C'est comme si de rien n'était ! Le rythme avec lequel le chef de gouvernement mène les consultations pour la formation d'une nouvelle majorité devant aboutir par la suite à la formation d'un nouveau cabinet, ne semble pas prendre en compte l'urgence pour le gouvernement de prendre en charge plusieurs dossiers à caractère socio-économique. La lenteur qu'accusent les consultations est d'autant plus incompréhensible pour certains que le RNI a déjà donné son accord de principe pour intégrer la coalition gouvernementale. Après cinq rencontres entre les deux chefs de file du PJD et du RNI, rien de concret n'a été encore posé, alors même que les futurs alliés ne sont pas véritablement entrés dans le vif du sujet. La prochaine étape de répartition des postes ainsi que de la formation du nouveau cabinet s'annoncent en effet plus compliquée que les échanges entre Benkirane et Mezouar. Il convient de relever d'ailleurs que jusque-là, les rounds de consultations entre les deux responsables politiques ont été empreints de cordialité et de compréhension, ce qui ne se traduit pas dans les faits. À ce jour, aucune visibilité n'est donnée sur la suite des événements et selon plusieurs sources, les concertations ne vont reprendre qu'après les vacances du chef de gouvernement. Autant dire qu'on risque encore d'attendre quelques semaines avant de voir poindre le bout du tunnel de cette crise. La seule consolation donnée par Abdelilah Benkirane est la nomination d'un ministre intérimaire au département de l'Economie et des finances. Il s'agit là d'une manière de prendre les devants dans la préparation du projet de loi de finances 2014, qui accuse déjà un certain retard, puisqu'à ce jour, la lettre de cadrage n'a pas encore été envoyée aux différents responsables ministériels. Retard à l'allumage Dans un premier temps et alors que se manifestaient les premières inquiétudes sur un éventuel retard dans la préparation du budget pour le prochain exercice, le gouvernement s'est voulu rassurant. La lettre de cadrage qui devrait donner le coup d'envoi de l'élaboration du projet de loi a été annoncée pour fin juillet, puis reportée à la première semaine du mois d'août, mois qui se termine sans que la lettre ne soit envoyée aux ministres. Il est vrai qu'entre temps, le gouvernement était en vacances. La rentrée gouvernementale qui démarre en principe lundi prochain n'apportera visiblement pas de nouveautés, puisque le chef de gouvernement sera à son tour en mode congé pour quelques jours. Ces éléments pris en compte, il y a fort à parier qu'il faudra attendre les derniers jours de la première semaine du mois de septembre ou la deuxième pour voir la lettre de cadrage entrer dans le processus de la préparation des grandes orientations du budget. La crise que connaît le gouvernement, encore constitué de ministres démissionnaires qui n'assument que la gestion des affaires courantes, explique en partie ce retard et la prudence du chef de gouvernement. Cependant, selon le ministre délégué au Budget, les préparatifs de la loi de finances 2014 ont débuté depuis le mois de mars dernier. C'est ce qu'a d'ailleurs confirmé aux Eco le ministre de l'Emploi et de la formation professionnelle, Abdelouahed Souhail sur l'état d'avancement des préparatifs au sein de son département. Selon le ministre, «Tous les projets du département pour la prochaine année ont été définis, il ne reste plus que la lettre de cadrage pour arrêter définitivement la proposition du budget sectoriel». Dans l'ensemble, tous les autres ministres sont sur la même lancée, sauf que l'attente de cette lettre bloque le processus. Attentisme prolongé L'attentisme que provoque la situation actuelle se trouve surtout amplifié au regard de l'urgence de la situation, notamment sur le plan économique. Outre les décisions attendues pour assainir la situation économique, conformément aux engagements pris, le gouvernement à l'égard de ses différents partenaires, de nouveaux défis sont venus s'ajouter au contexte actuel. Avec la poursuite de la dégradation de la situation socio-économique et le retour de la détérioration des déficits budgétaires dans le sillage des menaces de l'envolée des cours des matières premières, le gouvernement aura la tâche assez compliquée. L'année 2013 a été certes sauvée par la bonne campagne agricole mais les perspectives pour 2014 sont peu reluisantes, ce qui nécessite une réaction adaptée du gouvernement. À ce sujet, les grandes lignes sont déjà connues. Il ne reste plus qu'à définir les mécanismes de mise en œuvre. Le FMI a déjà prévenu le gouvernement que la mise en œuvre de réformes structurelles pour rehausser la compétitivité demeure une tâche prioritaire. «Il sera nécessaire de surveiller attentivement et de maîtriser fermement les dépenses pendant le reste de l'année» à relevé l'institution de Bretton Woods qui tient le Maroc en laisse grâce à sa LPL (ligne de précaution et de liquidité), avant d'ajouter qu'il importe de continuer à «contenir la masse salariale et le coût global des subventions pour créer l'espace nécessaire à un meilleur ciblage des dépenses sociales et à une augmentation des dépenses en capital».