Economie et sécurité sont au menu de la visite royale à Moscou qui devait démarrer dimanche dernier. Une série de conventions bilatérales devraient être signées. Le partenariat devrait être élargi à plusieurs niveaux: agriculture, énergie, pêche maritime et télécommunications. C'est une visite à forte connotation politique que mène le souverain depuis hier en Russie. Prévue depuis plusieurs mois, la visite a été officiellement annoncée en fin de semaine dernière par le ministère de la Maison royale. À l'heure où nous mettions sous presse, le roi Mohammed VI était attendu à Moscou pour une visite officielle avec, au menu, des entretiens avec le président russe Vladimir Poutine ainsi qu'une cérémonie de signature d'une série de conventions bilatérales. Cette visite intervient au moment où les déclarations du secrétaire général de l'ONU font encore jaser, concernant l'affaire du Sahara. Une question qui devrait figurer, d'ailleurs, parmi les sujets saillants discutés entre les deux chefs d'Etat. La Russie étant un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies, son soutien est plus que précieux pour le royaume, d'autant plus que la Russie a déjà témoigné son appui à la cause nationale, à l'occasion du vote sur l'élargissement du mandat de la Minurso en avril 2013. À contre-courant, la Fédération de Russie a fait jouer son veto pour stopper net cette résolution allant à l'encontre des intérêts du Maroc. Précisons, toutefois, que la Russie n'a pas toujours soutenu les positions du Maroc concernant la cause nationale du royaume. Pluridisciplinarité Il faut dire que les relations entre le Maroc et la Russie ont connu un saut significatif depuis la visite royale à Moscou en octobre 2002. Les deux pays avaient adopté la déclaration sur le partenariat stratégique, véritable programme d'action pour le renforcement des relations bilatérales sur plusieurs niveaux. Cette déclaration a instauré un dialogue politique entre les deux pays à différents niveaux, notamment dans les domaines des pêches maritimes, de la recherche scientifique et technique, de l'espace et des technologies de télécommunication. Elle établit également des consultations politiques régulières entre les deux pays pour coordonner leurs positions sur des questions d'intérêt commun, aussi bien au niveau bilatéral que multilatéral. Cette feuille de route visait également le renforcement et la diversification du partenariat existant en lui donnant une nouvelle impulsion dans les secteurs traditionnels de coopération (énergie, industrie minière et pêche) et en le faisant évoluer vers une dimension et un contenu nouveaux à travers la réalisation de projets conjoints d'investissements. Cet élan de coopération a été consolidé suite à la visite du président Vladimir Poutine au Maroc en septembre 2006, visite marquée par la signature de plusieurs accords de coopération entre les deux pays dans les domaines de la justice, des pêches maritimes, du tourisme, de la culture, de la communication, de l'agriculture, de la santé et des banques. L'agroalimentaire en locomotive Une décennie plus tard, les échanges commerciaux entre les deux pays ont enregistré un volume qui se chiffrait à 2,5 milliards de dollars par an, ce qui fait du Maroc le deuxième partenaire commercial de la Russie en Afrique et dans le Monde arabe. Concrètement, le commerce bilatéral s'est soldé à 18,06MMDH en 2014 (dont 16,33 MMDH à l'import et seulement 1,74 MMDH à l'export). Un déséquilibre flagrant de la balance commerciale, malgré les grandes opportunités offertes durant ces dernières années, notamment suite à l'embargo imposé par l'Union européenne sur la Russie en raison du conflit autour de la Crimée. Les exportateurs marocains voulaient à l'époque se substituer aux exportations agricoles européennes. Alors que la levée des sanctions économiques à l'encontre de la Russie se profile, c'est un sentiment amer d'échec qui marque les opérateurs marocains. Au total, les échanges commerciaux dans le domaine des produits agroalimentaires en 2014 se sont élevés à 2,6MMDH. En effet, l'agriculture représente une part limitée dans l'activité économique (moins de 5%), faisant de ce pays l'un des grands importateurs de produits agricoles. C'est le cas également pour ce qui est des produits de la pêche. À ce titre, un sixième accord de pêche entre le royaume et la fédération russe a été signé en 2013. Il a été convenu de permettre à une flotte de 10 navires russes de reprendre leurs activités de pêche dans les eaux marocaines, alors que les armateurs russes s'acquittent d'une contrepartie financière représentant le droit d'accès à la ressource. Cette compensation financière annuelle, instaurée pour la première fois en 2011, a été augmentée à hauteur de 100% en ce qui concerne l'accès à la ressource et de 40% en ce qui concerne les captures. Il reste que le commerce entre les deux parties demeure grippé par une logistique inadaptée, l'insuffisance de liaisons aériennes, et l'instabilité du rouble... Des efforts ont pourtant été fournis durant ces dernières années notamment avec l'ouverture en 2012 d'une ligne maritime reliant Agadir à Saint-Pétersbourg, port de liaison stratégique entre l'Europe et l'Afrique. Nul doute que la visite royale porte en elle les germes d'un nouveau départ pour ce partenariat stratégique. Grosse mise sur le tourisme Des efforts ont également été consentis au niveau du tourisme. Le nombre de touristes russes est passé de 8.670 en 2005 à plus de 23.000 en 2015, soit un taux de croissance annuel moyen de 10,42%. Le Maroc aspire désormais à attirer 200.000 touristes russes chaque année dans le cadre de sa politique de diversification. Selon l'Observatoire du tourisme, 96% des touristes russes font une appréciation positive de leur séjour au Maroc. La qualité et la diversité de l'offre de loisirs et d'animation, le confort de l'hébergement et la signalisation des sites sont les premières raisons derrière la satisfaction chez ces touristes.