C'est sans nul doute l'un des plus grands maux dont souffre notre économie. L'activité informelle ne cesse de prendre de l'ampleur face à des gouvernements qui se succèdent et qui n'arrivent toujours pas à trouver la recette miracle pour y mettre un terme, ou du moins en réduire la cadence. Cette économie parallèle touche plusieurs domaines: l'artisanat traditionnel, le commerce de rue, l'emploi non déclaré, la micro-entreprise, le travail à domicile, les prestations de services, les activités de transport, la contrebande ou le narcotrafic... Ces secteurs économiques peuvent également inclure aussi le secteur financier informel. Et aujourd'hui, la CGEM semble se saisir de cette problématique pour faire de la lutte contre ce fléau, son cheval de bataille. Lors de la présentation des dernières doléances du patronat pour la prochaine loi de finances, tout un chapitre a été réservé par le patron des patrons à l'analyse du circuit informel. Un fait lourd en sens car après la crise, les secteurs qui sont encore en train de se redresser n'ont pas besoin que l'informel vienne plomber leur décollage. «La concurrence déloyale exercée par le secteur informel et dont souffrent les entreprises structurées arrive en tête des difficultés recensées auprès des chefs d'entreprises», explique Mohamed Horani. Dans ce sens, le patronat estime que la prochaine loi de finances doit comprendre un nombre de mesures à même de réduire l'importance de ce secteur. Ainsi, «pour lutter contre l'informel, nous proposons des actions économiques et sociales de nature à soutenir la création d'entreprise et l'investissement», ajoute-t-on à la CGEM. La Confédération recommande, donc, de mettre en place une stratégie de développement des filières de formation adaptées aux métiers individuels les plus répandus dans l'informel, et notamment les petits métiers. Le patronat exhorte aussi le gouvernement à encourager la création de structures d'incubation et à créer un fonds d'aide à la création et à l'innovation. «Il est également nécessaire de réviser la charte de l'investissement en y intégrant des mesures spécifiques aux TPE», ajoute-t-on auprès du patronat. Les incitations fiscales seraient une solution C'est dire que la CGEM propose la mise en place d'une batterie de mesures qui viendraient s'ajouter à des incitations fiscales spécifiques aux petites entreprises. Ainsi, Mohamed Horani et son équipe espèrent que le ministère des Finances pensera à l'instauration d'un taux spécifique sur l'IS pour les TPE. «La lutte contre l'informel nécessite la mise en place d'un taux d'IS attrayant», explique-t-on à la CGEM. Il faut dire que le patronat, pour cette proposition, se base, entre autres données sur les conclusions d'une étude confiée en 2008 au cabinet Monitor et qui analysait les tendances des secteurs informels. Dans cette étude, il avait été démontré qu'une réduction de l'IS a permis dans plusieurs pays de réduire le coût d'entrée dans l'économie formelle pour les entreprises informelles, surtout lorsque cette réduction est accompagnée de mesures visant à réduire la complexité administrative de déclaration d'impôts, ou encore la corruption. C'est ainsi que les résultats de l'étude avaient prouvé que les pays ayant un fardeau fiscal et administratif élevé ont une économie informelle plus importante. C'est dans ce sens que versent les recommandations du patronat. «Nous proposons à cet effet un IS de 15% pour tout résultat fiscal égal ou inférieur à 1 million de DH», prône Mohamed Horani. Cette mesure ne devrait pas impacter les finances publiques, si l'on en croit le patronat. En effet, l'élargissement de l'assiette fiscale en attirant les TPE du secteur informel contribuerait, au contraire, à une augmentation des recettes de l'Etat. Par ailleurs, la réforme de la TVA est également perçue par la CGEM comme un moyen indispensable pour lutter contre l'économie informelle. Dans ce sens, les propositions du patronat tendent vers l'accélération de la réforme de cette taxe, entamée depuis 2005. Ceci vise essentiellement à améliorer le rendement de la fiscalité indirecte dans l'objectif d'obtenir de meilleures recettes fiscales mais aussi un allègement de la fiscalité directe. Pour atteindre ces objectifs, la CGEM estime qu'il est impératif de simplifier cet impôt à travers, entre autres, la réduction de la grille des taux pour la limiter à deux taux. Il est également recommandé d'éviter que la TVA ne se traduise par un coût financier pour les opérateurs économiques qui ne sont que de simples intermédiaires. Par ailleurs, d'autres incitations ont été suggérées, à l'instar de la mise en place d'un système de retraite et de couverture médicale, ainsi qu'une offre de logement social dédiéé aux opérateurs de l'informel. La charte de l'investissement, qui est actuellement en cours de refonte, pourrait également comporter des mesures spécifiques aux TPE. La CGEM tient donc à ces mesures afin de limiter l'essor de l'économie informelle. Encore faut-il aujourd'hui que le gouvernement accepte d'introduire ces recommandations, car depuis trois années la CGEM recommande à chaque fois une batterie de mesures qui tendent vers le même sens sans que la loi de finances n'en prenne réellement compte.