Alors, vous avez passé un bon week-end? Bien reposés? Bien rempli la panse? Les brochettes étaient assez tendres? Le boulfaf assez gras? Le couscous assez bon? Les tripes ne vous sont pas montées à la tête? Vous avez bien digéré? À la bonne heure! Bon, maintenant, assez bouffé, assez ingurgité et assez roté, au boulot! Il ne faut pas vous endormir sur vos tagines. J'espère que vous ne faites pas partie de ces rigolos qui gueulent, râlent et chialent depuis le jour où ils ont appris que cette année, le jour de l'Aïd tombe un samedi, jour déjà férié, ou à moitié, pour presque tout le monde, suivi d'un autre jour, dimanche qui, lui, plus férié que ça tu meurs! Eh bien, ça les embête, pour ne pas dire autre chose, car, fête religieuse oblige, la plus grande d'ailleurs, ces affreux paresseux auraient voulu avoir deux jours fermes, ou plutôt, deux jours ouvrables, comme, par exemple, un lundi, un mardi etc., bref, tout sauf un vulgaire samedi ou un minable dimanche. Mais, tant pis pour eux! Je suis hyper content que ça tombe un week-end. Ce n'est que justice. Ils en ont tellement profité avant ... Personnellement, j'ai toujours trouvé que ces jours fériés à rallonge sont, à la fois stupides, saugrenus et, surtout, contreproductifs, ne serait-ce que parce qu'ils sont, presque toujours, chômés et payés. Je ne les aime pas car, d'une part, je pense qu'ils sont autant d'occasions ratées d'aller de l'avant, et, d'autre part, je suis persuadé que c'est la meilleure manière d'encourager les fumistes et autres plaisantins à continuer de roupiller les yeux ouverts, alors que le bled risque de fermer d'un moment à l'autre. Vous allez me dire, je le sais, que c'est un jugement très patronal, et je vais aussitôt vous rétorquer que, primo, j'aurais bien voulu être patron, mais un grand patron, un vrai de vrai, avec limousine, chauffeur, cigares, Rolex et, tant que j' y suis, pourquoi pas aussi, compte en Suisse, ranch, yacht et jet privé... Pourquoi se priver? Secundo, on n'a pas besoin d'être un big boss pour aimer les gens qui bossent. Vous savez, moi, vous me voyez comme ça, un peu extrémiste et, comme on disait chez les gauchos, un peu réac, mais, au fond, je suis très modéré. D'un côté, je ne suis pas du tout pour ces esclavagistes qui trouvent un malin plaisir à faire travailler les gens jusqu'à ce que mort s'ensuive, et après, en recruter d'autres, et ainsi de suite; et d'un autre côté, je n'ai jamais aimé les tire-au-flanc, ces énergumènes amateurs du moindre effort et des siestes à toute heure. Vous allez peut-être me trouver aujourd'hui un peu différent des autres jours, mais rassurez-vous, je suis toujours le même. Je n'ai pas changé. En fait, je vous ai fait marcher. J'aime bien me marrer. Mais, j'ai juste un problème : l'Aïd me tape vraiment sur le système. Déjà, que je ne suis pas très mouton, mais, cette année, j'ai trouvé le mien particulièrement arrogant, fier de son prix hors de prix et de ses cornes hors normes. Alors, puisque c'est comme ça, j'ai décidé de le gracier –il ne le sait même pas, et je ne le lui dirai pas. Na! – et je vais m'en aller, moi aussi, vers d'autres cieux, histoire de me sentir mieux. Entre nous, j'ai pris quelques jours de repos. Vous savez, je bosse trop... Quant à vous, au boulot!