«Le risque pénal du chef d'entreprise» était le thème d'une conférence organisée par l'IUC. Les débats ont été animés par Pr Najia Msefer Kadiri, responsable de la filière de droit des affaires, et le Pr Vanessa Perrocheau, docteur en droit privé et sciences criminelles, enseignante à la Faculté de droit de Saint-Etienne et intervenante à l'UIC. «Nul n'est censé ignorer la loi». L' adage rappelle à l'ordre des chefs d‘entreprises confrontés à «leur responsabilité pénale» sur certaines affaires. La modernisation du droit marocain des affaires, illustrée par la réforme du droit des sociétés et du code de commerce, met l'accent sur la responsabilité pénale du chef d'entreprise. La conférence organisée par l'Université internationale de Casablanca (UIC), cette semaine, tombe à point nommé. Abus de de biens sociaux et banqueroute sont deux domaines relevant de la responsabilité pénale du chef d'entreprise. Le Pr Najia Msefer Kadiri, responsable de la filière de droit des affaires à l'UIC, a reçu le Pr Vanessa Perrocheau, docteur en droit privé et sciences criminelles, enseignante à la faculté de droit de Saint-Etienne. Pour une première définition, le risque pénal est «le risque pour le dirigeant d'entreprise d'être reconnu pénalement coupable et de se voir infliger une sanction matérialisée par un emprisonnement, une peine avec ou sans sursis, une peine d'amende, une interdiction d'exercer des fonctions, ou encore une exclusion des marchés publics. Ces mêmes risques de sanction pénale peuvent être néfastes et entraîner des dommages collatéraux qui touchent la réputation et l'image de la société, ce qui peut constituer une source de traumatisme psychique pour les chefs d'entreprise qui affrontent ce type de situations. L'identification Le patron doit rester informé sur le plan juridique, en mettant en place des outils adéquats de veille et d'intelligence juridique. Ce travail passe par l'élaboration des codes et procédures de bonne conduite ainsi que la mise en place d'un cycle de formation pour l'ensemble du personnel. L'audit juridique des risques pénaux est, selon les juristes spécialisés, indispensable pour connaître l'ensemble des risques auquel s'expose l'entreprise: les risques ou infractions intentionnelles prévues par le droit du travail, le droit des sociétés, le droit de la consommation et les délits non intentionnels comme l'homicide involontaire causé par des accidents de travail dans des circonstances qui révèlent l'imprudence et la négligence de l'employeur. «Le droit pénal des affaires a une source prétorienne, et la jurisprudence a échafaudé une construction juridique concernant la responsabilité pénale du chef d'entreprise pour des infractions commises par le préposé, mais qui toutefois laissent apparaître une faute du dirigeant et surtout la non-délégation de ses pouvoirs», explique Vanessa Perrocheau. La prévention Un chef d'entreprise doit savoir déléguer quelques-uns de ses pouvoirs. Cette action s'avère être le moyen le plus utilisé pour le dirigeant d'entreprise de prévenir le risque d'engager sa responsabilité pénale. Selon les juristes, le critère principal pour admettre la délégation comme un moyen efficace de ne pas engager sa responsabilité pénale est de ne pas empiéter sur les pouvoirs du délégataire. Plus concrètement, le délégataire doit avoir la compétence, l'autorité et l'autonomie nécessaires pour s'acquitter des missions qui lui ont été assignées La gestion L'exonération de la responsabilité pénale par la preuve de l'absence de faute pénale ouvre une brèche au chef d'entreprise pour se désengager de toute responsabilité. La loi française du 10 juillet 2000 a dépénalisé un certain nombre de comportements en matière de faute non intentionnelle. Désormais, lorsque le comportement n'est qu'en lien indirect (l'existence d'un facteur médian) avec la survenance du dommage, la simple faute de négligence ou d'imprudence ne permet plus d'engager la responsabilité du chef d'entreprise. Seule une faute qualifiée permet de condamner ce dernier pénalement. Ainsi, lorsque le chef d'entreprise est poursuivi pénalement, la stratégie adoptée est alors de contester le caractère direct du lien de causalité, et d'invoquer si ce n'est l'absence de faute, tout au moins l'absence de faute qualifiée.