C'est une semaine historique et riche en enseignements que vient de vivre l'Europe. Deux démissions sous pression de la crise et de la gronde populaire en Italie et en Grèce. Pourtant, qu'il s'agisse de Silvio Berlusconi ou de Georges Papandreou, les deux hommes semblaient s'accrocher farouchement à leurs sièges. La sanction du marché, comme cela est qualifié dans le langage financier, a été sans appel. Bien sûr, leurs démissions respectives sont loin d'être la solution à la crise, mais c'est pour dire que rien n'est acquis, même au plus haut sommet d'un Etat. C'est aussi un indice du fait que si les hommes désignés par la volonté du peuple ne sont pas à la hauteur de leur mission et sont incapables d'avoir la réactivité et les solutions nécessaires en cas de crise majeure, le citoyen, dans un jeu démocratique, a toujours la possibilité de les rappeler à l'ordre, de recadrer leurs positions, voire de les débarquer. Il est important pour nous Marocains, à la veille d'un grand tournant tel que celui des élections législatives du 25 novembre, de nous arrêter sur cette vérité, que nos partis ont tendance à vouloir ignorer dans leur course acharnée aux sièges. Au delà des beaux discours et des promesses électorales, il n'y a pas plus dangereux que les fausses promesses, surtout dans le contexte actuel. Les choses ont changé et l'élite politique, même si elle se met parfois en retrait, par méfiance, reste toujours en veille et peut réagir à n'importe quel moment (violemment s'il le faut). Cela est perceptible sur les réseaux sociaux. Le moindre petit détail sur la campagne électorale y est commenté en long et en large, à chaud, à froid... Les yeux sont rivés sur le tableau de bord. On décrypte, on scanne, on analyse, on cherche les indices qui vont confirmer ou infirmer nos craintes. Et il n'y a pas pire que d'insulter l'intelligence de cette élite là. Dans un pays où le chômage arrive difficilement à reculer, où la petite entreprise est carrément en panne et où l'investissement est plutôt hésitant, comment peut-on accorder crédit à des partis politiques qui, campagne oblige, s'amusent à surenchérir sur la création d'emplois. 100.000, 200.000, 600.000... voire 800.000 (qui dit mieux?). Certes, les promesses sont étalées sur des horizons «confortables», mais c'est comme l'histoire du petit astérisque souvent utilisé en matière publicitaire avec un prix d'appel. On ne retient que le prix annoncé et rares sont ceux qui vont aller chercher dans les minuscules précisions en bas de page. Et puis comment peut-on annoncer la création de plusieurs centaines de milliers d'emplois lorsqu'on sait que la crise économique est encore là pour un bon bout de temps et qu'au meilleur des cas, on peut espérer une croissance de 4%? Le gap est énorme! C'est, de plus, sans parler de ceux qui ont décidé de passer par la case Smig pour interpeller les futurs électeurs, promettant de le faire passer à 3.000 DH. Tout le monde sait qu'à ce niveau de Smig, la sous-traitance nationale, notamment dans le textile ou d'autres filières en difficulté, perd un avantage concurrentiel de taille sur l'Asie ou la Tunisie par exemple. Arrêtons de prendre les électeurs pour ce qu'ils ne sont pas. On entend souvent dire que le niveau de maturité de la scène politique nationale n'est pas encore au stade d'envisager des votes sanctions, mais ce n'est pas vrai. Aujourd'hui, le meilleur moyen de convaincre est celui d'adopter des discours cohérents et d'avancer des engagements réalistes. Quand on parle, en Europe, d'une crise qui risque de durer une bonne dizaine d'années dans le scénario le plus optimiste, il faudrait que cela soit pris en compte au Maroc. Le parti qui mérite d'être en tête et qui donnera le chef de gouvernement, est celui qui saura trouver le bon dosage et saura surtout garder les pieds sur Terre. Il n'y a plus de place pour les promesses électorales fantaisistes. C'est à se demander pourquoi les partis encore au pouvoir pour quelques jours, n'ont pas réussi à réaliser quelques miracles de ce qu'ils vendent aujourd'hui comme réalisables. Certains ont pourtant eu une bonne quinzaine d'années pour le faire. Dans ce registre, on peut trouver la santé, la justice, l'enseignement, l'équité sociale et la douloureuse Caisse de compensation. Quelques signaux positifs, confirmant qu'il y a une nouvelle façon de faire, une nouvelle approche ou encore un espoir de changement, sont perceptibles. Il faudra capitaliser dessus et résister aux sirènes de la démagogie. Le retour de manivelle peut être très violent.