Est-ce qu'il y a une presse au Maroc ? La question mérite d'être posée, mais la réponse renvoie à plusieurs écoles de presse et non à un corps unifié. D'aucuns diront c'est en conformité avec ce qui existe même dans les pays disposant d'une grande histoire de presse comme l'Angleterre. Le lectorat est diversifié et, naturellement, il est en quête de diverses options de lecture. Mais chez nous, l'affaire est tout autre. Une majorité de kiosquiers marocains répètent que notre presse est quasi-inexistante et, au mieux, ne dispose pas d'autonomie et d'indépendance. Le comble est que ces donneurs de leçons n'achètent guère de journaux et ne souscrivent pas un abonnement à un support papier ou électronique. Il est donc facile de dénigrer une industrie qui doit vivre de ses ventes pour gagner en autonomie face aux annonceurs. L'autonomie vis-à-vis des centres d'influence, dont la publicité, nécessite des moyens importants pour investir dans la production d'un contenu de haut niveau, ce qui renvoie au recrutement de profils pointus chèrement payés. On ne peut pas lire un journal gratuitement dans un café, ou le louer auprès d'un kiosquier véreux, et critiquer le contenu ou pointer du doigt la dépendance de ces centres d'intérêt économique. Aux Etats-Unis, les deux supports phares, à savoir le Washington Post et le New York Times, disposent de plusieurs millions d'abonnés, «en majorité des abonnements de solidarité pour la survie d'une presse crédible dans l'intérêt du modèle démocratique américain», tient à préciser un chevronné de la presse américain. Recadrons le débat. Au Maroc, il y a de tout en matière de style journalistique, mais certains supports arrivent quand même à maintenir un niveau qualitatif honorable en dépit des contraintes liées au changement de modèle économique. Cela reviendrait fatalement à miser sur les revenus d'un lectorat en quête de contenus de profondeur. Ça viendra....