En remettant sur le tapis le dossier des écoles privées homologuées, Rachid Belmokhtar, ministre de l'Education nationale, a ouvert une véritable boîte de Pandore. Déclarations approximatives, manque d'arguments...Sa sortie a laissé les directeurs des écoles visées perplexes. «De deux choses l'une : soit le ministre s'est mal exprimé et donc ses propos ont été mal interprétés ; soit les raisons de la remise au devant de la scène de ce dossier sont inavouées, et là il faut attendre la suite des évènements». C'est en ces termes que le directeur d'une école privée homologuée exprime, sous couvert d'anonymat, son incompréhension de la dernière sortie de Rachid Benmokhtar. En évoquant le sujet, sur les ondes de Luxe radio, le ministre de l'Education nationale s'est empêtré sur un terrain glissant. Il a en effet déclaré que pas moins de sept établissements scolaires homologués risquent d'être fermés pour non respect de la loi 06.00 qui interdit de recevoir des élèves marocains ayant démarré leur scolarité au Maroc. Ces écoles seraient en effet hors la loi car, selon le ministre, elles ont une autorisation pour enseigner le programme public national. Or, elles se basent dans leurs enseignements sur des programmes étrangers (français, espagnol, belge, américain...). «Les informations avancées par le ministre ne sont pas exactes. Tout d'abord, les écoles en question à Casablanca sont au nombre de 5 et non 7. Ensuite, ces écoles ont une autorisation appuyée par une dérogation spéciale pour enseigner leurs programmes. Mieux, ces écoles sont tenues par un cahier des charges qui a été signé avec le ministère du temps de Habib El Maki», explique notre interlocuteur. Et de poursuivre : «Cela dit, il y a des écoles qui ne sont pas homologuées et/ou n'ont pas l'autorisation pour dispenser les programmes qu'elles proposent. Une pratique qui relève de la publicité mensongère. Si le ministre compte s'attaquer à ces écoles qui travaillent dans l'illégalité, il a entièrement raison». Contacté par nos soins à plusieurs reprises pour s'expimer sur la question, Rachid Belmokhtar n'a pas donné suite à nos sollicitations. Dans tous les cas, il semblerait qu'en dépoussiérant ce vieux dossier, le ministre n'a pas bien préparé ses arguments ni maîtrisé les contours du sujet. Résultat, il s'est s'attiré les foudres de plusieurs parties. Tirs ratés L'école belge de Dar Bouazza s'est en effet retrouvée, malgré elle, sous les feux de la rampe. En faisant allusion à cette «grande école qui vient d'ouvrir ses portes», le ministre de tutelle a laissé entendre que «le directeur de l'académie a contacté le wali de la région de Casablanca-Settat et que ce denier a convoqué les responsables de ladite école pour s'expliquer sur la question». L'information a défrayé la chronique et la réaction de l'Ecole belge de Casablanca ne s'est pas fait attendre. Dans un communiqué, elle dément avoir reçu une quelconque convocation du wali de Casablanca au sujet du respect de la loi sur le statut de l'enseignement scolaire privé (Loi 06-00). De son côté, Khalid Safir a nié avoir envoyé une convocation, ni à l'Ecole belge ni à une autre école. D'ailleurs, le contrôle ne relève pas de mes attributions», assène le wali de la région. Ce faisant, le ministre s'est retrouvé dans de sales draps en se mettant, au passage, plusieurs parties à dos : des écoles privées homologuées, la Wilaya et surtout les parents d'élèves qui, devant une école publique, étaient obligés de se tourner vers les écoles privées pour une meilleure qualité d'enseignement. Et le ministre de tutelle, au lieu de se pencher sur les maux de cette école publique n'a pas trouvé mieux que d'ouvrir une boîte de Pandore dans les temps morts du mandat gouvernemental. Devant des réactions dénonciatrices qui fusent de toutes parts, Rachid Belmokhtar a dû faire marche arrière. Son département s'est fendu d'un communiqué où il revient sur ses propos : «Mr le ministre n'a nullement cité le nom dudit établissement scolaire lors de l'émission. D'ailleurs, il n'a cité le nom d'aucun établissement privé en particulier», précise-t-il. Pourtant, «une grande école étrangère à Dar Bouazza», il n'y a en a pas une dizaine. Plus loin, le communiqué précise qu'il y a une distinction à faire entre les «établissements marocains privés qui ont l'autorisation d'enseigner des programmes étrangers et les établissements étrangers créés dans le cadre de partenariats entre le gouvernement marocain et ses homologues étrangers, lesquels ne sont pas concernés par la loi susmentionnée». Mais dans cette fausse polémique, les vraies questions sont restées en suspens : Pourquoi ouvrir un dossier aussi compliqué après la fin du mandat et mieux dans le cadre d'un gouvernement de gestion des affaires courantes? Certes, un nombre important d'écoles homologuées seraient en porte-à-faux avec la législation en vigueur et notamment la loi 06.00, mais en cas d'application de cette dernière, la situation serait chaotique et l'avenir de plusieurs milliers d'élèves serait menacé. Quelles alternatives propose le ministre ? Des questions qui restent en suspens.