Après un retard de plus d'un an, le premier contrat d'application de la stratégie logistique 2010-2015 sera signé aujourd'hui (www.lesechos.ma). La signature de ce dernier, qui porte sur la régulation et la mise à niveau du transport routier de marchandises, engagera d'une part la Fédération nationale du transport routier, la CGEM, les associations de transporteurs et, d'autre part, le gouvernement. Or, pour certains opérateurs, des problèmes pourraient fort bien bloquer cette mise à niveau que se fixe comme objectif le contrat-programme. C'est le cas par exemple de la mise en place de l'observatoire des transports routiers, laquelle ne sera effective que vers juin 2013, soit deux ans après l'entrée en application du contrat-programme. Cela risque, selon des professionnels, de faire perdurer l'anarchie qui sévit dans le secteur. À ce niveau, ces mêmes opérateurs appellent à la création d'un Conseil national des transports qui sera plus à même de réguler le secteur qui est actuellement atomisé. Autre problème : pour la signature de ce contrat, le ministère des Transports (MET) a fait appel aux associations, en sus de la Fédération. À titre d'exemple, rien que pour le port de Casablanca, six associations ont été invitées à apposer leurs signatures, soit une association par porte, sachant que l'enceinte portuaire comprend cinq portes, dont une qui sera créée dans moins d'un mois, avec l'entrée en service de la desserte nord. «Or, parmi les associations signataires de ce contrat, figurent des structures qui sont toujours dans l'informel, ce qui revient à les légitimer», affirme un opérateur. Pour ce dernier, ces associations doivent, pour la bonne exécution du contrat, élaborer un programme et une méthodologie d'exécution. Elles doivent aussi accepter d'être encadrées par la Fédération. D'ailleurs, l'engagement de cette dernière et celui de la CGEM va dans le sens de la mise à niveau du secteur. Ce n'est pas tout, le non aboutissement total du programme de renouvellement du parc (prime à la casse) risque à son tour d'être un obstacle à la mise à niveau des entreprises. Le problème à ce niveau réside principalement dans l'accès au crédit. Les banques sont toujours réticentes quant à son octroi, et ce en application des règles prudentielles. Cela étant, le contrat-programme de transport de marchandises s'articule autour de sept axes principaux, avec des actions précises et des modalités de mise en œuvre. Renforcement de la structuration du secteur Pour le premier axe relatif au renforcement de la structuration du secteur, le contrat prévoit de mettre à niveau les conditions d'accès vers la fin de cette année. Cette démarche devra se faire par la révision de l'arrêté du ministère des Transports du 23 mars 2003, relatif aux conditions de satisfaction, à la capacité financière et à l'aptitude professionnelle. Cette tâche reviendra au ministère de tutelle, avec la contribution de la profession. Il s'agira également de réviser la procédure de délivrance des carnets de circulation des véhicules, en amendant l'arrêté du 23 mars 2003 relatif à la délivrance de ces carnets. C'est le MET qui se chargera de cet amendement, avec la contribution des opérateurs. La restructuration du secteur comprend aussi l'incitation au groupement des sociétés et la création d'entreprises de commissionnement régionales. Pour ce faire, il faudra engager un consultant au niveau de chaque province via la signature de conventions, le but étant d'apporter une assistance et un encadrement pour le montage de ces projets. Le financement de ce volet reste à la charge de la profession, avec la contribution de l'Office de développement des coopératives (ODECO) et le ministère. Pour la réalisation de cette action, le contrat a instauré un échéancier qui prendra fin en juin 2012. Le secteur est appelé par ailleurs à développer la formation via l'achèvement, vers fin 2011, de la réalisation de l'étude stratégique relative à ce volet. Pour cette action, il sera nécessaire de signer, durant le 1e trimestre 2012, un avenant au contrat-programme afin d'intégrer les recommandations de l'étude. C'est le MET qui est concerné par cette action laquelle sera financée par le FART (Fonds d'accompagnement de la réforme du transport), avec la contribution des ministères concernés et de l'OFPPT... Entre 2012 et 2013, le secteur devra mettre à niveau les capacités managériales des responsables des entreprises en mettant en œuvre des programmes régionaux de formation (1.000 personnes par an). Le financement sera assuré par la profession, et le MET avec l'OFPPT contribueront à ces programmes. L'ANPME sera aussi impliquée dans cette action, via une convention pour la mise en œuvre du programme «Taehil» au profit des TPE et PME. Cette action, qui devra être concrétisée en juin 2012, sera financée par la profession. Pour les normes de transport de marchandises dangereuses, il va falloir les mettre en harmonie avec les normes ADR en élaborant des textes