L'apport de l'activité minière, tant en matière de retombées économiques que de visibilité à l'international, est indéniable pour le Maroc. Un riche potentiel géologique assis sur une fiscalité des plus «séduisantes» de par le monde, font qu'aujourd'hui, les plus gros investisseurs mondiaux se bousculent au portillon des mines nationales. Sur le plan organisationnel du secteur, plusieurs chantiers sont ouverts afin de doter l'activité minière d'un cadre juridique et technique efficace et fluide. Or, les experts et cadres du secteur s'impatientent quant à l'aboutissement de ces chantiers et parlent d'un «manque de visibilité». Certains d'entre eux disent redouter qu'une telle situation n'altère la compétitivité de l'activité minière et son développement. Parmi les principaux dossiers, l'on revendique d'urgence l'aboutissement de la loi sur l'Office national des hydrocarbures et des mines (ONHYM). Non pas que la réforme de l'Office soit une finalité en soi, mais plutôt car les textes attendus incluent le «plan national de cartographie géographique». Une sorte de «sésame» pour le secteur, car le besoin de ce document s'impose pour la visibilité et la promotion de la couverture pétrolière et minière du pays à l'échelle internationale. Sur le gril L'historique de ce plan national de cartographie géographique (PNCG) remonte à plusieurs années depuis sa mise en place en 1997. À l'époque, le plan en question était «géré» par une direction centrale en coordination avec des unités régionales. À l'arrivée de Mohammed Boutaleb en tant que ministre de l'Energie et des mines, la décision avait été prise de dissoudre ces unités et de les remplacer par des directions régionales. Ledit plan national de cartographie se retrouvant orphelin, le gouvernement avait trouvé judicieux d'en confier la gestion et le suivi à l'ONHYM. Un projet de loi a ainsi été conçu dans ce sens et a franchi tout le circuit d'adoption légal, jusqu'à être validé par la Chambre des conseillers. Hasard de calendrier, un nouveau gouvernement a pris les commandes à la suite du 25 novembre 2011, faisant que le texte a dû attendre la validation par le nouveau Conseil de gouvernement. Depuis, le projet de loi est toujours attendu pour officialiser le transfert du plan national de cartographie géographique dans le giron de l'ONHYM. Aujourd'hui, la question n'est pas tranchée et auprès du ministère de tutelle, l'on explique qu'«effectivement, il était question d'abriter le Plan national de cartographie géologique(PNCG) au sein de l'ONHYM. Cependant, d'autres idées ont également émergé, basculant entre la création d'une agence dédiée à la production cartographique et le maintien du PNCG au sein de l'administration chargée des mines», comme le signale le ministre de l'Energie et des mines, Fouad Douiri. Cela étant, «aujourd'hui, près de 5 cartes géologiques seulement sont établies dans le secteur, alors qu'en principe, il faudrait en produire au moins une dizaine», commente cet expert géologue au sein du ministère. Cette situation renvoie justement à une autre doléance qui est celle des ressources humaines. En ce sens que pour établir une dizaine de cartes géologiques par an, une grande mobilisation est de mise. «Les géologues se font de plus en rares au Maroc», se désole notre source. Ce à quoi le ministre de tutelle répond qu'un «renforcement des ressources humaines et matérielles» est prévu. En effet, il s'agit de doter le secteur de moyens à même d'assurer son essor, en lien avec la rude concurrence sur les marchés internationaux, qui s'arrachent les investissements. «Si nous ne présentons pas des signaux forts à l'international, avec un outillage capable de séduire les investisseurs, nous passerons à côté de la relance du secteur», estime le géologue. «Certains investisseurs qui se présentent au Maroc ont besoin de visibilité», ajoute l'expert. Infrastructure Là n'est pourtant pas le seul enjeu de ce secteur, le Code minier étant l'autre chantier crucial en la matière. Après trente années d'allers et retours entre le département ministériel et le Secrétariat général du gouvernement, le projet de Code minier devant remplacer celui en vigueur depuis 1951 a pu arriver à la case Parlement il y a un an, une première ! L'exploit a néanmoins été «avorté», car à son arrivée à la première Chambre, le projet de Code ne contenait finalement pas de grands «chamboulements» et, de plus, le texte n'a pas encore bouclé la boucle de son circuit de validation. «Depuis un an, le texte a été retiré pour être étudié par la nouvelle tutelle», relate l'un des experts du secteur. La tutelle de son côté privilégie une démarche raisonnée en précisant que le projet en question est «en cours de finalisation» et que son dépôt dans le circuit de l'adoption devrait s'opérer au cours de cette année. Pour ce qui est de la stratégie minière, le retard a été accusé au moment de la conception même du cadrage de cette feuille de route sectorielle. Ayant accusé un retard considérable durant l'étape de son élaboration, la stratégie en question en était à près de 95% en novembre 2011 ( à près de 95%). «Des réunions sont tenues périodiquement pour faire le point sur certains des axes de cette stratégie, mais aucune deadline n'est aujourd'hui avancée», apprend-on du côté du ministère. Pour rappel, l'élaboration de l'étude liée à la stratégie minière avait duré plus que prévu, étant donné la complexité du domaine couvert par cette étude. Cette dernière, qui devait être ficelée en quatre ou cinq mois pour être livrée à la tutelle en juillet 2011, a débordé sur l'échéancier prévu. Ce couac a été suivi de la nécessité d'opérer des modifications sur le draft remis par le prestataire externe choisi par appel d'offres par le ministère. Aujourd'hui, les pièces du patchwork sont liées, puisque dans le cadre de l'élaboration de la stratégie sectorielle elle-même, l'infrastructure géologique doit impérativement être passée au crible. Pour cela, les réalisations du PNCG doivent être remises à plat, de même que l'évaluation de l'impact de ce plan sur l'exploration et la recherche minière et la délimitation des zones prometteuses pour la recherche et l'exploration minières. Au niveau de la tutelle, le ministre Fouad Douiri fait preuve de compréhensivité concernant l'impatience des professionnels et experts (voir interview). Le ministre y voit en effet une preuve de l'intérêt accordé à l'aboutissement de ces chantiers, «dont la mise en œuvre aura, sans nul doute, des retombées bénéfiques sur l'ensemble de l'industrie minière nationale, ainsi que sur le développement de nos régions», commente-t-il. Compétitivité oblige ! La question cruciale qui se pose en abordant le sujet des retards enregistrés pour la finalisation du cadre général du secteur-construit notamment sur les piliers du Code, de la stratégie et du PNCG- est celle de la compétitivité du Maroc à l'égard du marché international. «La sphère internationale est actuellement à l'aube d'une phase de relance des cours, après une certaine accalmie marquée pendant quelques mois. C'est donc durant ces périodes que les opérateurs réétudient leurs investissements et que les pays affûtent leurs approches de recrutement d'investissements», explique cet économiste. Or, dans le contexte actuel, les investissements dans le secteur connaissent une décélération certaine, depuis le pic atteint en 2009 (voir graphique).