C'est courant juillet que doivent paraître, au Bulletin officiel, les deux arrêtés qui devraient parachever le dispositif réglementaire des Résidences immobilières de promotion touristique (RIPT). La boucle est bouclée, sachant que la publication du cadre légal général de ces résidences remonte à la mi-2009. En soi, verrouiller le cadre réglementaire de ce dispositif constitue un acquis, puisque le système des RIPT est évoqué depuis dix ans. Bémol, ce cadre censé donner le coup d'envoi à l'activité, semble avoir du plomb dans l'aile. Du moins à considérer toutes les critiques qu'il suscite. Mais d'abord, rappelons que désignées par la loi, les résidences touristiques répondant à l'appellation «RIPT» sont un ensemble de logements dont les unités appartiennent à un ou plusieurs copropriétaires. Ceux-ci s'engagent à les mettre en location et à en confier la gestion à une société spécialisée. Mis à part l'acquéreur, deux intervenants sont parties prenantes du dispositif : la société de promotion immobilière chargée de la construction de la résidence et la société de gestion s'occupant de l'exploitation. Les deux nouveaux textes de loi à paraître ce mois traitent, pour le premier, des normes minimales dimensionnelles, fonctionnelles et d'exploitation de ces résidences. Le second texte, lui, précise les conditions d'aptitude professionnelle des sociétés appelées à gérer les RIPT, de même qu'il normalise la relation entre acquéreur et sociétés de gestion. Des avantages... et des critiques S'agissant des critiques entourant cette loi, Abid Kabadi, ex-président de la Commission des droits de l'entreprise de la CGEM, en charge des RIPT au sein de l'organisation patronale, les énumère. L'expert explique que «la loi ne prend pas en considération les conséquences juridiques au niveau de la Conservation foncière ou encore de l'enregistrement; de fait, la sécurité juridique du dispositif n'est pas garantie». Par ailleurs, Kabadi relate que «l'administration publique a pris à sa charge d'émettre des arrêtés pour réglementer des conventions du droit privé». Une démarche qui expose à des complications en cas de conflit. L'expert attire également l'attention sur le fait que la loi sur les RIPT est greffée sur la loi sur la copropriété. D'abord, celle-ci comporte plusieurs failles, ce qui est pour handicaper le dispositif des RIPT. Encore plus, dans son actuelle mouture, la loi sur la copropriété ne régit que la copropriété verticale, alors qu'une réglementation de la copropriété horizontale s'impose pour encadrer les RIPT. «Dans le même registre, l'actuelle loi sur les résidences touristiques fait référence à la Vente en état futur d'achèvement (Vefa), autrement dit une autre loi perfectible dont les amendements sont bloqués depuis sept ans», rappelle Rachid Khayatey, vice-président de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI). Le professionnel rappelle également que peu de promoteurs immobiliers ont manifesté leur intérêt pour construire des RIPT. Un état de fait à lier au «flou qui entoure ce dispositif pour les professionnels». «La société de promotion immobilière se retrouve au centre du dispositif. En l'état actuel des choses, son savoir-faire ne lui permet de sécuriser que 30% du projet (soit la quotité autorisée actuellement pour une exploitation normale au sein des complexes de RIPT), ce qui demeure insuffisant pour rentabiliser l'investissement». Tout autant d'interrogations sont soumises par Ali Ghannam à la tête de la Fédération nationale de l'industrie hôtelière (FNIH). Ce dernier s'interroge sur la possibilité de rassembler au sein d'un même compte le produit des locations de RIPT, ceci pour ne pas léser les copropriétaires, sachant que certains biens pourraient nécessairement être préférés et donc plus sollicités à la location que d'autres. «La loi n'est pas allée jusqu'à se prononcer sur cet aspect, cependant distinction est faite entre le loyer fixe minimal et le loyer variable dépendant des formules commercialisées», relève Nada Roudies, directeur de la qualité et de la réglementation au ministère du Tourisme. Plusieurs interrogations entourent également les sociétés de gestion. «Y a-t-il possibilité qu'une société de gestion se substitue à une autre avant échéance de la durée d'engagement légale de neuf ans ?», s'interroge Ghannam. «Seulement en cas de défaillance ou si la répartition des logements, entre exploitation normale et gestion locative, ne respecte plus le cadre légal», explique Roudies. Par ailleurs, le responsable informe qu'aucune certification de société de gestion n'a encore été délivrée. Fiscalité, l'autre problématique L'autre thématique centrale qui est sujette à beaucoup de débats concerne la fiscalité du dispositif RIPT. Sur ce plan, précisons d'emblée que les promoteurs immobiliers ne bénéficient d'aucun avantage, alors que les professionnels qui investissent dans le secteur hôtelier profitent, pour leurs projets conventionnés, d'importantes incitations. Pour ce qui est maintenant des sociétés de gestion s'intéressant aux RIPT, sur le plan fiscal elles bénéficient en principe dans le cadre de leur exploitation des mêmes avantages que ceux accordés à l'hôtellerie classique, à savoir, d'une part, l'exonération totale de l'impôt sur les sociétés pendant les cinq années consécutives, courant à compter de l'exercice au cours duquel la première opération aura été réalisée en devises et de 50% au-delà de cette période. Et d'autre part, de l'exonération quinquennale de la taxe professionnelle (ex. patente). Des avantages qui restent toutefois, précisons-le, soumis à conditions. S'agissant des particuliers faisant l'acquisition de RIPT, la loi prévoit un abattement fiscal de 40% au titre du revenu locatif, soit le même traitement prévu par le droit commun.C'est toujours ça de gagné. «Mais cela ne doit pas empêcher une qualification plus précise du dispositif RIPT», martèle Mehdi Toumi, vice-président de la Commission fiscalité à la CGEM. Pour les particuliers notamment la question est de savoir «s'il s'agit d'une location civile ou professionnelle. Selon que l'on se retrouve dans l'un ou l'autre cas le traitement fiscal change fondamentalement», explique Toumi. L'expert juge même cette problématique vitale, dans la mesure où les investisseurs internationaux, qu'ambitionne d'ailleurs d'attirer ce dispositif, arbitrent en priorité en fonction des incitations fiscales offertes. L'ambition, dès lors affichée par toutes les parties prenantes du dispositif, est de décrocher davantage d'incitations fiscales, dont notamment une exonération totale du revenu locatif. Un objectif sur lequel Dario Fillipole, expert international, et directeur au sein d'Horwarth HTL, se montre critique dans la mesure où «se focaliser sur l'avantage fiscal permettra surtout d'attirer l'investissement spéculatif, ce qui condamnerait la pérennité du dispositif». Quoi qu'il en soit, Abid Kabadi, réaliste, suggère aux opérateurs de démontrer d'abord la valeur ajoutée que devrait générer pour l'économie cette nouvelle activité, ce qui justifierait tout avantage fiscal supplémentaire par rapport au droit commun.