Le Maroc perd des points dans la grande distribution. Le cabinet A.T. Kearney vient de rendre publique la version 2011 de son traditionnel Global Retail Development Index dans le monde et il en ressort que le royaume cède deux rangs comparativement à son positionnement de 2010 pour se retrouver 17e. De tous les pays de l'Afrique du Nord, le Maroc gagne tout de même un rang, devançant la Tunisie qui a chuté de 7 places (19e) mais reste derrière l'Egypte qui améliore son positionnement pour se retrouver 12e. Ce classement consacre, pour rappel, les pays que A.T. Kearney juge intéressants comme cibles pour les investisseurs internationaux dans le domaine. À ce titre, contrairement à 2010 où les pays asiatiques accaparaient la tête de ce classement, cette année, ce sont les pays de l'Amérique latine, le Brésil à leur tête, qui sont désormais considérés comme les principaux relais de croissance. Le Maroc, lui, n'a finalement rien à envier aux autres marchés puisqu'il se retrouve dans le top 20. Cette performance, il la doit notamment à un faible risque pays et un marché loin d'être saturé. Selon les experts du cabinet, le commerce de détail représente au royaume 13% du PIB national et présente un potentiel de croissance de 5% par an sur les prochaines années. Cette performance serait soutenue par la croissance du secteur du tourisme qui représente un facteur majeur de la croissance de la consommation, ainsi que par le développement continu des nouveaux canaux de distribution. Cependant, là où le bât blesse, c'est que le Maroc reste un pays où le niveau des dépenses de consommation par habitant demeure faible, comparé à la Tunisie par exemple. De plus, les modèles de distribution sont souvent qualifiés de complexes. Cela dit, hormis ces deux facteurs cités par A.T. Kearney, d'autres paraissent aujourd'hui bien plus problématiques pour un plus grand essor du secteur, aussi important que soit le potentiel de croissance qu'il offre, loin derrière les plus grands pays émergents tels que la Chine ou le Brésil. Selon Oxford Business Group, par exemple, le secteur de la grande distribution, à l'instar de bien d'autres qui ne bénéficient pas de plans de formation ciblés, souffre aujourd'hui d'un manque de personnel qualifié. Dans la pratique, rares sont les enseignes qui répondent à ce déficit en intégrant des stratégies de formation de leurs personnels. Dans un cadre plus structurel, c'est surtout le déficit en infrastructure et en logistique qui fait la différence entre le Maroc et les pays du haut du classement de A.T. Kearney. Les prix trop élevés du foncier, son indisponibilité même dans certaines grandes villes du royaume, empêchent les opérateurs du secteur d'adopter des stratégies d'expansion agressive de leurs réseaux. Ceci étant, c'est loin de décourager certaines enseignes qui anticipent le fort développement du secteur à l'avenir. En effet, Si le Maroc a gagné des places dans le classement d'A.T. Kearney, c'est aussi parce qu'en 2010 le secteur de la grande distribution a connu une consolidation du positionnement des enseignes locales et une croissance significative. D'un côté, Metro Group, qui est entré sur le marché marocain en 1998, a accepté de vendre ses huit magasins à la chaîne Label'Vie. Certes, selon le cabinet de consulting, c'est la première fois que Metro sort d'un pays dans lequel il est installé. Cependant, ce deal est surtout pour donner à Label'Vie une nouvelle dimension afin de se positionner avec les leaders du secteur. En outre, le turc BIM a récemment annoncé son intention d'ouvrir environ 40 nouveaux magasins, afin d'atteindre un réseau global de 85 points de vente. La Chine et l'Inde toujours là Le Brésil collecte déjà les fruits de sa prochaine organisation de grands événements sportifs (Coupe du monde de football et Jeux olympiques). Selon le cabinet de consulting, il s'agit là de grandes opportunités appelant à une forte progression du secteur de la distribution. Le pays progresse de quatre rangs pour se classer en tête des pays les plus attractifs. Dans le détail, A.T. Kearney avance comme facteurs explicatifs une «croissance économique annuelle attendue à 5% pour les prochaines années, une densité de population élevée et fortement urbanisée, le bond des ventes au détail et les investissements en infrastructure prévus». Ceci étant, ce sont plusieurs pays de l'Amérique du Sud qui profitent d'une «reprise économique très rapide après la crise, avec notamment une croissance moyenne du PIB de 6% en 2010». Ces différents pays, estime A.T. Kearney devraient tous attirer, «dans un avenir proche, de nombreux investisseurs dans la grande distribution». Qu'en est-il donc de la Chine et de l'Inde, habituées aux premières places depuis dix ans ? «Ces deux pays demeurent bien évidemment des cibles incontournables», précise A.T. Kearney. Que ce soit à cause de la taille de leur population, de leur dynamisme économique ou de leur rythme d'urbanisation, ces pays restent toujours aussi intéressants pour les grandes enseignes de la distribution. Seul bémol, «la réglementation sur les investissements étrangers pour l'un, ainsi que le risque inflationniste et la compétition féroce pour l'autre», sont autant de facteurs limitatifs expliquant leur baisse d'attractivité relative.