«Casablanca, quel avenir pour la métropole régionale». Tel est le thème abordé, cette année, par la conférence biannuelle sur la métropole africaine. Organisée par l'Ecole d'Architecture de Casablanca, en collaboration avec le Conseil régional de l'ordre des Architectes de Casablanca, et l'association ArchiAfrika, la cinquième édition de «African Perspectives Conférence» se tient sur trois jours, du 3 au 5 novembre 2011, entre la Cathédrale du Sacré-Cœur et l'Ecole d'Architecture de Casablanca. Réunissant étudiants, acteurs politiques, artistes, et autour d'un parterre d'architectes et de personnalités de renommée, tels Saskia Sassen et Victor Saïd, les débats porteront cette année sur «les modèles urbains (qui) devraient être adoptés (par et) pour les métropoles africaines», avec, à la marge, le souci de «les relier les unes aux autres dans un contexte de globalisation» croissante des échanges, tant humains que matériels. Formalisation de l'informel, le passage d'un paysage de production industrielle vers un paysage urbain culturel et productif, et la périphérie des métropoles. Il semblerait que les trois présents axes de réflexion, arrêtés pour nourrir les débats de cette année, aient été «taillés sur mesure» pour la ville hôte, Casablanca. En effet, d'aucuns ne remettraient en question la pertinence de ces thématiques au regard de la situation économique, urbaine, sociale et culturelle de la capitale économique nationale. Pourtant, la naissance de la ville, sa croissance, sa mémoire et son développement plaident pour l'authenticité de son identité. De la difficulté de la transition urbaine Affirmer sommairement, tel qu'ancré dans l'esprit de la plupart des Casablancais, que l'autorité publique ait échoué dans l'accompagnement du développement urbain, comporte quelques éléments de vérité mais ne permet pas de cerner l'ampleur des difficultés accumulées par la ville depuis l'indépendance. Rapportée aux autres grandes métropoles africaines, la réalité urbaine de Casablanca semble répondre aux mêmes schémas, non pas de développement, mais de croissance et de transition urbaine. À ce titre, il est important de rappeler deux constats élémentaires. Dans toutes les grandes métropoles africaines, y compris Casablanca, le développement économique et la croissance urbaine (augmentation du nombre des populations urbaines), tous deux récents dans le continent, ont suivi un rythme d'évolution pour le moins spectaculaire, en comparaison avec ceux des pays dits développés. Ainsi, si les pays industrialisés ont pris le temps, sur des siècles parfois, de voir grandir leurs grandes métropoles, les métropoles africaines ont, elles, accompli leur relative transition du rural à l'urbain en quelques décennies. Il est dès lors aisément compréhensible que les grands acteurs de la Ville africaine aient été quelque peu dépassés par le rythme de développement de leur agglomération ou cité, ce qui expliquerait en partie pourquoi, dans encore bien des espaces urbains, l'eau, l'électricité, l'assainissement, pour ne pas citer la gestion des déchets, font encore défaut. La transition urbaine, à l'inverse de la transition démographique, a été très difficile en Afrique. Casablanca, entre enjeux et perspectives Si ce tableau peut paraître sombre, du moins sévère, les défis et les enjeux qui se dressent en filigrane n'en sont pas moins sérieux et réels. Pour reprendre un concept en vogue, la «gouvernance» urbaine se fait pressante. Dans une zone urbaine fragmentée, où les espaces formels et informels se chevauchent, et où une multitude de périphéries surgissent en plein centre, il devient effectivement urgent d'adapter Casablanca aux nouvelles réalités urbaines qui la transcendent parfois, mais qui conditionnent fortement, dans un contexte de mondialisation effrénée des échanges transnationaux, son positionnement régional, continental et, à terme, mondial. La mise à contribution des principaux acteurs institutionnels de la Ville en est, à n'en point douter, la condition sine qua none. Par ailleurs, terre d'accueil des différents flux migratoires depuis des décennies, la Ville de Casablanca se caractérise par une concentration urbaine telle qu'elle exerce un impact négatif et sur la rente foncière et sur l'offre de logements. À défaut de décongestionner au plus vite les points centraux de la ville, le renchérissement et la rareté et du foncier et des logements auront vocation à devenir des éléments de discrimination spatiale très problématiques. Enfin, la régénération des espaces informels à l'image des bidonvilles, conséquente à une évolution désordonnée de l'espace urbain casablancais, pose définitivement la question de la mixité sociale en milieu urbain. Si, ainsi, l'étalement urbain se déploie constamment aux dépens des zones périurbaines, l'insertion complète de chaque nouvelle population rurale dans l'espace urbain passe, non pas par une segmentation sociale des espaces mais plutôt par une intégration à l'histoire et à la culture de la Ville. Ces dernières étant, par définition, en mouvement continu, toute intégration nouvelle constituerait un élément de richesse supplémentaire pour la Ville.