La Commission européenne vient de dévoiler les détails de son rapport 2013 sur l'évolution de l'emploi et de la situation sociale en Europe. Ce dernier relève une hausse de l'emploi non déclaré face auquel la Commission européenne déploie son arsenal. Un fléau de l'économie informelle qui n'est pas sans rappeler la situation du Maroc, qui doit rapidement tracer sa propre stratégie. La Commission européenne vient de dévoiler son rapport 2013 sur l'évolution de l'emploi et de la situation sociale en Europe (ESDE). Cette étude, effectuée auprès de 26.563 personnes, met en exergue «l'ampleur globale du travail non déclaré». En 2013, plus d'un Européen sur dix (11%) avoue «avoir acheté des biens ou des services ayant impliqué le recours au travail non déclaré», note-t-on dans le rapport. 4% des personnes interrogées admettent avoir exercé une activité rémunérée non déclarée et 3% des répondants déclarent avoir été payés «en partie en espèces par leur employeur (de la main à la main)». Un bilan qui n'est pas sans rappeler la situation du Maroc. Selon les dernières informations officielles disponibles, une bonne partie des travailleurs dans le secteur privé ne serait pas déclarée toute l'année. Plus encore, un grand nombre d'indépendants ne se déclarent pas et ne déclarent pas de ce fait leurs salariés. Dans une approche chiffrée, ce sont environ 700.000 salariés du privé non couverts que la CNSS relevait en décembre 2013, dont les salariés du monde agricole, et ceux non déclarés par leurs employeurs, ces derniers ne bénéficiant pas de couverture sociale. Le taux de couverture sociale au niveau du secteur privé assuré par la CNSS était de 77% en 2012. La question qui se pose alors est de savoir comment pallier à ce fléau qui touche aussi de plus en plus les pays européens. Pour y répondre, mieux vaut déterminer les causes inhérentes à ce problème, à savoir la crise économique qui touche l'ensemble de la région. Dans une approche pragmatique de son côté, la Commission européenne annonce le lancement d'une «plateforme européenne sur la prévention et la dissuasion du travail non déclaré, laquelle renforcerait la coopération entre les inspections du travail et les organismes chargés de l'application de la législation, dans l'ensemble de l'Europe». Une approche qui pourrait inspirer de l'autre côté de la Méditerranée dans la mesure où les raisons invoquées par les répondants de cette même étude européenne démontrent que 60% des répondants justifient leurs achats de biens ou de services non déclarés principalement par leur coût moins élevé. 50% des répondants mentionnent comme raison principale les avantages du travail non déclaré pour les deux parties, 21% invoquent la difficulté à trouver un emploi régulier, 16% citent une charge fiscale trop élevée et 15% font état de l'absence d'autres revenus. La difficulté à trouver un emploi régulier et l'absence d'une autre source de revenu sont les raisons plus particulièrement avancées par les Européens du sud (respectivement 41% et 26%). Des raisons communes À raisons communes solutions identiques. D'ailleurs la question du travail au noir et de l'économie informelle est au cœur des débats aujourd'hui au Maroc. Le patronat a de ce fait saisi une nouvelle occasion cette semaine pour en appeler au déploiement d'une stratégie nationale de lutte contre l'informel. Ce dernier a d'ailleurs saisi l'occasion de l'annonce des principaux axes du rapport sur la compétitivité des entreprises pour monter de nouveau au créneau. Du côté des autorités, il semblerait qu'au fur et à mesure des années le secteur informel ait fini par être indirectement admis, du fait qu'il participerait activement à la lutte contre la pauvreté. Au-delà des marchands ambulants et autres vendeurs à la sauvette, il s'agit de nombreuses fabriques et usines qui adhèrent au «système» informel. Plus encore, l'informel a, selon certains analystes, «besoin du formel pour prospérer à ses dépens et les avantages qu'il tire de l'illégalité cesseraient s'il prenait toute la place de l'économie légale». Si la célèbre loi du financier anglais Thomas Gresham «la mauvaise monnaie chasse la bonne» prend tout son sens, une autre théorie, qui avance l'idée selon laquelle «l'économie parallèle se tracera à elle-même ses propres limites», ne pourra pas rassurer le patronat. Il est aujourd'hui presque inéluctable qu'une lutte sans merci contre un fléau dévastateur se mette en place. Rappelons qu'un ministère proprement dit a été créé en partie pour gérer cette question de «lutte contre l'informel». Reste à mettre en place une stratégie dédiée. Celle-ci devra s'inspirer de ces méthodes mises en place par nos voisins européens, qui semblent d'ores et déjà avoir pris les choses en main.