C'est le paradoxe qui taraude aujourd'hui le ministère de tutelle, qui ambitionne de combler le besoin en logements. Un logement sans environnement propice à l'épanouissement économique et social est une perte d'argent. La Journée mondiale de l'Habitat, fêtée chaque premier lundi du mois d'octobre, est une occasion de se poser les bonnes questions sur l'avenir du logement au Maroc. Le thème retenu cette année par ONU Habitat révèle un nouveau besoin autour duquel se cristallise l'accès au logement: «La Politique du logement-des habitations abordables». La tendance mondiale est au logement à bas budget au moment où la mobilité économique est la règle. Quant à la vision de l'ONU, elle s'inscrit dans la droite ligne de l'Objectif 11 des 17 Objectifs de développement durable (ODD) adoptés lors du Sommet mondial sur le développement durable. L'objectif, donc, est de garantir, d'ici 2030, l'accès par tous à un logement et à des services de base adéquats à un coût abordable. Il vise également à améliorer les systèmes de transport et la sécurité routière. À plus court terme, cet objectif vise à promouvoir, d'ici 2020, les habitats qui favorisent l'insertion de tous, l'utilisation rationnelle des ressources, l'adaptation aux effets des changements climatiques, leur atténuation et la résilience face aux catastrophes. En gros, c'est d'une politique transversale que les Etats ont besoin pour être en harmonie avec cet objectif. L'habitat ne doit plus être isolé de son environnement socio-économique et environnemental. Ce n'est plus un luxe, mais une nécessité qui doit se décliner en des formes de contractualisation entre les pouvoirs publics et les acteurs locaux et régionaux. C'est ce que le ministère de l'Habitat est en train d'implémenter à travers des contrats signés avec les différentes régions du pays. Mais si l'urbanisation au Maroc avance à rythme soutenu, elle manque souvent de cohérence. L'échec qu'ont connu les villes satellites comme Tamesna, Tamensourt a montré la limite d'une politique urbanistique qui prend peu en compte l'économie, la mobilité, les espaces de vie, etc. Dans une note d'information du HCP à l'occasion de la journée mondiale, l'on apprend que malgré le déficit en logement qui existe toujours -bien que moindre comparé il y a une décennie- plus d'un million de logements sont vacants. Un vrai gisement pour répondre au besoin croissant en logement. Une réflexion a été menée il y a quelques années sur l'éventualité d'appliquer une taxe sur les logements inhabités, mais aucune suite ne lui a été donnée. Aujourd'hui, 90% de ces logements vacants se trouvent en ville. Par ailleurs, 48,5% des logements vacants en milieu urbain sont des appartements, suivis des maisons marocaines modernes avec 41%. Ces dernières connaissent d'ailleurs un réel engouement. Car, toujours selon le HCP, la répartition des ménages selon le type de logements occupé en milieu urbain montre une augmentation de la part des maisons marocaines modernes de 62,6% en 2004 à 65% en 2014. Quant à celle des appartements, elle a évolué de 12,4% à 17,5%, tandis que l'on enregistre une baisse de celles des maisons traditionnelles de 8,1% à 5,5% et de l'habitat sommaire ou bidonville de 8,2% à 5,2%. L'on remarque aussi un vieillissement dans le parc de logement sachant que plus du tiers des logements est âgé de 20 à 50 ans au niveau national avec 40,6% en milieu urbain et 30,8% en milieu rural. Pour ce qui de l'accès à la propriété, le Maroc tire bien son épingle du jeu. Entre 2004 et 2014, le nombre de ménages urbains propriétaires de leur logement s'inscrit en augmentation (de 57,7% à 61,9%) au détriment des locataires (de 29,6% à 27,3%). Les parts des ménages propriétaires de leurs logements dépassant la moyenne nationale se trouvent dans les régions de l'Oriental (68,6%), Béni Mellal-Khénifra (64,9%), Drâa-Tafilalet (64,6%), Marrakech-Safi (62,8%) et Fès-Meknès (62,7%). Quid des sans-abris? Lorsqu'on parle de logement, on ne peut passer sous silence ceux qui n'en disposent d'aucun. Selon les chiffres du HCP basés sur le Recensement général de la population de 2014, le nombre de sans-abris au Maroc s'élève à 7.226 personnes contre 7.308 en 2004, soit une légère diminution de 1,1%. La quasi-totalité des sans-abris (89%) vivent en milieu urbain. Cinq régions concentrent 73,7% des sans-abris, notamment la région du Grand Casablanca-Settat qui vient en tête avec 23%, suivie de Tanger-Tétouan-Al Hoceima avec 14,0%, Fès-Meknès avec 12,4%, l'Oriental avec 12,4% et Rabat-Salé-Kénitra avec 11,6%. Enfin, 32% des sans-abris sont en situation de handicap. La prévalence du handicap des sans-abris est plus faible parmi les femmes que parmi les hommes, avec 28,4% contre 32,5% respectivement.