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Ressources naturelles : Le grand pillage
Publié dans Les ECO le 13 - 05 - 2014

Le rapport 2014 de l'Africa Panel Progress présente les montants importants que perd le continent chaque année. Le pillage organisé des ressources naturelles du continent plombent son développement et maintient les Africains dans une situation de pauvreté permanente. Pour le panel, il est grand temps de mettre fin à ce bradage afin que les sommes perdues soient affectées aux investissements.
Le rapport 2014 de l'African Progress Panel (APP) est très accablant. L'Afrique perd chaque année des milliards de dollars en raison du pillage de ses ressources naturelles et des flux financiers illicites, ce qui est de nature à plomber le développement du continent, alors que celui-ci affiche pourtant des taux de croissance parmi les plus prometteurs du monde. Pour cette édition, l'APP, un think tank que dirige l'ancien secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, a mis l'accent sur le potentiel dont regorge le continent en matière de ressources naturelles. Intitulé «Céréales, pêche et capitaux : financer la révolution verte et la révolution bleue de l'Afrique», les auteurs du rapport ont démontré que les abondantes ressources naturelles de l'Afrique représentent une occasion unique d'améliorer considérablement la vie des citoyens africains. Cependant, relève le document, «ces ressources sont trop souvent pillées par des fonctionnaires corrompus et des investisseurs étrangers».
De même, la hausse des inégalités empêche aussi l'Afrique de saisir cette opportunité. «Après plus de dix années de croissance, il y a matière à se réjouir» a souligné Kofi Annan lors de la présentation du rapport il y a quelques jours. Pour l'ancien diplomate, «il est temps de se demander pourquoi une telle croissance n'a que si peu contribué à sortir la population de la pauvreté, et pourquoi une si grande partie des richesses naturelles de l'Afrique est gaspillée dans des pratiques de corruption et des activités d'investissement peu scrupuleuses». Le rapport démontre que, bien que le revenu moyen ait augmenté d'un tiers ces dix dernières années, il y a davantage d'Africains qui vivent dans la pauvreté aujourd'hui -environ 415 millions- qu'à la fin des années 1990. Le rapport 2014 de l'APP ne fait pas seulement dans la critique. Sur la base des observations contenues dans le rapport, ses auteurs ont recommandé aux dirigeants politiques africains de prendre dès maintenant des mesures concrètes afin de réduire les inégalités en investissant dans l'agriculture. Selon les membres de l'APP, l'agriculture constitue la clé pour une croissance qui réduira la pauvreté.
«En Afrique, la plupart des pauvres vivent et travaillent dans des zones rurales, généralement en tant que petits exploitants agricoles», ont justifié les auteurs du rapport qui ont également incité la communauté internationale à soutenir les efforts de développement de la région. «Il y a en Afrique une résilience et une créativité extraordinaires», a affirmé Kofi Annan, en prenant comme exemple les jeunes, de plus en plus nombreux et énergiques, ainsi que les entrepreneurs, très dynamiques. «Il est temps pour les dirigeants africains de libérer ce potentiel considérable», a estimé l'ancien secrétaire général de l'ONU.
Flux financiers illégaux : 50 milliards de dollars perdus chaque année
Chaque année, ce ne sont pas moins de 50 milliards de dollars que le continent perd (en moyenne) en raison des flux financiers illégaux. Selon le rapport de l'Africa Progress Panel, cela représente 5,7% du PIB de la région, le plus fort taux au monde. Il est de 3,5% pour la région MENA, 4,1% pour l'Asie et 4,5% l'Europe centrale et orientale. Selon les estimations faites dans le rapport, les montants extraits chaque année de manière illégale des pays d'Afrique subsaharienne dépassent en volume les investissements publics consacrés à la santé par l'ensemble des pays concernés. En plus des pertes subies à cause du pillage des ressources naturelles et d'une mauvaise gestion financière, le rapport souligne que «les Africains ne bénéficient pas pleinement de l'argent provenant de l'extérieur, que ce soit quand certains donateurs de l'aide ne respectent pas leurs engagements ou quand des membres de la diaspora africaine envoient de l'argent à leur famille en Afrique». Le continent perd ainsi près de 1,85 milliard de dollars par an en raison des frais excessifs appliqués par les sociétés de transferts d'argent sur ces envois.
Pêche illicite : un pillage de plusieurs dizaines de milliards
Selon le rapport de l'APP, la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, a atteint des proportions épidémiques dans les eaux côtières africaines. Les estimations faites à ce niveau font ressortir que les pertes annuelles s'élèvent à plus de 1,3 milliard de dollars, pour les seuls pays d'Afrique de l'Ouest. De même, l'Afrique perd également 17 milliards de dollars du fait des activités illégales d'abattage. «Au-delà du coût financier, ce pillage anéantit les communautés de pêcheurs en les privant d'opportunités essentielles en matière de pêche, de transformation et de commerce», ont estimé les auteurs du rapport pour qui le pillage des ressources naturelles est «un vol organisé sous couvert de commerce». Le rapport a par exemple démontré que certains chalutiers commerciaux opèrent sous pavillon de complaisance et déchargent leur pêche dans des ports qui ne consignent pas leurs captures, ce qui est contraire à l'éthique. Selon Kofi Annan, «ces activités criminelles aggravent le problème de l'évasion fiscale et des sociétés-écrans». De ce fait, le rapport 2014 sur les progrès en Afrique préconise un système multilatéral de gestion des pêches qui appliquerait des sanctions aux bateaux de pêche qui n'enregistrent et ne déclarent pas leurs captures.
Exploitation forestière illégale : 17 milliards de perte chaque année
L'exploitation forestière en Afrique est un autre fléau qui pénalise le développement du continent. Chaque année, les pays d'Afrique subsaharienne perdent en moyenne près de 17 milliards de dollars en raison de ce fléau qui ne cesse de prendre de l'ampleur dans le sillage de la hausse d'une demande émanant principalement des pays émergents. Pour l'APP, il existe pourtant des moyens de mettre fin à cette situation qui met en péril la vie de plusieurs communautés ainsi que leur environnement, en plus du manque à gagner pour l'Etat. De ce fait, les auteurs du rapport préconisent que les contrats de concession d'exploitation forestière commerciale soient rendus publics, ainsi que la structure de propriété effective des entreprises en question. «Les concessions doivent être délivrées avec le consentement éclairé des communautés concernées, sur la base d'une présentation claire et exacte des coûts et avantages potentiels», recommande également le rapport.


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