L'année 2015 a été la plus chaude de l'histoire de la météorologie, alors qu'au Maroc la saison 2015/2016 est l'une des plus sèches, depuis des décennies. Les décideurs publics ne peuvent plus faire la politique de l'autruche, ignorant les nouvelles données climatiques. La COP22, qui se tiendra, en novembre prochain, à Marrakech devrait aider à améliorer la situation. Les climatologues l'ont pressenti, les populations l'ont ressenti, et le ressentent encore: 2015 a été l'année la plus chaude de l'histoire de la météorologie. En effet, 2015 est une année record, la plus chaude jamais enregistrée, depuis le début des relevés météorologiques contemporain en 1880, devant 2014 et 2010. Cette succession de records de température battus ne laisse plus de place au hasard, confirmant cette tendance de fond qui est en train de chambouler les normes et les habitudes dans la quasi-totalité des activités humaines. Au Maroc, la saison 2015/2016 s'annonce comme l'une des plus sèches, depuis des décennies. Une situation qui risque de devenir, de plus en plus, récurrente, mettant à mal, en premier lieu, les activités liées à l'agriculture, mais impactant également l'ensemble des autres champs d'activité et les comportements des citoyens marocains. S'il y a une activité particulièrement touchée par cette sécheresse, il s'agit bien de l'élevage pastoral. Le cheptel marocain est, en effet frontalement, impacté par cette calamité qui est, de moins en moins, exceptionnelle. Contrairement à ce que veulent bien croire les décideurs publics l'on ne peut plus parler d'exceptionnalité, lorsqu'on évoque les événements climatiques extrêmes qui touchent, de plus en plus, le Maroc. Selon les experts climatologues, c'est ainsi que se caractérise simplement le «nouveau climat». Nouvelles valeurs normales Inondation, sécheresse, vague de froid...les incidents climatiques, frappant le Maroc, vont continuer à se multiplier durant cette décennie, avec des dégâts matériels se chiffrant en milliards de dirhams, et des pertes humaines inestimables. Jusque-là, le discours officiel a, à chaque fois, qualifié ces événements «d'exceptionnels». L'année précédente, la vague de froid et les abondantes chutes de neige avaient paralysé des régions entières du pays. Alors, Aziz Rabbah, ministre de l'Equipement, du transport et de la logistique, avait évidemment qualifié les inondations, de novembre dernier, d'exceptionnelles, en réponse aux inquiétudes des parlementaires au sujet des pertes en infrastructures. «Il faut insister sur ce point: les événements climatiques, notamment extrêmes, qui se produisent, ne sont plus des phénomènes exceptionnels, c'est le nouveau climat de la terre», soulignait Mohamed Saïd Karrouk, expert climatologue, notamment membre du fameux Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), référence mondiale concernant les questions liées aux changements climatiques. Fini l'époque où l'on parlait de crues décennales ou centennales, survenant à titre exceptionnel, une fois par décennie ou par siècle. Aujourd'hui, les décideurs publics ne peuvent plus faire la politique de l'autruche, refusant de prendre compte des nouvelles données climatiques. La COP22, qui se tiendra en novembre prochain à Marrakech, devrait les en empêcher, même si, pour le moment, le pays reste encore dans l'attente d'initiatives concrètes. Les politiques publiques sont directement sous la menace de cette donne climatique qui se confirme. En fait, la menace réelle est d'ignorer ces réalités, car ce n'est pas une catastrophe en soi, mais pose la nécessité d'adapter les stratégies économiques et sociales à ces nouveaux paramètres, à tous les niveaux. Stratégie préventive ! En novembre dernier, à la veille de la COP21 de Paris, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a publié un rapport dans lequel il pointait du doigt les limites de l'approche actuelle des autorités, en matière de politiques publiques relatives au climat. Selon le CESE, le Maroc a, certes, réalisé d'importants progrès dans la prise en compte des défis socioéconomiques, relatifs aux changements climatiques, mais le pays ne dispose pas encore d'approche globale permettant d'intégrer véritablement le risque climatique, dans les politiques publiques. «Malgré les avancées réalisées par quelques secteurs, il manque une démarche structurelle globale pour, d'une part, intégrer le risque climatique en amont de la conception et la planification à moyen et long termes des stratégies sectorielles et, d'autre part, réviser, d'une manière dynamique, les orientations des politiques sectorielles en fonction de l'évolution des vulnérabilités climatiques des territoires», lit-on dans le rapport. De ce fait, le conseil a estimé qu'il est, plus que jamais, nécessaire d'optimiser la gouvernance institutionnelle en matière de politique relative au climat. Entre autres pistes, le CESE a recommandé l'institutionnalisation, par décret, du comité de coordination interministérielle pour l'implémentation de la politique de lutte contre le changement climatique du Maroc, en plus de rendre enfin opérationnel le Conseil supérieur de l'eau et du climat. Pour le CESE, la procédure d'adoption du projet, relatif à la Stratégie nationale de développement durable, doit être accélérée afin que le pays dispose d'une véritable politique qui prend en compte les différents défis posés par le changement climatique. En plus d'une révision des différentes stratégies sectorielles afin de considérer les enjeux liés à la durabilité et au risque climatique, le CESE a aussi plaidé pour un renforcement des politiques de résilience des territoires et des villes, face aux effets du changement climatique.