure devrait par ailleurs, permettre de rompre avec ces taux que plusieurs patrons de PME jugent trop élevés par rapport à leur financement, dans la mesure où «un rating permet d'adapter le coût du financement à chaque entreprise», rappelle le banquier. Pour rappel, quelques banques appliquent également ce système de rating dans le cadre de la convention signée avec l'ANPME, pour la mise en œuvre du programme Imtiaz. Les entreprises bénéficiant de ce soutien sont en effet notées selon leurs risques, par les banques, pour le compte de l'agence nationale de promotion de la PME. Ce système a longtemps fait l'objet de critiques des observateurs, l'ayant accusé de constituer un frein pour le décollage du programme de soutien mis en place par l'ANPME. En cas d'uniformisation, cela devrait également permettre de remédier à cette lacune. Accès difficile Dans les enquêtes de conjoncture, réalisées soit par Bank Al-Maghrib soit par le Haut commissariat au plan, l'accès au financement est souvent cité par les chefs d'entreprises, comme l'un des freins clés à leur activité. L'accès au financement bancaire est jugé globalement difficile dans les derniers sondages réalisés. De même, le coût du crédit a connu un trend haussier, ce qui a pour corollaire la montée en puissance de l'autofinancement dans la structure globale du financement des investissements envisagés à court terme. Il vient même en première place avec 46% des fonds investis par les entreprises, tandis que le crédit bancaire ne représente que 38% et le crédit-bail 15%. C'est dire que les entreprises marocaines, particulièrement les PME ne jouissent pas de cet effet de levier que provoque généralement le financement bancaire.