2,7 fois ! C'est l'étonnante multiplication du déficit commercial du Maroc vis-à-vis de son voisin ibérique. Plus qu'une dégradation, l'on peut légitimement parler là d'un effondrement, laissant place à un gouffre commercial qui flirte avec les déficits enregistrés avec l'Arabie saoudite ou le géant chinois. Ainsi, le déficit commercial avec l'Espagne est passé d'environ 7,5 MMDH en 2011, à près de 20,5 MMDH une année plus tard. Il s'agit là d'un des constats saillants qui ressortent des statistiques du commerce extérieur, rendues publiques hier jeudi par l'Office des changes. Il faut néanmoins préciser qu'il s'agit d'une édition provisoire de l'Office, même si historiquement, les statistiques définitives ne se sont jamais éloignées des données provisoires. Que se cache-t-il alors derrière cette explosion inédite ? Dans le détail, l'explication est directement liée aux importations d'hydrocarbures et plus précisément dans la catégorie des produits raffinés. «L'Espagne passe au 3e rang (dans la ventilation du déficit commercial par pays, NDLR) en dépassant plusieurs pays en raison notamment des importations de Gas-oils et fuel-oils qui ont plus que doublé, passant ainsi à 10.949MDH en 2012 contre 4.116MDH en 2011», indique l'Office des changes dans sa publication statistique annuelle. De ce fait, 2012 a connu une mutation significative dans les habitudes d'importations de produits pétroliers. Plus qu'une évolution induite par l'augmentation des prix et des volumes, il s'agit bien là d'une modification dans la structure d'importation par fournisseur. En effet, si effectivement les importations de Gas-oils et fuel-oils ont progressé de 17,3% entre 2011 et 2012, la part relative de l'Espagne parmi les sources de provenance a largement dépassé cette augmentation, surtout qu'une grande partie de cette évolution est expliquée par le renchérissement des prix de ces produits. Selon nos calculs, le prix moyen de la tonne de Gas-oils et fuel-oils a bondi d'environ 13% d'une année à l'autre, passant de 6.700 DH/T à 7.500 DH/T. Aussi, notre voisin du Nord pèse en 2012 à hauteur de 30% dans nos importations de ces hydrocarbures raffinés, contre à peine 13% une année auparavant. Pourquoi l'Espagne, pourquoi maintenant Ceci-dit, pour les professionnels du secteur, il ne s'agit pas là d'une mutation structurelle dans le mix d'importation énergétique marocain. Pas pour l'instant. «Ce qui explique principalement ce constat, c'est la gestion interne des stocks des compagnies pétrolières internationales opérant au Maroc. Ils ont eu massivement recours aux capacités de stockage dont dispose l'Espagne pour s'approvisionner au Maroc, principalement les installations d'Algésiras», analyse pour les ECO, Adil Ziadi, président du Groupement des pétroliers du Maroc (GPM). Cette explosion dans le recours aux capacités ibériques de stockage s'explique également par la proximité géographique et la disponibilité des terminaux de stockage dans le port d'Algésiras. «Les Espagnols ont fortement développé leurs capacités de stockage d'hydrocarbures pendant les 10 dernières années, en mettant en place un véritable hub pétrolier. La mise en service des installations de Nador West Med devrait significativement réorienter une partie de ces flux vers notre futur hub», conclut Zaidi. En Attendant, les chiffres du premier trimestre 2013, qui seront rendus publics par l'Office des changes début juillet donneront une idée plus complète. Le conjoncturel est souvent le début du structurel...