La participation des femmes au développement économique a connu une certaine évolution ces dernières années au niveau mondial. Plusieurs pays d'Afrique et du Moyen-Orient restent encore à la traîne. La Banque mondiale vient de livrer une étude sur les obstacles juridiques qui freinent une plus grande intégration des femmes dans l'économie de ces pays. Pour le FMI, le faible taux d'activité des femmes constitue un handicap pour la croissance des économies en transition. La place des femmes dans le développement économique constitue un enjeu important de la dynamisation de la croissance, principalement dans les pays en développement. Au-delà de la question de la promotion des droits de la femme au titre des droits humains universellement reconnus, leur intégration économique constitue un défi pour le développement de ces pays. C'est à ce titre que les principales institutions financières internationales, qui se sont fixé comme objectif l'accompagnement de ces pays vers une croissance durable et équilibrée, ont jugé nécessaire de tirer la sonnette d'alarme. L'initiative vise à ne pas occulter la prise en compte de la question des genres dans les politiques et programmes de croissance économique, actuellement en cours d'élaboration ou de mise en œuvre pour insuffler une nouvelle dynamique à la croissance des économies en développement. Le dernier acte en date est le rapport que vient de publier la Banque mondiale sur l'état de l'intégration économique dans le monde. Ledit rapport, élaboré conjointement par la Banque mondiale et sa filiale dédiée au secteur privé, l'IFC, est parvenu à la conclusion que les barrières juridiques et réglementaires qui entravent la participation des femmes à la vie économique ont globalement diminué durant les cinquante dernières années, même si de nombreuses lois défavorables aux femmes sont encore en vigueur. «De nombreux pays évoluent progressivement vers l'éradication des discriminations fondées sur le sexe, mais il est possible de faire mieux», a ainsi déclaré Jim Yong Kim, président du groupe de la Banque mondiale, lors de la présentation du rapport. Selon les principales conclusions tirées par les auteurs de l'étude, les lois qui limitent l'activité économique des femmes se retrouvent en grande partie dans les régions du Moyen-Orient, d'Afrique du Nord, d'Afrique subsaharienne et d'Asie du Sud. Il faut relever que ce n'est pas le premier rapport du genre, puisque depuis quelques années la Banque mondiale publie des études dans le même cadre. La présente édition qui s'intitule : «Les femmes, l'entreprise et le droit : lever les obstacles au renforcement de l'égalité hommes-femmes», a porté sur l'examen des réglementations défavorables aux femmes entrepreneurs et salariées dans 143 pays. Après avoir dressé un état des lieux des réformes engagées durant les deux dernières années, le rapport a passé au crible la tendance d'évolution du droit de la femme à la propriété et des dispositions légales permettant sa participation à la prise de décisions depuis 1960. Dans le même temps, le volet relatif aux protections juridiques contre les violences faites aux femmes a été également pris en compte. Compétitivité et prospérité «L'idéal d'égalité devant la loi et d'égalité des chances sur le plan économique n'est pas juste une mesure sociale avisée, c'est un choix de politique économique judicieux», a ainsi résumé le président du groupe de la Banque mondiale. Pour Jim Yong Kim : «quand les femmes et les hommes participent à la vie économique sur un pied d'égalité, ils peuvent investir leur énergie à bâtir une société plus solidaire et une économie plus robuste», ajoutant que «le moyen le plus sûr d'aider à enrichir la vie des familles, les communautés et les pays est de permettre à chaque individu de valoriser au maximum son potentiel créatif». Il faut dire que les détails du rapport font ressortir par exemple que 44 pays ont adopté 48 réformes juridiques, améliorant ainsi les perspectives économiques des femmes durant les deux dernières années. Parmi les pays concernés, la Côte d'Ivoire, le Mali, les Philippines et la République slovaque ont été les plus grands réformateurs. Entre autres mesures, les maris ne peuvent plus empêcher unilatéralement leur femme de travailler en Côte d'Ivoire et au Mali. Dans l'ensemble, entre 1960 et 2010, plus de la moitié des restrictions au droit d'accès des femmes à la propriété et à leur capacité à accomplir des actes juridiques ont été supprimées dans les 100 pays examinés. Dans trois régions (Afrique subsaharienne, Amérique latine et Caraïbe, et Asie de l'Est et Pacifique), celles-ci ont été réduites de moitié alors que les régions d'Asie du Sud, du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord présentent les performances les plus faibles, même si elles ont levé certaines restrictions. Cette tendance a fait dire à Augusto Lopez-Claros, directeur du département «Indicateurs mondiaux et analyses», au groupe Banque mondiale, «les progrès vers l'égalité des sexes devant la loi s'accélèrent, nos données montrent qu'au cours des cinquante dernières années, partout dans le monde, les pays ont commencé à lever des restrictions établies de longue date qui limitaient la capacité des femmes à participer pleinement à la vie économique». Selon le responsable, bien que ce processus ne soit pas uniformément appliqué dans le monde entier, «il est généralement admis que l'émancipation économique des femmes est essentielle à la compétitivité et à la prospérité». Le rapport insiste sur le fait que «moins l'égalité des sexes est établie en droit, moins les femmes accèdent à la propriété des entreprises» alors que les politiques encourageant les femmes à rejoindre le marché du travail et à y rester se traduisent par une égalité accrue des revenus. De ce fait, s'il existe certes des signes encourageants d'amélioration des perspectives économiques des femmes partout dans le monde, de nombreux pays peuvent faire mieux pour assurer la participation des femmes à la vie économique. Avantages macroéconomiques Le rapport Banque mondiale/IFC n'est pas sans rappeler une autre étude publiée quelques jours plutôt par le Fonds monétaire internationale (FMI) sur les avantages macroéconomiques de la promotion de l'égalité des sexes. Pour le FMI, les défis liés à la croissance, à la création d'emplois et à l'inclusion sont intimement liés alors que la croissance et la stabilité sont nécessaires pour ouvrir les débouchés dont les femmes ont besoin. «Leur participation au marché du travail est elle-même un gage de croissance et de stabilité», a souligné le FMI qui prend comme exemple le fait que dans les pays qui affichent un rapide vieillissement démographique, une participation plus forte de la femme au monde du travail peut atténuer l'impact du repli de la population active et partant doper la croissance. De ce fait, «l'amélioration des perspectives professionnelles des femmes peut également contribuer à élargir le développement économique dans les pays en développement, notamment grâce à une plus forte scolarisation des filles». Le FMI qui s'est plus axé sur les dimensions d'importance macroéconomique de la participation de la femme au marché du travail, a également analysé l'impact des contraintes qui l'empêchent de mettre en valeur son véritable potentiel économique, et des politiques qui pourraient lever ces obstacles. «Les initiatives propres à supprimer les distorsions, qui pèsent sur le marché du travail et à promouvoir l'égalité des chances, permettront aux femmes d'exploiter leur potentiel et de participer de manière plus visible à la vie économique», a plaidé le FMI en guise de conclusion.