Après une mauvaise passe ces dernières années, la demande intérieure marocaine renoue avec un certain dynamisme depuis le début de l'année. Selon les principales prévisions, la tendance positive devrait se poursuivre jusqu'en 2014. Selon la dernière note de conjoncture de la Direction des études et des prévisions financières (DEPF), «la demande intérieure aurait maintenu une tendance positive en 2013, malgré le contexte international défavorable». Le constat a été également confirmé par le HCP qui s'appuie sur les statistiques du premier semestre ainsi que le bon comportement d'autres indicateurs qui expliquent ce bon comportement et inaugure un regain à court et moyen terme de la demande intérieure marocaine. Ainsi, en 2013, le HCP s'attend à une hausse de cette dernière à hauteur de 5% en volume alors qu'elle n'a été que de 2,4% en 2012. Selon les projections du HCP, la demande intérieure continuera à afficher la même tendance en 2014, avec cependant une contribution à la croissance du PIB moins importante que celle de l'année en cours. Ces perspectives sont de bon augure pour le gouvernement, grâce notamment à leur contribution à la croissance économique. Il est vrai que les causes directes qui expliquent ce nouveau souffle ne sont pas, pour l'essentiel, à mettre à l'actif du gouvernement qui tablait pourtant sur le soutien à la consommation pour redresser l'économie nationale. Cependant, celui-ci constitue un acquis de taille puisqu'il permettra de compenser l'essoufflement des autres composantes de la croissance du PIB. Perspectives relativement positives Selon les prévisions du HCP, ce comportement positif de la demande intérieure enregistrée cette année et pour 2014 est la conséquence de l'amélioration de la consommation des ménages «sous l'effet notamment de l'accroissement de leurs revenus induits par la performance de l'activité agricole». La DEPF confirme cela, et relève que la consommation des ménages, principal levier de la croissance économique nationale, bénéficie de la conjugaison de plusieurs facteurs, notamment la création de 126.000 emplois rémunérés au premier trimestre 2013. À cela s'ajoute la progression toujours positive de l'encours des crédits à la consommation qui ont accusé une progression de 6,5% en glissement annuel à fin mai 2013. La consommation des ménages a également profité de la réalisation d'une bonne campagne agricole et de la reprise des transferts des MRE, avec une hausse de 2,6% au deuxième trimestre 2013 après une baisse estimée à 3,7% à la même période. D'autres facteurs s'ajoutent également à ce bon comportement des indicateurs socioéconomiques, notamment la relative maîtrise des prix à la consommation et l'amélioration des recettes des IDE qui enregistrent une nette hausse de l'ordre de 27,2% à fin juin dernier. L'investissement public de ce fait a maintenu un relatif dynamisme en dépit de la coupe budgétaire opérée en mars dernier. Dans l'ensemble, le HCP estime que la contribution de la consommation des ménages à la croissance économique atteindrait 3,6 points en 2013 au lieu de 2,1 points en 2012. La contribution de la consommation des administrations publiques afficherait une baisse, passant de 1,4 point en 2012 à 0,6 point, et celle de la formation brute de capital fixe passerait de 0,8 point en 2012 à 0,2 point. La variation des stocks, en augmentation significative suite à l'amélioration de la production agricole, devrait afficher une contribution en hausse passant de -1,7 point en 2012 à 1,4 point en 2013, note le HCP. Au total, donc, la demande intérieure contribuerait pour 5,8 points à la croissance du PIB en 2013 au lieu de 2,7 points en 2012. En 2014, et d'après les projections établies par le HCP dans le budget exploratoire, la demande intérieure continuerait de soutenir la croissance économique nationale, mais avec moins de vigueur. La consommation des ménages devrait s'accroître de 2,5% en volume au lieu de 6% en 2013, et sa contribution à la croissance du PIB passerait de 3,6 points en 2013 à 1,5 point en 2014. La consommation des administrations publiques, de son côté, augmenterait de 3,2% en 2014 et consoliderait sa contribution à la croissance à hauteur de 0,6 point. Globalement, la consommation finale nationale devrait être en ralentissement, avec une hausse de 2,7% au lieu de 5,3% en 2013. Sa contribution à la croissance serait de 2,1 points au lieu de 4,2 points en 2013, établit le HCP. Débat actualisé Le bon comportement de la demande intérieure ne manquera pas de s'inviter au prochain débat sur la loi de finances 2014, notamment pour ce qui est du soutien à la demande intérieure que met en avant le gouvernement. En 2012, alors que celle-ci montrait des signes d'essoufflement, plusieurs spécialistes sont montés au créneau pour mettre en lumière les limites d'un modèle de croissance basé, entre autres, sur cette niche assez fragile au Maroc puisqu'elle dépend de facteurs conjoncturels. C'est ce qu'ont relevé, également, plusieurs notes économiques sur le Maroc bien que jusque-là et depuis les années 2000, le pari sur cette niche a permis au Maroc de consolider la résilience de son économie, même au plus fort de la crise économique mondiale. C'est ce qu'ont relevé les analystes de la banque d'affaires françaises Natixis qui constatent, dans une note économique sur le Maroc publiée en juillet dernier, que «le Maroc compte beaucoup depuis les années 2000 sur le dynamisme de sa demande intérieure. En 2008, tandis que dans le monde, la crise financière se transforme en crise économique puis en crise sociale, au Maroc, les dépenses des ménages assurent à elles seules 6,6 points de PIB». Cependant, les auteurs du document ont tenu à relever que «cette politique de soutien à la consommation menée par les autorités n'est cependant pas sans conséquences». En cause, la dégradation des finances publiques par le biais des subventions et le faible impact sur la croissance de l'économie, notamment la création d'emplois durables. Dans la même logique, BNP Paribas a récemment mis en lumière quelques alertes cette année, avec la baisse des recettes de la TVA. «Côté demande, la forte décélération des recettes de TVA à fin avril indique un fléchissement de la consommation des ménages, et ce malgré une inflation relativement bien maîtrisée», a souligné la banque française qui a également publié, en août dernier, une analyse économique de la situation actuelle ainsi que des perspectives pour l'économie marocaine. Il reste donc à espérer une détente des prix des matières premières et une bonne campagne agricole pour continuer à profiter de ce bon comportement de la demande intérieure.