C'est la dernière ligne pour la circulaire sur le très attendu dispositif sur le rapatriement des avoirs détenus par les Marocains à l'étranger. La circulaire devait en principe être publiée hier, selon l'annonce faite la semaine dernière par le directeur de l'Office des changes, Jawad Hamri, à l'occasion d'un séminaire organisé par Attijariwaffa Bank sur les détails de la réglementation relative aux programmes d'appui à l'export. Effectivement, hier dans la soirée, un cadre au niveau de l'Office des changes nous a confirmé que la circulaire était en instance de publication. «Le dispositif a été peaufiné et définitivement validé après une large concertation avec tous les acteurs concernés et bientôt la circulaire sera mise en ligne». Les réunions au niveau de l'instance mise en place par le gouvernement pour élaborer les différents aspects de cette nouvelle réglementation, se sont en effet succédé ces derniers jours, en vue d'en baliser la mouture. La publication de la dite circulaire s'inscrit dans le cadre des nouvelles dispositions introduites par la loi de finances 2014 et viendra ainsi mettre un terme au débat qui a suivi cette initiative introduite au dernier moment par le gouvernement. Les différentes interprétations des objectifs visés par le gouvernement ont versé dans une véritable polémique aux relents plus politiques alors que pour l'Exécutif notamment, le ministère de l'Economie et des finances qui chapeaute le processus, les enjeux sont véritablement ailleurs. Pour rappel, la question a fait l'objet de vifs échanges au niveau du Parlement entre le chef de gouvernement et l'opposition par rapport à l'amnistie qu'instaure cette loi pour ceux que certains qualifient «d'exilés fiscaux». Devoir national Il faut dire qu'au delà des considérations politiques qui ont pris le dessous sur cette affaire, pour l'Office des changes, il s'agit d'une initiative à but économique. L'essentiel est de permettre au Maroc de rapatrier les fonds détenus par les Marocains à l'étranger enfin, entre autres et particulièrement, «de reconstituer nos avoirs en devises», selon les mots mêmes de Jawad Hamri. Pour le directeur général de l'Office des changes, «le Maroc a un déficit structurel, d'où l'importance stratégique de la reconstruction des changes». «Il s'agit d'une question de devoir national et de souveraineté économique», a expliqué Hamri, s'appuyant sur le fait que le Maroc produit de la valeur ajoutée qu'il exporte et il est tout à fait normal que cela soit rapatrié, ne serait-ce que pour le financement des importations. À travers les détails de la circulaire, l'Office des changes s'inscrit dans le cadre de l'amélioration de la réglementation en matière de surveillance et de contrôle des avoirs extérieurs et ainsi renforcer la position extérieure du Maroc. L'un des objectifs prioritaires que vise le gouvernement pour le rééquilibrage des indicateurs macroéconomiques est justement la résorption du déficit extérieur du Maroc. À ce sujet, la tâche ne s'annonce pas du tout facile, ce qui a nécessité ces quelques aménagements de la réglementation, afin d'inciter les personnes concernées à se conformer aux dispositions légales. C'est d'ailleurs ce qui explique les consultations menées par l'Office des changes pour baliser les détails de la circulaire. Soutien aux exportateurs L'un des secteurs qui sera le plus concerné par cette nouvelle circulaire sera assurément celui des exportations. À ce sujet, au niveau de l'Office, on soutient que tout sera mis en œuvre pour ne pas impacter négativement les exportateurs marocains, alors que la réglementation est déjà qualifié de sévère et parfois même rigide. «Nous allons déployer tous les moyens pour rendre le cadre réglementaire encore plus attractif, a ajouté Jouad Hamri, qui a quand même tenu à reconnaître qu'il existe des raisons qui poussent certains opérateurs à se diriger vers «des paradis fiscaux». Ces derniers offrent, en effet, des avantages assez attractifs en matière de réglementation, notamment par rapport aux pays disposant de dispositifs normaux. Ainsi donc, l'Office va jouer sur tous les fronts afin de pouvoir accompagner les exportateurs marocains et permettre une utilisation efficace et efficiente des aménagements prévus par les dispositions légales en la matière. Les dés sont donc désormais jetés et il va falloir attendre d'ici quelques mois pour mesurer l'impact de cette circulaire. Selon les estimations faites par le ministère de l'Economie et des finances, ce n'est pas moins de 5MMDH qui sont visés pour intégrer les comptes de l'Etat. Cette somme a été jugée un peu maigre par certains analystes, au regard des incitations offertes. Cependant, l'essentiel va au delà du rapatriement de cette somme, puisque désormais l'initiative prise par le gouvernement s'inscrit dans le cadre d'une amélioration de la réglementation en vue de limiter l'impact de la fuite des capitaux dans l'aggravation du déficit commercial du Maroc et par la même occasion, soutenir les exportateurs marocains. C'est un aspect qui a été largement passé sous silence tout au long de la polémique, largement relayée par la presse, par rapport à cette affaire qui constitue l'une des mesures phares de la LDF 2014. En tout cas, pour l'heure, les échos relayés ici et là font état d'un intérêt manifesté par plusieurs personnes concernées par les critères déjà dévoilés, au niveau de certaines institutions financières de la place. Il s'agit d'un bon départ pour cette opération, même si cela ne garantit pas encore la réussite de l'opération. La loi de finances enfin effective La circulaire de l'Office des changes vient compléter les dispositions de la loi de finances 2014. Elle intervient, en effet, quelques jours après celle de la Direction générale des impôts (DGI) relative aux dispositions fiscales de la LDF 2014. Ces circulaires sont traditionnellement publiées en début d'année à la suite de l'adoption et de la publication de la loi des Finances. Pour cette année, la première à s'inscrire dans cette voie, c'est l'Administration des douanes et des impôts indirects (ADII), qui a publié dès le début de l'année, sa circulaire portant sur le détail des nouvelles dispositions douanières de la loi de Finances pour l'exercice 2014. Pour rappel, cette année, l'une des mesures phares de la circulaire de l'administration des douanes a été la levée du secret professionnel entre plusieurs organismes relevant, entre autres, du ministère de l'Economie et des finances. Il s'agit de l'ADII, de l'Office des changes, la CNSS ou la Trésorerie générale du royaume (TGR). Les nouveaux dispositifs prévus par la loi de finances 2014 sont donc en train de prendre corps avec la publication des différentes circulaires par les organismes habilités. Il s'agit d'une étape tout aussi cruciale pour le budget puisque ces réglementations s'inscrivent dans le cadre de la matérialisation des objectifs que s'est fixés le gouvernement à travers les grandes orientations de la loi de finances.