Annoncés au préalable par un profit warning, les résultats au titre de l'exercice de Fertima sont en berne. La société de fertilisants cotée en bourse explique cette situation par un contexte difficile. Selon elle, l'activité a été perturbée par l'incidence des aléas climatiques de l'année 2012 ayant affecté entre autres la production des agrumes, et donc la demande en matière d'engrais. Par ailleurs, Fertima a connu des retards d'approvisionnement au cours du dernier trimestre 2012. En effet, la hausse de certains intrants d'engrais a conduit à une limitation des importations en raison du décalage entre le marché international et le marché local, ce qui a induit une baisse des ventes. Fertima a connu d'importantes difficultés au cours des dernières années. La société a toujours attribué ces contre-performances à un environnement sectoriel défavorable (difficiles campagnes agricoles, crise des matières premières, etc.). Petit rappel historique: en 2009, Fertima enregistrait une baisse de 13% de son chiffre d'affaires et une perte de 63 MDH. Suite à cette contre-performance, la société s'est lancée dans un ambitieux programme, celui-ci devant la positionner comme «intégrateur de solutions pour le monde agricole». Cet effort a porté ses fruits en 2010. Le chiffre d'affaires s'est élevé à 692,5 MDH, en hausse de 4%. Le résultat net s'améliore de 58 MDH, mais il reste négatif à -5,8 MDH. 2011 connaît une poursuite de cette dynamique: le chiffre d'affaires évolue de 1,2% à 700 MDH, et Fertima affiche un retour à l'équilibre avec un bénéfice de 1 MDH. Toutefois, 2012 se veut l'année du retour à la case de départ pour la société, qui explique cela par contexte difficile. Son chiffre d'affaires accuse, en effet, une baisse de 17%. Le résultat net, lui, ressort déficitaire à -27 MDH. Le secteur fait mieux L'environnement défavorable, supporté par Fertima depuis 2009, aurait dû avoir un impact sur les réalisations des autres sociétés du secteur de la fabrication de produits azotés et d'engrais. Toutefois, l'analyse des performances de ces dernières fait ressortir un meilleur comportement. Le secteur fait en effet mieux que Fertima, à la fois en termes de croissance de l'activité et de rentabilité, du moins entre 2009 et 2011 (voir point de vue). Alors que le chiffre d'affaires de Fertima (deuxième société du secteur en terme d'activité) affiche une légère croissance entre 2009 et 2011 (+4% en 2010 puis +1,2% en 2011). Celui du secteur enregistre une forte croissance sur la même période (respectivement +58% et 21%). Certes, le secteur est dominé par un acteur, Bunge Maroc Phosphore (représentant 68% de l'activité) dont l'activité, ayant triplé entre 2009 et 2011, a fortement contribué à la croissance sectorielle, mais en réalité, même sans cette entreprise, le secteur aurait suivi une croissance annuel moyenne sur la période 2009-2011 de 3,6% (contre 2,6% pour Fertima). Le même cas de figure est observé sur le volet de la rentabilité. La marge nette (résultat d'exploitation/chiffre d'affaires) réalisée par les entreprises du secteur s'établit, elle, à 2,6% en 2011, contre 0,1% de marge nette pour Fertima. La marge nette sectorielle a connu une nette amélioration entre 2009 et 2011, passant de -16,1% en 2009 à 2,6% en 2011, soit une hausse globale de 18,7 points (contre seulement 9,5 points de hausse de marge nette pour Fertima sur la même période). Une mauvaise gestion des charges Selon les chiffres du secteur (source Inforisk), deux raisons expliquent le décalage entre les réalisations du secteur et celles de Fertima, à savoir la mauvaise gestion des charges opérationnelles et le niveau d'endettement important de cette dernière. Quand la marge opérationnelle (résultat d'exploitation/chiffre d'affaires) réalisée par les entreprises du secteur s'établit à 4,6% en 2011, celle de Fertima ne dépasse pas 2,8%. Une analyse plus fine montre que la marge opérationnelle de Bunge Maroc Phosphore, première société du secteur, se situe à 5% la même année. La taille de cette société, plus importante que celle de Fertima, a été certainement déterminante pour la réalisation de ce niveau de marge opérationnelle. Toutefois, la troisième société du secteur en termes d'activité, Promagri (voir tableau), réussit à situer sa marge au niveau de Fertima (2,8%). Plus marquant encore, la rentabilité nette de Promagri est supérieure à celle de Fertima (1,8% pour la première contre 0,1% pour l'autre). Cet écart s'explique par l'importance du niveau d'endettement de l'unique société de fertilisants cotée en bourse. Ce dernier se situe à 45% en 2011 contre 0% pour Promagri. Cette situation implique donc des charges financières supplémentaires pour Fertima. point de vue Amine Diouri, Responsable études chez Inforisk La rentabilité s'améliore pour deux raisons Le chiffre d'affaires cumulé par les entreprises du secteur de la «Fabrication de produits azotés et d'engrais» en 2011 est de 4,42 MMDH. L'activité du secteur a progressé de 21% entre 2010 et 2011, après une forte croissance entre 2009 et 2010 (+58%). Sur la période 2009-2011, le chiffre d'affaires sectoriel a crû à un rythme annuel moyen de 38%. La marge opérationnelle (résultat d'exploitation/chiffre d'affaires) réalisée par les entreprises du secteur s'établit, elle, à 4,6% en 2011. Depuis 2009, la marge opérationnelle sectorielle a connu une nette amélioration, passant de -11,5% en 2009 à 4,6% en 2011, soit une hausse globale de 16,1 points. La rentabilité nette (résultat net/chiffre d'affaires) du secteur se situe pour sa part à 2,6% en 2011. La marge nette s'est globalement améliorée entre 2009 et 2011 grâce aux effets cumulés d'une meilleure marge opérationnelle et d'une baisse du ratio d'endettement sectoriel (engendrant donc moins de charges financières). Fortement négatif en 2009, la rentabilité nette du secteur de la «Fabrication de produits azotés et d'engrais» a enregistré un retour au vert l'exercice suivant, puis a légèrement régressé en 2011. L'impact de Bunge Maroc Phosphore, première société du secteur, est significatif. Le résultat net de 2009 fortement déficitaire de la société (-33% de marge nette) a représenté 89% du déficit sectoriel lors de cet exercice. Le niveau d'endettement sectoriel est également porté par cette entreprise: le niveau d'endettement (par rapport aux capitaux propres) se situait à 113% en 2011, sous l'effet de la dette de Bunge Maroc Phosphore (145% de ses capitaux propres). Sans cette dette, le ratio sectoriel n'aurait été que de 16%, soit à un niveau très faible. On constate néanmoins que le gearing s'améliore entre 2009 et 2011, passant de 157% à 113% en 2011, sous les effets combinés de la hausse des capitaux propres (+17% en croissance annuelle) et de la baisse du niveau d'endettement sectoriel (-1,2%).