Mohamed Fakhreddine : Directeur du Pôle finances et investissement Groupe Crédit agricole du Maroc (GCAM) Les Inspirations ECO : Le Crédit agricole a récemment organisé un séminaire international qui a été axé sur les perspectives d'évolution des marchés internationaux des matières premières ainsi que les risques de change. Quel est le véritable enjeu pour les entreprises ? Mohamed Fakhreddine : Nous sommes la banque publique de financement de l'agriculture et de l'agroalimentaire et par la même occasion, nous sommes une banque universelle. Nous avons donc un certain nombre de clients qui interviennent sur les marchés internationaux, que ça soit dans le domaine des matières premières agricoles dans le cadre de l'approvisionnement du Maroc que pour ce qui concerne l'énergie, puisque le Maroc importe beaucoup de pétrole. Dans le cadre de cette interaction, le change reste un élément très important dans la compétitivité des entreprises. Il nous est donc apparu important de permettre à nos clients de connaître les perspectives d'évolution de l'environnement économique international et des changements qui s'opèrent. C'est pourquoi nous faisons appel à des experts de renommée internationale afin d'aider ces entreprises à challenger aussi leurs organisations sur les risques qui pèsent sur les matières premières, mais aussi sur le risque de change. En parlant du marché des matières premières, comment se comporte-t-il aujourd'hui au niveau international et quels sont les risques qui pèsent notamment pour les entreprises marocaines ? Le marché des matières premières agricoles enregistre, depuis quelques semaines, une stabilité des prix, voire même une légère baisse. Pour ce qui est de l'énergie, on enregistre une remontée progressive mais aussi douce du prix de la principale matière première, à savoir le pétrole alors que les cours du gaz restent stables. Cette situation est due à un certain nombre de facteurs, notamment l'offre et la demande avec une période atone en matière de croissance et d'échanges économiques. Ces facteurs sont également connectés à des évènements politiques et géopolitiques qui surviennent un peu partout dans le monde, notamment les élections américaines ou en Europe ainsi que la situation dans le Moyen-Orient. Tout cela rend la nécessité d'être vigilant sur les prix des matières premières comme élément principal dans la compétitivité mondiale entre les pays, mais également dans une de leurs composantes la plus pratique, à savoir les entreprises. Il va sans dire que les entreprises marocaines, au même titre que les entreprises internationales, font face à ces fluctuations des marchés et devraient être mieux préparées pour mieux gérer les risques induits. La volatilité du marché pousse donc à être vigilant, mais aussi vous impose d'être plus innovants afin d'accompagner les entreprises. Comment ajuster votre offre dans un marché, par nature, très fluctuant ? Le marché bancaire reste assez standard, donc nous avons des offres un peu similaires aux autres banques locales ou internationales. Ce que nous apportons de plus, c'est, au-delà de l'information économique et financière qui est un élément important, une offre complète. Elle va du mécanisme de couverture des fluctuations des prix, aux produits qui fixent les parités de change et protègent l'entreprise contre les risques de change, ainsi que les produits qui permettent de gérer le risque de taux et les produits classiques de financement et des moyens de payement ou de garanties. Ce sont des instruments qui permettent aux entreprises d'opérer à l'international de manière sereine et d'être plus concentrées sur leur métier que sur les aspects qui sont plus liés à la banque. Parlant du régime de change, le gouverneur de la Banque centrale a récemment annoncé le passage à un système de taux de change flexible durant la première partie de l'année 2017. Comment appréciez-vous ce changement très attendu depuis des années ? L'évolution du régime de change est un pas de géant vers la libre convertibilité du dirham marocain. En tant que banque, nous essayons de nous préparer et de préparer nos clients sur les nouveaux défis que cela va engendrer. Dans ce cadre, nous avons également étoffé notre offre afin de permettre aux entreprises de choisir le meilleur outil nécessaire, soit pour la gestion de leur flux à l'import ou à l'export, et cela, quelles qu'en soient la devise et la durée de leurs opérations. Actualité oblige, le Maroc accueille en novembre prochain la COP22 où il sera beaucoup question de climat, mais aussi et surtout de financement. Quels sont les enjeux pour les institutions financières, comme le Crédit agricole qui orientent leurs actions vers le financement de l'agriculture.... Le Crédit agricole du Maroc a été, depuis toujours, très conscient des enjeux relatifs au changement climatique, à l'économie verte et en matière d'efficacité énergétique. Nous nous sommes par conséquent organisés et comptons dans nos structures des services dédiés, entre autres, au financement du développement durable. Nous avons également un pôle vert et surtout des produits qui ont été confectionnés sur la nécessité d'encourager, voire même, de faire bénéficier nos clients soucieux de l'environnement et de l'efficacité énergétique, de subventions étatiques. Nous pouvons dire que le Crédit agricole du Maroc est assez pionnier en la matière par rapport à l'intervention du marché. Nous serons partie prenante de la COP22, avec plusieurs évènements prévus lors du rendez-vous de Marrakech, et en amont, nous avons organisé plusieurs rencontres dans le même cadre. Le marché financier international est en train de basculer vers ce qu'on appelle, «La Finance climat». Le Crédit agricole a-t-il déjà intégré cette dynamique dans ses interventions ? Cela fait 55 ans que nous accompagnons le monde agricole et depuis ce temps, nous avons eu l'occasion de maîtriser et de connaître l'évolution climatologique comme c'est le cas au Maroc. Cette expertise a été bien intégrée dans notre politique d'action à travers des choix stratégiques d'accompagnement des agriculteurs, surtout les opérateurs de petite taille, pour justement pallier aux effets du climat sur l'agriculteur. Nous sommes, à cet égard, très sensibles à ce sujet, car nous avions su en anticiper les changements et nous allons maintenir et renforcer nos interventions. 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