Près de 75% des automobilistes marocains entretiennent encore leurs véhicules auprès des mécaniciens et réparateurs indépendants. C'est dire tout le potentiel du business de l'après-vente chez les importateurs représentant les différentes marques d'automobiles. Strictement axées sur l'après-vente, les études menées par le groupement interprofessionnel de l'automobile (GIPA) révèlent bien des choses sur le comportement des automobilistes concernant l'entretien et la réparation de leurs véhicules. Selon les derniers chiffres en date (2012) publiés par cet organisme, les entrées ateliers recensées auprès des différents importateurs de marques automobiles, ne dépassent pas les 27% dans le meilleur des cas, soit durant les deux premières années de la mise en circulation d'un véhicule neuf. Un taux qui s'explique par le fait que la garantie constructeur «saute» dès lors que le véhicule est réparé ou vidangé en dehors du réseau de la marque à laquelle il appartient. Ce même taux chute à 10% pour les véhicules âgés de 3 à 4 ans et même à 4% pour ceux ayant 5 à 9 ans, avant de s'anéantir entre 0 et 1% pour le parc vieux de 10 ans et plus. À l'opposé, le circuit des mécaniciens et réparateurs automobiles (ou MRA, selon la dénomination retenue dans le jargon du GIPA) reste leader sur les entrées en ateliers, quel que soit l'âge du véhicule avec un taux moyen de 75% ! En d'autres termes, le garagiste du coin se taille encore la part du lion dans le business de la réparation automobile au Maroc. Encore plus édifiant, le classement dressé par le même cabinet d'études place le Maroc en queue de liste, parmi 20 pays comparés en matière de taux d'entrées en ateliers constructeurs pour ce qui est du parc auto âgé de 10 ans, avec un indice de 125, alors que celui-ci grimpe à 447 pour l'Allemagne, 483 pour la France et même 602 pour l'Inde. Que faut-il en déduire ? Au moins deux idées clés : d'une part, la difficulté à attirer les clients vers les SAV des marques et à les fidéliser, puis d'autre part, tout le potentiel commercial (et de profitabilité) que recèle le business de l'après-vente chez les importateurs représentant les différentes marques automobiles. Un précieux sésame... Pourtant, tous les importateurs disposent d'un bien inestimable : la base de données relative à leurs clients. Sauf que pour l'exploiter, des ressources humaines doivent être mobilisées à travers des départements spécialement affectés à ce sujet et notamment le marketing après-vente et le CRM (pour Customer Relationship Management), anglicisme de plus en plus courant qui renvoie à la gestion de la relation client. Préalablement à cela, les importateurs et leurs concessionnaires ont compris que pour attirer le client, il fallait d'abord revoir les aspects infrastructurels. Les réseaux principaux de Renault Commerce Maroc, de Fiat Group Automobiles Maroc, d'Auto Hall (Ford, Mitsubishi), de Toyota du Maroc, de Global Engines (Hyundai), ou de la CAC (Terminal Audi, Centre Porsche Maroc), pour ne citer que ces labels, qui illustrent parfaitement cette prise de conscience, de par leurs états revigorés et en conformité avec des standards internationaux. L'état des lieux, la qualité de l'accueil, la réactivité des équipes et la transparence des opérations sont autant d'aspects auxquels les clients ne sont pas insensibles, surtout lorsqu'une offre adaptée et bien «marketée» est mise en avant avec une certaine visibilité. L'importateur de Peugeot et de Citroën (Sopriam) en sait quelque chose, ayant d'ailleurs réussi à doubler ses «entrées-ateliers» durant ces trois dernières années et ceci après avoir proposé une série d'offres packagées sur différents organes d'usure (pneus, plaquettes de frein, balais d'essuie-glace). Ce n'est pas sorcier... Pourtant, «amener le client à réparer sa voiture dans l'atelier d'une marque ne relève pas de l'impossible», nous confie un analyste indépendant travaillant pour le compte d'une marque. «Ce n'est pas sorcier», poursuit-il avant d'argumenter qu'«il suffit de rappeler aux automobilistes les révisions et opérations à faire, tout en leur proposant une offre de prix à même de les faire venir ou revenir dans les ateliers, le tout avec le concours d'un logiciel dédié et le suivi des équipes du CRM». Dans un schéma logique et rationnel, lorsqu'un client appelle pour prendre un rendez-vous, sa requête et les données y afférentes sont répertoriées dans le logiciel. Un email ou un SMS lui est envoyé automatiquement la veille du rendez-vous. À ce stade, la marque ou la «maison» comme on dit chez nous, marque déjà un point aux yeux du client. Quand arrive le jour de la visite au service après-vente pour un entretien régulier comme la vidange, le technicien qui réceptionne le véhicule fait un tour dudit véhicule en présence du client à qui il doit expliquer et argumenter (pour convaincre) que d'autres organes vitaux, comme les pneus ou la courroie de distribution doivent être changés à court ou moyen termes. Ces conseils seront ensuite mentionnés sur la fiche client et seront pris en compte à une certaine échéance fixée le même jour. Il ne restera plus qu'à relancer le client au moment opportun en lui adressant un e-mail ou un courrier écrit, accompagné d'un bon de réduction. Enfin, il reste la question du coût d'entretien que certains trouvent onéreux, lesquels sont peu enclins à consentir et investir sur une voiture ayant plus de cinq ans. À ce sujet, les filiales marocaines de Renault et de Fiat ont trouvé la parade avec respectivement les réseaux Motrio et Checkstar (Magneti Marelli). Le premier propose des produits positionnés 30 à 40% moins chers que ceux d'origine comme par exemple des pneus à partir de 599 DH (montage inclus). Le second va plus loin avec un vaste choix d'organes adaptables à différentes marques, mais non moins inférieures en qualité. Une chose est sûre : avec l'évolution grandissante de l'électronique embarquée et la complexité du contenu technologique des voitures actuelles, le garagiste du coin sera de moins en moins capable de dispenser les réparations adéquates. Du coup, ce métier devra se réinventer, tandis que parallèlement, une voie royale s'ouvre devant les importateurs automobiles pour doper leur business en après-vente. Charge à eux d'en tirer pleinement profit, au sens le plus littéral du terme.