La loi est sortie en 2016 et prévoit que la solvabilité des entreprises d'assurance tienne en compte tous les risques encourus par les compagnies d'assurances... Le chantier de mise en place de «Solvency II» au Maroc a encore du chemin à faire. «Cela prendra donc deux à trois ans pour que tout soit mis en place, mais il faut prendre en considération les disponibilités de chaque opérateur», souligne une source proche du dossier. De son côté, Mohamed Hassan Bensalah, président de la Fédération marocaine des sociétés d'assurance et de réassurance (FMSAR), assure que les discussions entre les opérateurs et l'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS) sont sur la bonne voie. «La majorité est prête au niveau qualitatif (gouvernance). Les tests sur la gouvernance ont déjà démarré», déclare le président. Il semblerait qu'un à deux opérateurs n'aient pas réussi ces tests. Pour l'instant, l'autorité serait en train d'effectuer quelques études d'impact. D'autres simulations devraient suivre pour apporter les ajustements nécessaires sur les autres volets, notamment le quantitatif. «Il y a des aspects techniques -liés aussi bien à la plateforme industrielle qu'à la plateforme financière- qui ont besoin d'être ajustés au secteur marocain, selon des critères et des positions parce qu'il y a une notion de risque (risque par émetteur/par groupe d'émetteurs). Or la Bourse de Casablanca est relativement étroite et il faut faire attention aux équilibres», affirme Bensalah. Pour rappel, la réforme Solvency II s'articule autour de plusieurs piliers, qui déterminent des exigences de provisionnement, notamment de fonds propres, ainsi que des dispositifs de gouvernance des risques et de reporting. Il vise donc une uniformisation des règles au niveau européen. Sauf qu'au Maroc, même s'il s'inspire beaucoup du modèle européen, ne peut se résoudre à appliquer cette réforme sur le marché marocain. Les risques auxquels sont confrontés les assureurs marocains sont nettement moindres. Mais le Maroc, futur hub financier régional, cherche à se mettre en conformité avec les exigences internationales de meilleure gestion du risque. Pourtant en Europe, Solvency II, entré en vigueur l'année dernière, a été vivement critiqué et remis en cause. C'est dans ce sens que l'ACAPS cherche à revoir tous les détails du protocole pour l'adapter de la meilleure manière possible à la législation marocaine. En commençant par le nom : au lieu du «Solvency II», le Maroc opte plutôt pour «la solvabilité basée sur les risques». Et pour cause, le principe de cette norme consiste à prendre en compte les autres risques inhérents à l'activité d'assurance, tels que le risque marché, le risque contrepartie réassureur, le risque défaut ou encore les risques opérationnels. Or jusqu'à présent, seul le risque de souscription était pris en compte. «Pour chaque risque, il y aura des hypothèses pour définir un minimum de capital à mettre en face», explique une source bien informée. L'idée, aujourd'hui, est de pousser les compagnies d'assurances à mobiliser un peu plus de fonds propres pour faire face aux imprévus. Cela permettra par la même occasion de préserver les équilibres financiers ainsi que les engagements pris vis-à-vis de leurs assurés. En d'autres termes, «il est demandé aux différents acteurs de faire un effort de provisionnement supplémentaire, suivant les exigences de la norme», poursuit la source. Plusieurs scénarios ont été élaborés. Les premières hypothèses ratissaient assez large pour ensuite être affinées pour tomber sur les cas où le capital nécessaire soit le plus porche de la réalité. Concernant le pilier 2, qui regroupe les notions de gouvernance, d'audit et de système d'information, les travaux visent à renforcer certaines fonctions et mettre des comités qui seront définis par la circulaire de l'autorité. En effet, légalement, l'autorité peut exiger aux entreprises de mettre en place des comités et qui seront définis par une circulaire. L'autorité aurait un regard sur leur mode de fonctionnement, leurs missions... Les opérateurs seront également amenés à mettre en place un système de contrôle interne, visant à renforcer la sécurité des transactions ainsi que la solvabilité des compagnies d'assurances. «C'est une condition de réussite de Solvency II», affirme sans trop de détails un haut cadre de l'ACAPS. Sachant qu'elle ne peut pas être sur tous les fronts, l'autorité exige que les entreprises mettent en place un système de contrôle interne sur lequel l'autorité va se baser pour l'évaluation des procédures par exemple. Le rapport devra déterminer l'ampleur des risques, les points d'amélioration et les procédures qui ne semblent pas adaptées à l'environnement de l'entreprise. L'autorité, s'attend également à ce que les opérateurs adoptent un système d'information fiable, opérationnel et performant afin de faire remonter une information sûre et complète. Le pilier 3, quant à lui, vise le reporting -que ce soit vis-à-vis de l'autorité ou du grand public-. Là aussi, la circulaire définit les informations pertinentes à mettre à la disposition de l'autorité dans le cadre d'un contrôle. «Il existe déjà un reporting..Il doit être, toutefois, renforcé et par la périodicité et par le contenu», signale notre source. D'ailleurs, les paramètres relatifs à la santé de l'entreprise, le taux de solvabilité, la marge de solvabilité devraient être plus étoffés dans les prochains reportings. Les compagnies d'assurances devront donc préparer dans le temps cette transition en concertation avec l'autorité, en fonction des paramètres qui seront retenus. Les opérateurs seront attendus sur plusieurs volets allant de la gestion d'actifs jusqu'aux notions de communication et de formation.