de loi et en introduisant des véhicules TMO au niveau des réseaux des centres techniques (3 centres spécialisés par réseau). Il faudra également mettre à la disposition des transporteurs, des conseillers à la sécurité dans les TMO. La date d'échéance a été fixée pour décembre 2012. À partir de juin 2012, le ministère des Transports devra opérationnaliser l'utilisation du manifeste de fret, et la profession devra créer une société de services dédiée aux transporteurs. Autre grand chantier : l'accompagnement des transporteurs dans le processus d'éligibilité à la catégorisation, en tant qu'opérateurs économiques agréés (OEA). Cette opération, qui sera prise en charge par la profession avec la contribution du MET, se fera par l'organisation de séminaires au profit des opérateurs TIR et de logistique pour les inciter à décrocher l'agrément OEA. Amélioration de l'environnement juridique des entreprises Pour le deuxième axe (amélioration de l'environnement juridique des entreprises), le contrat prévoit d'encadrer les relations contractuelles entre les différents intervenants du secteur, notamment en élaborant le complément des contrats types de transport, de location et de sous-traitance. L'échéance a été fixée à décembre 2012. Le secteur verra également s'institutionnaliser le principe du délai maximal de paiement, un principe qui actuellement lui fait largement défaut. D'autres principes seront aussi introduits. Il s'agit du privilège du transporteur sur la marchandise en cas de paiement du prix, de la notion de l'action directe, et de la précision de la valeur maximale de remboursement supportée par le commissionnaire ou le transporteur en cas d'avarie ou de manquement de la marchandise (exprimée en kg brut). Compétitivité des entreprises Pour améliorer la compétitivité des entreprises (3e axe), la profession devra éradiquer la pratique du dumping des prix dans le secteur en publiant régulièrement une note d'information sur l'actualisation des coûts de référence. Cette action s'inscrit dans la continuité et sera menée par le FART. Elle sera accompagnée d'une campagne de communication sur l'importance des coûts de référence lors de la négociation du prix de transport. Les autres actions à ce niveau comprennent l'instauration du gasoil professionnel, la création d'un indice spécifique à ce carburant (Loi de finances 2012), et la mise en place d'un système d'imposition forfaitaire par camion pour les entreprises de petite taille (décembre 2012). Développement du TIR Le développement du transport international de marchandises par route est également prévu dans le contrat-programme (axe 4). Il s'agit d'améliorer la contribution de la flotte marocaine via la réalisation d'une étude sur cette branche qui sera financée par le FART (juin 2012). Les recommandations de cette étude seront intégrées dans un avenant au contrat-programme (décembre 2012). En parallèle (échéance en décembre 2012), il sera procédé à l'encadrement de l'attraction des semi-remorques étrangères (procédures, modèles de contrat de coopération et de contrat de sous-traitance). Par ailleurs, la responsabilité en cas d'interception de véhicules TIR transportant des marchandises illicites sera définie. Cela passe par la clarification des dispositions du code pénal en la matière et la précision du transporteur de bonne foi (juin 2012). Le contrat prévoit aussi la mise à niveau des normes de transport des denrées périssables. À cet effet, la profession devra financer une étude pour la création de stations de contrôle ATP (2013). Amélioration du contrôle Le 5e axe prévoit la poursuite de la modernisation du contrôle (poursuite de la construction des stations fixes de pesage automatique), qui sera financée par le MET (6 stations en 2011 et 8 en 2013). Le ministère devra également mettre en place une équipe dédiée au contrôle des véhicules étrangers (contrôle du cabotage). Le contrôle technique mobile des camions sera assuré par des stations mobiles (2011). Enfin, un contrôle progressif des entreprises sera introduit. Le MET créera un corps de contrôleurs spécialisés dans ce contrôle (2012). Sécurité routière Pour la sécurité routière (axe 6), des aires sécurisées pour le repos des conducteurs seront construites. Cette réalisation sera précédée d'une étude qui déterminera la consistance et les sites d'implantation de ces aires. Une aire pilote sera construite en décembre 2011. À cela s'ajoute la mise en place d'outils pour assurer le contrôle des dispositions du nouveau Code de la route, concernant le temps de conduite et de repos des conducteurs. Environnement Enfin, le 7e axe, qui traite de l'environnement, prévoit l'élaboration d'une charte portant l'engagement des professionnels à la respecter (normes euro, émission CO2, conduite économique). Cette charte bénéficiera d'une campagne de communication (juin 2012). Le contrôle du respect de cet engagement se fera par l'observatoire national de l'environnement qui sera créé en juin 2013.